Trente-quatre ans après Jean Paul II, le Pape François est attendu au Maroc les 30 et 31 mars prochains pour une visite historique. Plus que symbolique, ce déplacement est destiné à promouvoir le dialogue interreligieux, affermir les valeurs de paix et renforcer la relation entre le Maroc et le Vatican. Le Royaume du Maroc fait figure de phare en matière de coexistence entre les trois religions monothéistes. Ouvert au dialogue et aux échanges, ses souverains ont établi leurs premiers contacts avec l'Eglise Catholique du temps des Almoravides (1061-1147) durant lequel la présence de chrétiens est déjà notable. Ces premiers échanges prenaient le plus souvent la forme de lettres ou de missives ou encore de contacts établis de manière indirecte. Durant le XIXè siècle et pendant le protectorat, le pontificat commence à s'intéresser au royaume. Le premier contact direct sera entrepris en 1888 par le Sultan Moulay Hassan Ier. Il envoie une délégation au Saint-Siège pour présenter au Pape Léon XIII ses voeux, à l'occasion d'un événement religieux*. L'Eglise Catholique développe sa présence au Maroc, pays majoritairement musulman, avec une composante juive très ancienne et développée partout à travers le pays. Après l'indépendance, et bien qu'il n'y ait pas encore de relations diplomatiques, le Maroc entretient des liens avec les Souverains pontifes. L'audience qu'accorde en 1960 le Pape Jean XXIII à Abdellah Ibrahim, président du conseil du gouvernement sous le règne de feu Mohammed V, en est une illustration. Mais c'est à la lumière de la situation en Palestine que la relation entre l'Eglise Catholique et le Maroc prend une autre dimension. Nous sommes en 1969 et l'incendie de la mosquée Al-Aqsa au mois d'août bouleverse la région. Il est l'objet du premier échange de lettres entre feu Hassan II et le Pape Paul VI. Lorsque le comité Al Qods est créé dans le cadre de l'OCI en 1975, il est placé sous la présidence du Roi du Maroc. Il faudra attendre 1976 pour l'établissement des relations diplomatiques entre le Maroc et le Vatican, sur fond de crise libanaise notamment. En 1980, la relation entre les deux pays prend une dimension inédite avec la rencontre entre le pape Jean Paul II et feu le Roi Hassan II au Saint-Siège à Rome. Il est alors le premier chef d'Etat musulman à être reçu officiellement. Commandeur des Croyants et président du Comité Al Qods, son attachement à la paix et au dialogue font de lui un interlocuteur important dans le monde arobo-musulman, aussi bien sur les questions du Moyen-Orient, que sur celles qui s'attachent à préserver un dialogue entre les religions. Lorsqu'en 1985, le Pape Jean Paul II se déplace au Maroc pour une visite historique, c'est une vague d'espoir sans précédent qui fait l'objet d'une couverture médiatique planétaire rare, dans un monde tourmenté par des conflits interreligieux dont l'intensité n'a cessé d'augmenter ces dernières décennies. En descendant de son avion et après avoir embrassé la terre marocaine qui l'accueille, le pape Jean Paul II est salué par SM Hassan II, puis par le Prince héritier Sidi Mohammed. Il ne quittera jamais le Roi son père, pendant chacune des étapes de la visite du Souverain pontife.
Aussi, lorsqu'il devient Roi et entreprend en avril 2000 sa première visite au Vatican, SM Mohammed VI et le pape Jean Paul II ont pris le temps de développer un respect mutuel. * Vidéo: le 13 avril 2000, SM Mohammed VI était reçu par le Pape Jean Paul II Le souverain marocain porte une même considération et développe un même esprit de concertation avec les successeurs de Jean Paul II. Par exemple, on se souvient qu'en 2013, Il avait adressé au chef de l'Eglise Catholique ainsi qu'au secrétaire général de l'ONU une lettre, en sa qualité du président du Comité Al Qods, au lendemain d'une visite du premier ministre israélien au Vatican. Le Commandeur des Croyants y avait exprimé ses préoccupations quant à la conclusion d'un accord entre l'état hébreu et le Vatican sur ses biens à Jérusalem. Nul doute que la préservation et l'avenir de la ville Sainte seront abordés pendant la visite du pape François auMaroc, un des nombreux dossiers sur lesquels le Vatican et Rabat ont des préoccupations en commun. En effet, au-delà de la situation du peuple palestinien, le dialogue interreligieux, les questions migratoires et la paix dans le monde devraient être abordés.
(*) Papiers de référence : 1. Archives du Maroc. 2. Interview de Abdelouhab Maalmi, premier ambassadeur du Maroc auprès du Saint-Siège, de "Zamane.ma" 2013.