Festival de Cannes Le cinéma marocain, au rendez-vous depuis deux ans au festival international du cinéma de Cannes, s'absente cette année de la compétition officielle qui s'ouvre mercredi, mais sera présent dans une autre section, celle de la sélection de l'Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion (ACID) avec le film «C'est eux les chiens!» de Hicham Lasri. L'ACID, une association de cinéastes qui soutient la diffusion en salles de films indépendants sans distributeurs, a prévu de projeter le 19 mai le long métrage marocain, en première mondiale, parmi sa sélection durant le Festival de Cannes en vue d'en faire la promotion auprès des distributeurs et des programmateurs de salles de cinéma. Après «Les chevaux de Dieu» de Nabil Ayouch, sélectionné l'année dernière dans la section «Un certain Regard» de la compétition officielle, le dernier opus de Hicham Lasri, produit par le même Ayouch (Ali n' Films), est en lice avec huit autres films français et étrangers. «En allant à Cannes, c'est une nouvelle aventure qui s'ajoute au parcours brillant du jeune réalisateur marocain, considéré comme un des cinéastes incontournables de la nouvelle génération», indique-t-on auprès de la société de production qui avait produit les premiers courts métrages de Hicham Lasri, avant de l'accompagner dans le long métrage au sein de sa «Film Industry» où il a réalisé trois films («L'os de fer», «Le peuple de l'horloge» et «TiphinaR»). Dans «C'est eux les chiens», Lasri raconte l'histoire de Majhoul, emprisonné après les émeutes de 1981 au Maroc avant d'être libéré en 2011, soit 30 ans plus tard, en plein Printemps arabe. Majhoul, dont le rôle est campé par l'acteur Hassan Badida, doit apprendre à trouver sa place dans ce nouveau monde qui lui est inconnu, tout en faisant une recherche sur son passé. «C'est eux les chiens» qui met également en vedette Yahya El Fouandi, Lmad Fijjai et Jalal Boulftaim, s'annonce donc comme «le récit d'un mort vivant revenant peu à peu à la vie, se réappropriant l'espace et ses repères pour finir par comprendre que la vie continue avec ou sans lui». Au cours de l'intrigue, une équipe de la télévision publique, composée d'un journaliste, d'un opérateur cadreur et d'un stagiaire vont croiser le chemin de Majhoul, faisant de sa quête pour trouver sa famille et reconstruire sa vie dans le Maroc d'aujourd'hui, le sujet d'un reportage et un but commun. C'est l'histoire d'une rencontre «entre ceux qui cherchent le sujet, et un sujet qui se recherche lui-même, entre une équipe de télévision et un prisonnier politique, entre le Maroc d'aujourd'hui et celui d'hier». Hicham Lasri présente son film comme «une quête initiatique qui amène des interrogations sur notre place dans une société en pleine évolution». «C'est aussi avant tout une radiographie du Maroc d'aujourd'hui dans laquelle s'élève la question de la place du citoyen arabe dans ce brasier qu'est notre Monde moderne», relève-t-il.Aux yeux du producteur Nabil Ayouch, il s'agit d'un «film coup de poing, contemporain dans sa forme et puissant par ce qu'il exprime». «Il place Hicham en orbite des jeunes réalisateurs arabes avec lesquels il faut désormais compter», souligne-t-il. La réalisation s'inscrit dans le cadre de la Film Industry, un programme de partenariat entre sa société Ali n' Production et la Société nationale de radiodiffusion et de télévision (SNRT), sous l'égide du ministère de la Communication, autour de la production de 42 films de long métrage. Ce programme vise à promouvoir le film de genre au Maroc et à aider le pays à professionnaliser sa production cinématographique. Cette stratégie passe par la formation et l'encadrement de tous les corps de métier du cinéma, assure-t-on auprès de la Film Industry qui s'enorgueille d'avoir permis de former des centaines de techniciens, de créer de nouveaux métiers du cinéma (effets spécialistes, cascadeurs, chorégraphes), de susciter des vocations et de découvrir de nombreux talents. «La film industry est un pari sur le futur de notre nation en tant que pays de cinéma. Et c'est un pari qui a été remporté, en voyant nombre de ses auteurs, réalisateurs et interprètes faire de grandes carrières tels que Yassine Fennane, Hicham Lasri, Brahim Chkiri, Hicham Ayouch, Talal Selhami, Ali Mejboud... et de nombreux autres», souligne-t-on. La sélection du nouveau film de Hicham Lasri à l'ACID intervient après une participation remarquable l'année dernière du cinéma marocain à Cannes où deux réalisateurs ont été primés dans des sections parallèles: Nabil Ayouch, lauréat du prix François Chalais pour son film «Les Chevaux de Dieu», présenté par ailleurs en compétition officielle, et Fyzal Boulifa, lauréat du 1-er Prix illy du court métrage à la Quinzaine des réalisateurs. C'était le cas également en 2011 où le 7ème art national s'était imposé aussi bien en compétition officielle avec «La source des femmes» du réalisateur roumain Radu Mihailean» que dans la Quinzaine des réalisateurs avec «Sur la Planche» de Leila Kilani. Cette participation intervenait après la sélection, en 2003, des films «Mille Mois» de Faouzi Bensaidi et «Les Yeux Secs» de Narjiss Nejjar, respectivement dans les sections «Un Certain regard» et «La quinzaine des réalisateurs». La première participation avec un drapeau marocain au Festival de Cannes remonte à 1952 avec le film «Othello», tourné à Essaouira, du réalisateur Orson Welles en compétition officielle, alors que le premier film marocain à concourir dans la section «Un Certain Regard» était celui d'Ahmed Maanouni «Alyam, Alyam» (O les jours) en 1978, l'année de sa création. Sur le plan institutionnel, le Centre Cinématographique Marocain (CCM) s'active dans le cadre du Village international du festival de Cannes qui «offre à tous les pays producteurs de cinéma la possibilité de présenter et de promouvoir leur cinématographie, leur culture, leurs institutions et de développer des échanges». Le CCM y participe, depuis 2006, par l'organisation d'un pavillon qui «vise à assurer une promotion du film marocain et le Maroc en tant que destination privilégiée des producteurs étrangers».