Une semaine après l'avènement de 2014, l'impression générale au sein de la société espagnole traduit le grand malaise qui s'empare des citoyens devant la profusion des cas de corruption, la progression du chômage des jeunes de moins de 25 ans, l'optimisme mesuré des chômeurs et l'épargne des ménages qui est à son niveau le plus bas depuis 2007. Ces impressions sont le résultat des baromètres d'opinion, de statistiques officielles et données puisées dans la base de données d'institutions publiques. Tout ceci s'inscrit dans le climat d'opinion qui règne en Espagne, un pays qui aspire à abandonner les sentiers de la crise. Bien que les symptômes de la récupération fussent diagnostiqués, fin décembre, l'inquiétude couve encore dans les foyers, surtout ceux dont un ou tous les membres sont en chômage. En passant en revue le dernier baromètre du Centre d'investigations sociologiques (CIS : public), il est clair que 2014 ne sera pas une année différente des précédentes. Pour l'écrasante majorité des personnes interviewées, les séquelles de la crise qui dure depuis 2007, sont profondes. Outre la destruction de millions de postes d'emploi, d'autres phénomènes sociaux, telle l'implication d'hommes politiques dans des cas de corruption, causent également des maux de tête pour la majorité des Espagnols. C'est une autre conséquence de la crise. Deux Espagnols sur trois chômeurs sont pessimistes La persistance du chômage a eu comme conséquence la perte d'espoir chez 62,6% des personnes en chômage de trouver un emploi en 2014, signale le CIS dans son baromètre de décembre. En face, 73,5% des travailleurs actifs assurent qu'ils sont certains de ne pas perdre leur poste d'emploi au cours des douze prochains mois. Selon l'enquête du CIS, réalisée entre le 1er et le 13 décembre dernier, 25,6% des 2.466 personnes interviewées assuraient être en chômage, soit 5% de moins par rapport à l'enquête menée le mois précédent. Cependant, les perspectives ont peu changé pour les sans-emploi en comparaison avec le même mois de 2012. De ce fait, 40,3% croient qu'il est peu probable d'accéder à un emploi et 22,3% sont encore plus pessimistes écartant totalement la possibilité de reprendre le travail. Par contre, un tiers de ce collectif (29,8%) ne perdent pas espoir et estiment qu'ils sont optimistes quant à leur chance d'accéder à un éventuel poste de travail. Un bon point : 73,5% des travailleurs actifs ont confiance de maintenir leur emploi, contre 68,3% en décembre 2012. Ceci n'empêche que 86,9% des personnes interviewées estiment que la situation économique du pays est «mauvaise» ou «très mauvaise». Aucune d'entre elles ne considère que celle-ci «va très bien» et 11,8% estiment qu'elle est «régulière». Cette impression devient généralisée s'il on prend en considération l'opinion de 91,5% de l'échantillon qui assurent que leur pays traverse une situation économique «mauvaise» ou «très mauvaise». De la même manière, 40,6% des personnes se déclarent convaincues que la situation sera la même et pour 29,1% elle deviendra encore pire en 2014. Seuls 20,5% pensent le contraire. La gangrène de la corruption La crise du marché du travail n'est pas l'unique problème auquel sont confrontés les citoyens espagnols. La corruption, unie à la fraude, est citée dans la même enquête du CIS par 37,6% des personnes interviewées comme la deuxième préoccupation majeure. Leurs attitudes à l'égard de ce phénomène ont augmenté de 5,8 points par rapport à novembre (31,8%) pour se maintenir comme le deuxième problème de la société. De même, pour 94,8% de ces personnes la situation politique «n'est pas bonne». En général, les attitudes de la société paraissent sévères à l'égard des hommes politiques puisque 92,3% des Espagnols pensent que la situation actuelle n'est guère meilleure d'il y a un an et 79,1% croient qu'en matière politique, rien ne serait changé dans le sens positif. Ce climat d'opinion coïncide avec la publication, mercredi, d'une étude de l'Institut Espagnol de la Statistique (INE : public) signalant que le taux d'épargne des ménages et institutions sans but lucratif au 3e trimestre de 2013 a baissé de 0,8% pour se situer à 9,2% (- 0,8%) de la rente disponible, soit son niveau le plus bas depuis 2007. Les dépenses en consommation des ménages ont de leur côté régressé de 0,4% pour atteindre 147,037 milliards au même trimestre. L'économie espagnole a fait pourtant preuve d'une grande capacité d'investissement de 5,758 milliards d'euros durant le même trimestre, ce qui équivaut à 2,3% du Produit intérieur brut (PIB), soit plus que le double du montant enregistré durant la même période de 2012 (2,771 milliards d'euros : 1,1% du PIB). Cette progression est due principalement au bon comportement des exportations (+2,9%) et de la baisse des importations (-1,4%) en comparaison avec le même trimestre de l'exercice précédent. L'endémique chômage des jeunes Encore une fois, les données sur le chômage des jeunes en Espagne ne sont pas porteuses de bonnes nouvelles puisque phénomène affecte 57,7% en novembre dernier, soit 0,3% de plus qu'en octobre. C'est une statistique puisée dans le dernier rapport de l'Office statistique de l'union européenne (EUROSTAT) qui relève que l'Espagne est devenue leader en chômage juvénile en surclassant la Grèce qui enregistrait 54,8% en septembre dernier. Selon l'Eurostat, il existait 983.000 chômeurs espagnols de moins de 25 ans en novembre, contre 973.000 en octobre dernier. Dans l'ensemble de l'euro-zone, 3,57 millions de chômeurs jeunes ont été comptabilisés (24,2%) alors que dans l'ensemble de l'UE, ce chiffre atteint 5,66 millions de jeunes chômeurs (23,6%). Compte tenu de ces données officielles et des impressions de citoyens, l'économie espagnole affronte un nouvel exercice alourdi par un héritage empoisonné. La question du chômage des jeunes fait partie des grandes préoccupations de la société dans la mesure où elle risque d'hypothéquer l'avenir d'une génération entière.