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La «rue digitale» bouleverse notre monde
Publié dans Albayane le 03 - 12 - 2023


Par Jamal Eddine NAJI
En fait, elle le menace. Notre monde est en passe de changer de fond en comble. En Août 1945, l'Homme s'est fait la démonstration à lui-même qu'il était désormais capable d'exterminer sa propre espèce, en plus de toutes les autres, grâce à la bombe atomique (lâchée sur les villes Hiroshima le 6 Août et Nagasaki le 9 Août, plus de 200.000 morts) ...Près de 80 ans plus tard, une nouvelle ère de menace apocalyptique, quasi similaire, se dessine devant nous, à l'échelle de la planète encore occupée par notre espèce. La menace, cette fois, n'est pas aux mains de quelques humains qui seraient aux commandes des Etats, comme en 1945.
La menace, en 2023, est l'Internet avec sa toile et ses territoires d'extension qui ne cessent de s'étendre, de se démultiplier, de se muer et, surtout, d'être accessibles à chaque habitant de la terre qui aurait, cependant, des moyens matériels de connexion. Comme si chaque individu disposait du bouton rouge réservé à ce jour, du fait de la menace atomique, à une poignée de chefs d'Etat, ceux du « club nucléaire » ...
Soit moins de dix « boutons rouges » ou « codes rouges » : USA, Royaume Uni, France, Russie, Chine, Corée du Nord, Inde, Pakistan et Israël. Avec l'Internet, chacun de nous a un « bouton rouge » à portée de main, de ses doigts dirions-nous ... Via le World Wide Web (www), les plateformes, les blogs et, surtout, les réseaux dits sociaux. Réseaux (asociaux plutôt) qui configurent et hébergent toute communication entre les humains, toute parole, toute émotion, tout ressentiment et toute décision ou réaction du gouvernant comme du gouverné, du politique, du chef d'armée, de l'élu, du criminel, de l'adulte comme de l'enfant !
Aux armes nécessaires à la guerre, on a adjoint, de plus en plus aux avant-postes des fronts de combat, ces réseaux : Facebook, X (ex Twitter), Instagram, YouTube, etc. Des armes qui ont la même force de frappe, sinon plus, que des drones armés, des avions bombardiers ou des missiles de longue portée, destructeurs de l'humanité en général et de l'humanité de chacun quand ces réseaux nourrissent les conflits entre individus, entre groupes ou communautés, entre cultures et civilisations, entre religions et idéologies. Nulle armée, de nos jours, n'ignore cette force de frappe qui peut infléchir le cours d'un conflit, l'influencer, lui garantir – ou lui faire perdre – l'appui stratégique si important et décisif de l'opinion publique, la nationale comme la mondiale.
De tout temps, tous les Etats, en état de guerre ou non, gèrent et gouvernent leurs peuples en tenant compte des réactions de «la rue», ce «tribunal de la rue», dit-on, qui, jusqu'à présent, désigne le peuple. Or, maintenant l'attention des Etats et des gouvernants est portée, avec angoisse et inquiétude, sur cette « rue digitale» qu'irriguent ces réseaux du Net. Une «rue digitale», si crainte tant elle peut déterminer et façonner ce qui pourrait se passer dans le réel, dans la rue réelle.
De nos jours, les émeutes, les révoltes, les guerres, démarrent dans le virtuel pour envahir ensuite le réel. Depuis plus de dix ans, les exemples ont été nombreux, y compris dans notre région.
Qu'on s'arrête sur les guerres actuellement en cours, y compris le déluge biblique de feu, d'acier et de sang en Palestine, ou sur les élections (aux Amériques, en Europe, en Asie, en Afrique), ou sur les séditions ou coups d'Etat (en Afrique), ou sur les manifestations populaires dans tel ou tel pays, ou encore, même, sur les lynchages médiatiques et/ou numériques de leaders, de célébrités, la « rue digitale » est de plus en plus l'arène ou le tribunal – sans appel pratiquement- qui détermine et scelle le cours et le sens des faits et des histoires, de l'Histoire humaine, in fine !
Notre monde réel, de nos jours, est de moins en moins distinct d'un autre monde en mouvement conquérant : le monde virtuel, celui de la toile (bien qualifiée en arabe par la référence à l'araignée) et qui héberge et fait rugir la «rue digitale». Nombreux sont les humains qui passent plus d'heures de leur vie dans cette «rue digitale » que dans la rue du réel. Les humains ont mué en une nouvelle espèce : une espèce vivant dans les réseaux qui conglomèrent les connus et les anonymes, les justes et les criminels, les savants et les ignorants, d'un bout à l'autre de la terre.
La rumeur, la manipulation, les infox ou fake news, les deep news, l'intox, les sondages d'opinion plus ou moins tripatouillés, constituent l'air et la pitance inépuisable pour les occupants et usagers de ces espaces de « vie virtuelle », les avertis comme les non avertis de la nature factice de ce monde. Un monde irrésistible pour chacun de nous, qu'on soit devant un écran ou enchainé à son cellulaire « intelligent ». La réputation d'une personne, la légitimité d'une gouvernance, la crédibilité d'une politique, la justesse d'une cause, la qualité et l'appréciation d'une œuvre artistique, la vérité scientifique d'un remède, d'une découverte ou invention, la Vérité tout court et de tout dépendront à l'avenir et déjà maintenant de ce qu'en fait ou en fera la « rue digitale » constituée en longueur et en largeur par les dits réseaux sociaux. Gare au réel et à sa survie !
«Les réseaux sociaux sont une bouillie dévorant la réflexion et le dialogue», dit le politologue Gilles Kepel, commentant la géopolitique mondiale actuelle et ses cataclysmes au Nord et au Sud...Ces réseaux engloutissent la curiosité pour le Savoir, l'apport de l'intelligence et de la Raison de l'Homme, pourrait-on ajouter. Et si on invoque, en plus, dans ce tableau inquiétant de l'impact des réseaux, l'intelligence artificielle (IA), mise au service du monde virtuel, faux et factice, avec ses avatars et usurpations, nul doute qu'on doit s'attendre, à terme, à l'avènement d'un autre monde où même les morts (« ressuscités » par l'IA, avec visage et voix) pourraient reprendre du service parmi les vivants... cheikh Zayed ben Sultan Al-Nahyane, mort en 2004, n'est-il pas apparu, sur la scène de la COP28 à Dubaï en hologramme, le 1er décembre 2023, pour souhaiter de « vive » voix la bienvenue aux délégués à cette conférence dont plus de 140 chefs d'Etat, ses homologues...vivants ! Sur scène, mort et vivant communiquent, se parlent ! Imaginez ce que les réseaux sociaux pourraient faire faire ou faire dire aux morts... grâce à l'IA !
ChatGPT, dont on célèbre cette semaine la première année de naissance, fournira plus de munitions, une plus grande force de Le frappe, aux réseaux dits sociaux, permettant ainsi au monde virtuel de déterminer davantage encore le sens et la marche de notre monde réel, voire de le remplacer pour dicter nos faits et gestes, pour influer sur nos croyances et instincts, pour apprivoiser ou inféoder notre intelligence et notre imaginaire. Ceci, à l'aune d'une suprématie «orwellienne» de la machine et des algorithmes (pardonnons à Al Khawarizmi !) qui nous plongerait dans une dystopie où nulle utopie humaine encourageante et passionnante pour appréhender le réel ne nous serait ni familière ni compréhensible. On perdrait, alors, grande part de notre humanité, singularité de notre espèce !
Faut-il redouter une telle perspective ? Pourquoi pas ?!


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