Ahmed, 24 ans, marié, repris de justice, s'est lancé dans le cambriolage des maisons notamment celles de fonction à Beni Mellal. Il a été arrêté dernièrement par la police et mis sous les verrous. Elle n'imaginait pas que les trois personnes qui se tiennent devant elle sont des policiers et que le jeune homme, menotté, qu'ils conduisent est son mari. Perturbée, elle leur a libéré le chemin vers la chambre à coucher. “Où sont le ceinturon, le bracelet en or et la montre ?“, demande l'un des policiers en civil. Elle était encore sous le choc de l'image de son époux entouré des policiers. Les yeux hagards, elle est restée bouche-bée. Le policier lui a répété la même question sur un ton plus ou moins sévère. Elle a sursauté comme si elle était plongée dans un sommeil profond.“Ce sont des cadeaux que mon époux m'a offerts, il y a quelques mois“, répond-elle tout en lui indiquant l'armoire. Le policier a éclaté de rire en regardant le jeune homme. Il n'a jamais pensé qu'un cambrioleur puisse offrir son butin comme cadeau à son épouse. Et il a affirmé à la femme qu'il s'agit du butin des cambriolages perpétrés par son mari. Depuis son mariage, il n'y a pas moins d'un an, les comportements de son mari ne lui ont jamais mis la puce à l'oreille. Il sortait vers 8h du matin et ne retournait que vers 20h. Il ne rentrait jamais entre midi et 14h pour déjeuner avec elle. Les circonstances du travail obligent, lui précisait-il. Âgée de 18 ans, elle restait chez elle à l'attendre quotidiennement à l'exception du dimanche, son jour de repos, qu'il passait avec elle. Seulement, le menteur finit toujours par être démasqué. Idem pour Ahmed. T, qui ne pourra plus rien cacher à son épouse, ce samedi 17 juillet 2004. Il est né un jour de 1980 dans un douar du Caïdat Takazirte, province de Beni Mellal. Ses parents ont divorcé alors qu'il était encore à son quatrième printemps. Pris en charge par son père, chauffeur de taxi, Ahmed n'a pas pu vraiment vivre avec lui, puisque le père s'est remarié. Confié à sa grand-mère, il a entamé de mauvaises fréquentations. Ces fréquentations l'ont détourné du chemin des études au point qu'il a été mis en dehors de l'école en 1991, après avoir triplé la 5ème année d'enseignement fondamental. Ne supportant plus ses comportements, la grand-mère l'a chassé. Il se réfugie chez sa mère, également remariée. Et ses mauvaises fréquentations se sont perpétuées au point qu'elles l'ont influencé du pied au cou. Commençant par apprendre à fumer des cigarettes, il a fini par devenir toxicomane et ivrogne. Entre-temps, il éprouve un besoin d'argent nécessaire pour se ravitailler. La solution ? Ses amis lui ont indiqué le plus court chemin : le vol à la tire. Certes, il a été arrêté à maintes reprises. Ayant été mineur, il n'a jamais été condamné d'une lourde peine. Il fallait attendre 2001, lorsqu'il avait 21 ans, pour qu'il soit jugé pour la première fois d'une peine plus ou moins lourde, à savoir trois ans de prison ferme pour vol qualifié. Heureusement pour lui, la grâce royale lui a réduit la peine à deux ans. Et il s'est retrouvé en liberté en 2003. Pensant qu'il s'est redressé et qu'il va reprendre le droit chemin, Ahmed s'est marié à une jeune fille. Cette dernière qui demeurait un peu plus loin de Beni Mellal ne savait rien du passé d'Ahmed et s'est contentée de ce qu'il lui avait raconté. Deux mois plus tard, il s'est retrouvé dans l'impossibilité de subvenir aux besoins de son foyer. Et il a repris une fois encore le chemin, au moins pour lui, le plus court et le plus facile. Cette fois, avec plus de professionnalisme. Quand il a été arrêté la dernière fois, Ahmed a détaillé les circonstances et les méthodes qu'il utilisait lorsqu'il passait à l'action. D'abord, il agissait seul, sans complice. Deux : il choisissait le mardi, jour du Souk hebdomadaire, lors duquel la majorité des habitants ne restent pas chez eux et se rendent au souk. Trois : il préférait les habitations qui ressemblent à des villas cloisonnées par des arbres. Quatre : il ne passait à l'action qu'entre midi et 14h, le temps où même les rues qui entourent l'habitation visée sont plus ou moins désertes. Cinq : il ne cambriolait pas les maisons situées dans le même quartier et préférait cibler les maisons situant quelques kilomètres l'une de l'autre. Pour ses cambriolages, il en a énuméré cinq ; la première est une habitation de fonction, tributaire aux services des travaux publics. Lorsqu'il y est entré après avoir escaladé un mur et brisé les vitres d'une fenêtre, il a fouillé l'armoire de la chambre à coucher. Il y a trouvé quatorze bracelets, trois chaînes, une bague et un ceinturon, tous en or, une montre, un téléphone portable, une caméra-vidéo et une somme de 20 mille dirhams en espèces. La deuxième est une habitation située à la rue Ourbie. Là, il a mis la main sur un téléviseur, 14 pouces, qu'il avait liquidée à 700 dirhams. Le troisième cambriolage a été effectué dans une habitation de fonction où il a mis la main sur une somme de six mille dirhams. Il a été remarqué cette fois par des curieux qui ont tenté de l'arrêter. Seulement, il les a menacés avec un couteau avant de prendre la poudre d'escampette. Lors de la quatrième opération, il a cambriolé une habitation, également de fonction, située à la Route Ouled Hammou, et a mis la main sur trois bracelets, trois chaînes, huit boucles, cinq bagues et une gourmette, tous en or. La cinquième maison cambriolée se trouve au quartier Oulfa où il a subtilisé une somme de 1500 dirhams et un téléphone portable. Comment il a été arrêté ? Après avoir commis sa cinquième opération, il s'est dirigé vers un coin situé près d'un hôtel de la ville de Beni Mellal pour s'asseoir. Quelque temps plus tard, un fourgon s'est arrêté près de lui et des policiers sont descendus pour lui demander sa carte d'identité nationale avant de le fouiller pour trouver deux portables dans ses poches. Intrigués, les policiers l'ont conduit au commissariat. Et il a craché le morceau sans trop de difficultés. Actuellement, Ahmed est sous les verrous. Il a tout loisir de méditer sur son triste sort.