Selon le Bureau international du travail (BIT), 270 millions de personnes sont victimes d'accidents du travail non mortels qui, chacun, entraînent en moyenne trois jours d'arrêt de travail, et 160 millions de nouveaux cas de maladies liées au travail sont dénombrés chaque année. Mais ce qui est dramatique c'est que 2,2 millions de personnes décèdent chaque année dans le monde des suites d'accidents du travail et de maladies professionnelles, soit 6000 travailleurs par jour. Par ces chiffres ahurissants, qui donnent froid au dos, le Bureau international du travail entend attirer l'attention sur ces drames à l'occasion de la Journée Mondiale pour la Santé et la sécurité au travail, dont la première édition date de 2003. A l'instar des autres pays de la planète, le Maroc s'apprête à célébrer la journée mondiale pour la santé et la sécurité au travail. C'est un événement important, mais qui passe pratiquement inaperçu pour diverses raisons parmi lesquelles nous pouvons citer, entre autres, le travail au noir, l'informel, le travail des jeunes enfants, des petites bonnes, le non respect des règles de sécurité en vigueur, le manque d'information, l'ignorance, l'exposition aux produits dangereux sans aucune protection, la violation des textes de loi … Ce sont là quelques exemples édifiants qui mettent en péril la santé des travailleurs et qui les exposent à des risques certains. Nous avons encore très vivace dans nos mémoires l'incendie de l'usine Rosamor à Casablanca qui avait fait une cinquantaine de morts, l'émotion est encore intense tant il est vrai que c'est le genre de drame que l'on aurait pu éviter si toutes les consignes et moyens de sécurité avaient été respectés. A côté des incendies qui causent des ravages considérables au niveau des unités de production comme ce fut le cas pour l'usine de peinture Atlas dont les pertes furent estimées à plusieurs millions de DH. Le même scénario s'est répété pour l'usine Richmond qui fabrique des matelas, il en a été de même au niveau du port quand de temps à autre se déclare un incendie du fait de l'existence sur les lieux de multiples sources prêtes à s'enflammer à la moindre défaillance. Nous ne citerons pas ici les incendies des petites unités de production qui travaillent dans l'illégalité la plus totale et qui se soucient peu de la sécurité ou de la protection de leurs employés. A côté de ces exemples, il y a les ouvriers qui travaillent dans des usines qui utilisent des métaux dangereux tel le plomb. En l'absence de moyens efficaces de protection, ces ouvriers contractent de graves maladies comme le saturnisme. Ceux qui travaillent dans les mines sont exposés aux risques de silicose, une maladie handicapante et mortelle. Les ouvriers qui travaillent dans le bâtiment paient chaque année de lourds tributs en vies humaines par manque total de sécurité élémentaire. Même chose pour toutes les professions qui mettent l'employé en contact direct avec des sources susceptibles de porter atteinte à sa santé ou à sa sécurité. C'est le cas des professionnels de santé, des agents de la circulation, des personnes qui travaillent sur les lignes haute tension, des agents qui vérifient les canaux d'assainissement… Sans trop nous étaler sur les causes et risques liés au manque de sécurité De la responsabilité des uns et des autres Soulever le problème de la santé et de la sécurité au travail, nous invite à préciser en premier lieu à qui incombe cette responsabilité. Qui sont les différentes parties concernées ? A quel titre et à quel niveau ? Sur le plan juridique, le Code du travail impute la responsabilité de la sécurité des installations aux patrons. Ils doivent constamment s'assurer de l'identification des dangers potentiels, et de leur énumération, et en faire un inventaire précis. La prévention technique s'articule autour de deux volets. D'un côté, il y a la collective, comprenant le choix, l'entretien et le contrôle des machines, une signalisation dans l'entreprise connue et comprise par tous, une éducation sanitaire et un affichage des règlements. D'un autre côté, il y a la prévention individuelle. Les agents, les ouvriers qui sont exposés doivent obligatoirement observer les consignes de sécurité réglementaires qui consistent dans le port de combinaison, masque, casque afin de minimiser les effets nocifs et de prévenir un contact direct avec les sources pouvant leur porter atteinte. L'inventaire de tous ces éléments est communément appelé par les professionnels «cahier unique». C'est un registre qui regroupe l'ensemble des risques et les moyens mis en place pour les prévenir. Il est clair qu'entre la théorie et la pratique existe une très grande différence. Peu d'entreprises disposent d'un cahier unique. Pour la simple raison que la loi ne les oblige pas, expressément, à le mettre en place. Il faut savoir qu'en théorie, puisqu'on en parle, c'est l'inspecteur du travail qui devrait s'assurer du respect des normes de sécurité dans les sites industriels. Mais comme dit l'adage : la plus belle femme au monde ne peut donner …Nos inspecteurs de travail ne sont pas formés pour mener à bien de telles missions. Par ailleurs, il y a tellement de contraintes, d'obstacles, d'interventions que ces inspecteurs finissent toujours par renoncer à mener à bien leur travail. Le médecin du travail a lui aussi une part de responsabilité. Il joue un rôle préventif qui consiste à entreprendre et à réaliser des examens médicaux nécessaires et à éviter toute altération de la santé des salariés du fait de leur travail qui les expose aux multiples risques. A cet effet, l'article 318 du code du travail est très explicite. Si l'on en croit cet article, tous les travailleurs (dans le privé comme dans le public) ont droit au suivi par un médecin du travail à même de traiter les maladies professionnelles qui sont responsables, en grande partie, des accidents du travail. Aussi, il reste énormément à faire en matière de santé et de sécurité au travail dans notre pays où la culture d'une véritable culture de la sécurité au sein des entreprises fait gravement défaut. Il ne s'agit pas de tout entreprendre en même temps, il faut prendre exemple sur les pays développés qui nous ont devancé dans ce domaine, s'imprégner de leurs expériences, adapter ces systèmes à notre contexte, encourager, accompagner et motiver les entreprises qui s'impliquent dans la protection de la santé de leurs employés et surtout agir au niveau des comportements et attitudes potentiellement dangereux tant pour la santé que pour la sécurité des individus et des installations Il faut savoir que plus de cent pays participeront à la célébration de la Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail en organisant des manifestations et activités spéciales dans ce cadre. Conjointement, l'OMS et le BIT uniront leurs forces pour promouvoir et renforcer leur coopération au niveau national entre les ministères du Travail et ceux de la Santé de même qu'avec les milieux d'affaires, les organisations de travailleurs et d'employeurs et d'autres acteurs de la société civile. Qu'en est-il chez nous ?