Les dés sont jetés. Du 15 au 17 mars 2024, l'élection présidentielle russe invitera 114 millions d'électeurs à se rendre aux urnes pour le premier tour de ce scrutin avec un second tour éventuel le 7 avril et qui probablement ne devrait pas avoir lieu tant les résultats semblent déjà établis. Vladimir Poutine semble destiné à entamer un cinquième mandat, faute de concurrents significatifs. Les votes débutent le 14 mars à l'est et se terminent le 17 mars à l'ouest de la Russie. Des électeurs dans des régions éloignées de Russie, ainsi que sur des navires et dans des bases militaires, ont profité du vote anticipé. Ce dispositif, utilisé avant le jour officiel du scrutin, a mobilisé plus de 2,3 millions de personnes dans diverses régions. De plus, pour la première fois, un vote électronique via un service en ligne gouvernemental a été mis en place, rendant le processus plus accessible dans certaines régions. Cela dit, malgré l'existence formelle d'autres candidats, ceux-ci sont largement perçus comme alignés sur la politique actuelle. La guerre en Ukraine demeure en toile de fond de ces élections, avec une opinion publique russe difficile à évaluer mais qui paraît, en large mesure, ne pas contester le leadership de Poutine. Toujours est-il qu'une grande partie de l'opinion russe, difficile à mesurer, soutient ou ne s'oppose pas au régime. Le soutien populaire n'existe que dans des franges limitées de la société et on peut dire la même chose de l'opposition en Russie. Bien que le scrutin coïncide avec le conflit en Ukraine, une grande partie de la population russe semble toujours soutenir Vladimir Poutine ou du moins ne pas manifester d'opposition visible. Cela suggère que, malgré un climat de contestation restreint, la réélection de Poutine semble presque garantie dans le climat politique actuel en Russie. Dirigeant la Russie depuis près d'un quart de siècle, Vladimir Poutine orchestre ces élections présidentielles comme si elles étaient les pièces d'un échiquier savamment positionnées pour un coup de maître. Ce week-end électoral est conçu pour asseoir sa puissance face aux pays occidentaux, dans un geste théâtral de politique de puissance. Autrement dit, plus qu'un exercice démocratique servant à désigner ou légitimer les gouvernants, les élections sont plus que jamais un simple rituel symbolique, un moment de célébration collective. Et pour Vladimir Poutine (71 ans), au pouvoir depuis 2000, qui brigue un nouveau mandat censé le conduire jusqu'en 2030, une démonstration de force à l'égard de l'Occident. L'avantage de l'image utilisée est qu'elle s'applique aussi bien aux candidats qu'aux électeurs : tous sont sommés de marcher d'un même pas. Cette présidentielle est la première depuis la réforme constitutionnelle de 2020, suite à un référendum qui a ouvert la voie à Vladimir Poutine pour briguer un nouveau mandat, son cinquième et troisième d'affilée. La Commission électorale centrale russe a validé quatre candidatures, Leonid Slutsky, Nikolaï Kharitonov, Vladislav Davankov et Vladimir Poutine pour l'élection présidentielle. Les candidats opposés au Chef du Kremlin, considérés comme des figures d'opposition, n'ont pas dû récolter de signatures pour leur candidature, signifiant qu'ils ne constituent pas une véritable menace pour Poutine. Leur présence ne sert qu'à donner une apparence de diversité politique, malgré un soutien commun pour la guerre en Ukraine. Dans le contexte préélectoral russe, et occultant Alexeï Navalny, mort en prison après une longue descente aux enfers, deux candidats d'opposition marquants ont été éliminés de la course. Boris Nadejdine, libéral et pacifiste, a été disqualifié quand la commission électorale a annulé un grand nombre de ses signatures de soutien, le laissant sous le seuil requis. Ekaterina Dountsova, journaliste et ex conseillère municipale, a également été rejetée, sa candidature ayant été entravée par des erreurs administratives, malgré sa prise de position contre le conflit ukrainien.