Rachida Dati devait discuter avec l'éminence grise de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant, des modalités de son exfiltration vers le Parlement européen à la veille de son départ du gouvernement. Avec un pantalon noir moulant quelques rondeurs récentes, une chemise blanche estivale et décontractée sur de hauts talons d'une élégance certaine, Rachida Dati quitta seule, dans le champ de la caméra, le perron de l'Elysée où elle venait, sans aucun doute, d'assister à son dernier Conseil des ministres. Le sourire toujours aussi éclatant, le regard toujours aussi espiègle. Son départ était programmé depuis longtemps par Nicolas Sarkozy et le miracle qui devait renverser la tendance n'a pas eu lieu. A un moment donné, lorsque le ministre du Travail Brice Hortefeux, un intime de Sarkozy, avait été élu, à la surprise générale, député européen et que le président de la République avait fait savoir qu'il le gardait, malgré tout au gouvernement, un ange s'arrêta, pensif, hésitant, sur la place Vendôme, avant d'entonner allégrement la neuvième symphonie de Beethoven. Dès la fin de ce dernier Conseil des ministres historique, Rachida Dati s'envole pour son nouveau destin bruxellois où elle avait participé avec Michel Barnier à une première réunion du Parti populaire européen (PPE) à laquelle appartient l'UMP, le parti du président Sarkozy. L'enthousiasme de Rachida Dati pour ses nouvelles fonctions était tellement criant que c'est Michel Barnier qui communiqua à sa place sur son propre positionnement : «Elle sera membre de la commission des Affaires économiques et monétaires, une commission majeure, surtout en ce moment». Reçue jeudi par Claude Guéant, le secrétaire général de l'Elysée, Rachida Dati devait discuter avec l'éminence grise de Nicolas Sarkozy des modalités de son exfiltration vers le Parlement européen à la veille de son départ du gouvernement. Un autre sujet plus piquant était à l'ordre du jour qui concerne les ambitions personnelles de Rachida Dati, la ministre qui quitte Nicolas Sarkozy avec un cœur gros d'amertumes et de frustrations. Signe inconstatable de la dégradation des relations entre Rachida Dati et Nicolas Sarkozy qui est incarné par un petit événement dont l'importance politique n'échappe à personne. Rachida Dati a commencé à fréquenter le club « Génération France » que dirige le député de Meaux et patron du groupe UMP à l'Assemblée national, Jean-François Copé. Malgré son appartenance à la majorité présidentielle, Jean-François Coppé est à ranger dans les cauchemars politiques vivants de Nicolas Sarkozy qui lui compliquent la tâche et lui empoisonnent la vie avec presque autant d'acidité que le ferait un Dominique de Villepin en rupture de banc ouverte. Que Rachida Dati fréquente aussi des chiraquiens tendance radicale comme Christian Jacob est un signe supplémentaire de la posture du défi qu'elle semble adopter à l'égard de son ancien parrain. Histoire de bien signifier que ce n'est pas parce qu'on l'a exilée à Strasbourg qu'elle va sortir aisément du cadre de la photo politique française, cette déclaration remplie de promesse de lutter par sa survie : «Je serai un député européen de proximité. Je suis organisée, donc je suis et je resterai très présente à la mairie du VIIe (à Paris) comme tous les élus qui m'entourent». Rachida Dati vient de rajouter à l'agacement qu'elle suscite à l'Elysée un autre palier. A Tous ceux qui seraient tentés de l'enterrer avec pertes et fracas et d'ériger une croix sur son bilan, Rachida Dati vient de publier un fascicule de 102 pages édité à 7.000 exemplaires intitulé «…Parce qu'il fallait réformer la justice de la France pour l'adapter au XXIe siècle» et envoyé à tous ceux qui comptent. Même après son départ, Rachida Dati pourra toujours se consoler de rester, pour un moment, au centre de préoccupation politique actuelle sur au moins deux plans : politique et diversité. Le successeur, homme ou femme de Rachida Dati, forcément un poids lourd vue la liste des prétendants, aura forcément à subir la comparaison avec l'ancienne garde des Sceaux. Rachida Dati aura à supporter, elle, la comparaison avec des profils issus de la diversité que la rumeur publique donne déjà à l'antichambre du pouvoir, comme la Franco-Marocaine, femme d'affaires, Fatine Layt ou la Franco-Algérienne, conseillère municipale de Lyon, Nora Berra.