* L'option VEFA implique clarté et transparence dans les rapports entre les parties concernées. * En France, 15% seulement des promoteurs financent leurs opérations avec des fonds propres, contre une moyenne de 50% au Maroc. Finances News Hebdo : Quels sont les avantages que représente la VEFA pour l'acquéreur ? Saïd Sekkat : L'originalité de la loi nouvelle tient aux avantages qu'elle confère tant au promoteur (vendeur) qu'à l'acquéreur. La vente en état futur d'achèvement vise à assurer la sécurité et la transparence dans les transactions immobilières sur des locaux en cours de construction. La clarté et la transparence dans les rapports entre les parties concernées dans le cadre de la VEFA permettent : - de garantir les avances versées par les acquéreurs pendant les travaux de construction; - de protéger l'acquéreur contre les manuvres dilatoires qui peuvent entacher les transactions immobilières. L'avantage de la VEFA est d'assurer la sécurité des accédants à la propriété en ce qui concerne les avances versées au vendeur au cours de la construction de l'immeuble en leur assurant le remboursement des sommes par eux versées, en cas d'inachèvement des travaux de construction. F. N. H. : Qu'en est-il pour le promoteur ? S. S. : Le recours à la VEFA présente l'avantage pour le vendeur (promoteur) de limiter les emprunts bancaires ou les fonds propres pour financer les travaux de construction. Le promoteur n'aura pas à mobiliser des sommes très importantes pour la réalisation de ses projets, puisqu'il bénéficiera du financement progressivement assuré par les futurs acquéreurs. Ceci permettra donc à la profession de réaliser plus de logements et de contribuer à la résorption du déficit actuel en logements. La VEFA contribue à réduire le coût de la construction en facilitant la mobilisation des prêts d'accession à la propriété au profit du vendeur, ce qui constitue pour ce secteur d'activité un levier permettant l'autofinancement des projets de la promotion immobilière. Il faut savoir qu'en France, cette loi a plus de 35 ans et n'a jamais été amendée. Les professionnels reconnaissent qu'elle a été perçue comme une véritable révolution dans le secteur où aujourd'hui 95% des ventes sont effectuées avec le principe de la VEFA. En France toujours, 15% seulement des promoteurs financent leurs opérations avec des fonds propres, contre une moyenne de 50% au Maroc. La VEFA présentera, donc, un avantage indéniable pour le vendeur dans la mesure où elle va lui permettre de bénéficier des avances versées par l'acquéreur tout en gardant la propriété des constructions. F. N. H. : En revanche, quels sont les risques de cette option? S. S. : Malgré les avantages accordés par la VEFA aussi bien à l'acquéreur qu'au vendeur, la loi sur la vente d'immeubles en l'état futur d'achèvement (VEFA) présente des insuffisances. La loi sur la VEFA comporte en effet certaines lacunes, voire certaines contradictions avec d'autres textes de loi, et suscite donc des réserves. A la lecture de l'article 618-1 de la loi n°44-00, il ressort que la vente dont il est question ne semble pas correspondre à une VEFA pour les raisons suivantes : dans la VEFA «classique», le transfert de la propriété et le paiement du prix ont lieu au fur et à mesure de l'édification de l'immeuble, Or, si le prix doit être payé au fur et à mesure de l'avancement des travaux comme le souligne l'article 618-6, le transfert de propriété et le droit de propriété n'ont lieu qu'avec l'inscription du contrat définitif de vente sur les livres fonciers, conformément aux dispositions de l'article 618/20. Nous sommes, donc, en présence d'une vente à terme sans l'avantage essentiel qu'elle devrait comporter d'une transmission à l'accédant de la propriété de l'immeuble de manière rétroactive. Cela pose le problème de la qualification de cette vente. La VEFA peut porter sur des immeubles immatriculés ou non immatriculés. Ce texte est en contradiction avec d'autres textes législatifs, notamment : - le Dahir du 12 août 1913 sur l'immatriculation des immeubles qui encourage l'immatriculation; - et surtout le Décret royal du 17 décembre 1968 relatif au crédit foncier, au crédit à la construction et au crédit à l'hôtellerie qui autorise les établissements de crédit à octroyer des prêts uniquement si l'immeuble est immatriculé ou en cours d'immatriculation. Le transfert de la propriété des fractions vendues au profit des acquéreurs n'est valable : - qu'à partir de la conclusion du contrat définitif de vente lorsque l'immeuble est non immatriculé ou en cours d'immatriculation; - et de l'inscription du contrat définitif sur les registres fonciers lorsque l'immeuble est non immatriculé (Article 618-20 de la loi sur la VEFA). Cette disposition constituera un handicap pour l'acquéreur nécessitant un crédit dans la mesure où les prêts ne sont consentis par les établissements de crédits que sur la base d'une hypothèque de premier rang inscrits sur les livres fonciers si l'immeuble est immatriculé, ou d'une promesse d'hypothèque si l'immeuble est en cours d'immatriculation (Article 9 du décret royal portant loi n°552-67 du 17 décembre 1968 relatif au crédit foncier, au crédit à la construction et au crédit à l'hôtellerie). Ces financements impliquent que l'acquéreur dispose déjà de la propriété du bien vendu. Or, dans le cadre de la VEFA, ledit acquéreur ne deviendra propriétaire du bien, objet de la vente, qu'après l'achèvement des travaux de construction et la conclusion du contrat définitif. Dans ces conditions, comment l'acquéreur peut-il alors prétendre à un crédit? L'un des inconvénients de la VEFA tient à la possibilité laissée aussi bien au vendeur qu'à l'acquéreur de ne pas conclure le contrat définitif. Or, la VEFA n'a d'intérêt que si les désistements sont interdits. Le vendeur doit s'engager sur un délai d'achèvement des travaux, faute de quoi il sera exposé au paiement d'indemnités de retard envers l'acquéreur. Cette obligation paraît contraignante et exorbitante car elle peut aboutir à pénaliser injustement le vendeur du fait de facteurs externes ou de décisions administratives non maîtrisables par lui. F. N. H. : Comment expliquez-vous que la VEFA reste peu développée au Maroc ? S. S. : La nouvelle loi sur la VEFA constitue, certes, une avancée importante vers la modernisation et l'harmonisation de notre droit immobilier national. Toutefois, le législateur marocain, en amputant son modèle de référence de toute la panoplie des garanties offertes par ailleurs, a singulièrement réduit l'efficacité de cette forme de vente quant à ses fonctions: - de sécurité financière d'une part, -et de réduction du coût de la construction, d'autre part.