Plus d'un an après l'entrée en vigueur de la réforme de la flexibilité du dirham, l'heure est au bilan. Un bilan plutôt positif à croire Mounir Rizki, Directeur des opérations monétaires et de change à Bank Al-Maghrib qui intervenait ce jeudi 14 mars à une conférence-débat organisée par la Chambre de commerce Britannique au Maroc sous le thème : « Flexibilité du dirham et réglementation des changes, quel premier bilan ? ». Après avoir rappelé l'objectif de cette réforme à savoir garantir une économie résiliente face aux chocs exogènes (crise financière, augmentation du prix des matières premières...), Mounir Rizki a mis l'accent sur cette décision souveraine qui émane d'une volonté des autorités et non pas d'une décision forcée comme ça été le cas dans d'autres pays pour ne citer que l'Egypte. En effet, cette décision avait suscité une grande polémique entre les partisans et les opposants qui craignaient des risques notamment une éventuelle dépréciation du dirham non pas sans conséquence sur l'économie marocaine et du coup sur le pouvoir d'achat des Marocains. Des craintes non fondées selon le responsable de BAM qui a assuré que non seulement le dirham s'est apprécié, mais depuis mars dernier, la banque centrale n'a pas servi de devises aux banques pendant les séances d'adjudication. Ce qui prouve que les banques sont devenues plus autonomes. « L'année a certes démarré avec une petite dépréciation du dirham à cause des préoccupations des opérateurs mais à partir de février le dirham s'est rapidement apprécié », a tenu à préciser Mounir Rizki. Il faut dire aussi que cet état de fait est lié à la conjoncture nationale mais également internationale qui impactent l'offre et la demande. La baisse de la facture énergétique due à celle des prix des matières premières (principalement du pétrole) conjuguée à une croissance négative des principaux partenaires du Maroc a eu comme résultat une baisse de la demande en devises. Donc tant qu'il n'y a pas une croissance forte il n'y aura pas de besoins importants d'achats de devises. Ce qui atteste que la flexibilité du dirham est strictement liée à la conjoncture économique. Les premiers fruits de la réforme Ce mécanisme a permis au marché de s'autoréguler et aux banques de s'autosuffire, ce qui s'est reflété sur leur position de change qui s'est améliorée. Résultat des courses : l'intervention de la Banque centrale sur la liquidité du marché a diminué alors que les opérations interbancaires sur le change ont augmenté de 70% du volume. Il est ainsi passé de 204 MDH à 323 MDH/jour. Cela dit, désormais l'appréciation de l'économie marocaine ne se fera plus en se basant sur les réserves en change puisque ce sont les banques qui en disposeront et non pas la Banque centrale. Quid de la prochaine étape ? Après cette première étape qui est passée sans trop de turbulences, les opérateurs se posent tout de même la fameuse question : A quand la prochaine étape de l'élargissement de la bande ? Rappelons que pour une introduction en douceur, les pouvoirs publics ont décidé d'ouvrir les vannes graduellement et de procéder à une flexibilité du dirham par étapes. La réponse de Mounir Rizki est pourtant claire à ce sujet : « le séquencement des étapes de la flexibilité ne dépend pas d'un timing mais plutôt de prérequis. L'évolution d'une séquence à une autre se fera seulement lorsque les conditions fixées sont atteintes ». Une question légitime étant donné qu'avec une bande très faible, la perception de ladite flexibilité n'est toujours pas palpable par les opérateurs encore moins par le citoyen. D'autant plus, il est difficile de mesurer l'impact de cette réforme sans qu'il ait eu durant l'année 2018 des chocs exogènes conséquents. Cet impact insignifiant est en quelque sorte voulu puisque l'objectif de la première phase était de préparer les opérateurs à cette réforme a précisé le Directeur des opérations monétaires et de change à Bank Al-Maghrib. Le but aussi était d'introduire progressivement des mécanismes de marché via un processus de formation des prix du taux de change pour qu'il ne soit plus administré mais issu des cotations des banques. Pour se faire, il a fallu signer des conventions et mettre en place un cadre réglementaire pour les banques qui seront teneurs de marché. Il s'agit du premier mécanisme. « En d'autres termes, la valeur du dirham n'est plus administrée et déterminée par la Banque centrale mais plutôt par un cours de référence qui sera le résultat des différentes cotations des banques », a-t-il précisé Deuxième mécanisme mis en place par BAM est celui de servir la liquidité en devises. La Banque centrale est passée d'un système de robinet ouvert c'est-à-dire servir de la devise en fonction des besoins des banques à un mécanisme d'adjudication qui permet d'injecter de la liquidité selon un certain nombre de paramètres mais aussi de la largeur de la bande. « BAM interviendra à l'approche des deux limites (haute ou basse) soit par l'injection soit par le retrait de la liquidité via un mécanisme d'adjudication », informe le responsable de BAM. Le troisième mécanisme est la mise en place d'une plateforme informatique pour plus de transparence sur le cours de change.