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La Jeunesse rurale face aux incertitudes : Le Maroc… d'ailleurs ?
Publié dans La Gazette du Maroc le 21 - 11 - 2008

Combien sont-ils ? Comment vivent-ils ? Quelles sont leurs frustrations ? A quoi rêvent-ils ? Voici quatre questionnements essentiels auxquels les éclairages apportés par le reportage réalisé par LGM permettront de lever le voile sur bien des aspects demeurés inconnus au sein d'une jeunesse rurale dont le potentiel humain ne doit pas être négligé.
Ce dossier sur la jeunesse rurale au Maroc a été réalisé à la lumière d'une enquête directe, spontanée, volontairement puisée aux sources et aux racines de la vie de tous les jours dans le monde rural, selon un échantillon aléatoire ouvrant la possibilité à nos jeunes du Maroc profond de s'exprimer sur leurs frustrations et leurs attentes.
Intentionnellement, nous nous sommes abstenus de recourir aux rouages institutionnels pour photographier, à l'instant réel de la vie «normale» de tous les jours, les réalités sociales telles qu'elles nous sont apparues.
Cette démarche est délibérée pour rompre avec la monotonie officielle énumérant sans cesse des stratégies à long terme et casser la monotonie des approches élitistes contrastant avec les perceptions terre-à-terre de nos jeunes des campagnes, villages, douars et montagnes, auxquels se pose concrètement un double défi de tous les moments : lutter pour la survie de leur famille en fracture sociale et combattre l'enclavement sous tous ses aspects.
Incontestablement, ces jeunes ruraux souffrent, se lamentent, endurent, se sentent méprisés. Leur réaction est tranchée : ils ont coupé le cordon ombilical de tous liens patriotiques ou affectifs avec leur pays, du moins en rêve pour ne plus songer qu'à partir vers de nouveaux horizons.
Ont-ils tort de ne se soucier que de s'expatrier avec comme leitmotiv exclusif «gagner du fric»? Vu le désencadrement total qu'ils subissent de la part des services publics, des partis politiques et de la société civile de «proximité», il y a lieu de s'interroger sur les indifférences coupables et les négligences répréhensibles qui concourent à laisser végéter la jeunesse rurale marocaine dans l'anonymat le plus accablant.
Ils sont 11 millions à vivre au Maroc, dont près de 5.000.000 dans les campagnes, mais un grand nombre a l'esprit ailleurs, outre-mer. Avant même de tenter l'aventure du « Hrig», ils ont déjà coupé les ponts avec le terroir. Ils sont légion à patienter dans l'ombre en réfrénant leurs ardeurs et en réprimant leurs désirs en attendant leur heure de voguer sous d'autres cieux. La rupture est consommée et nous sommes tous interpellés pour réagir en signe de solidarité pour l'intérêt de notre collectivité marginalisée.
Jeunesse perdue, délaissée, oubliée, sans repères ni valeurs autres que le poncif de l'argent, de l'exode rural vers les grandes villes ou de l'émigration clandestine, jeunesse frustrée, meurtrie, exploitée, marginalisée... Telles sont les réalités crues et amères auxquelles se heurte tous les jours une composante dominante de nos populations à l'ère paradoxale des grandes réformes et des chantiers structurants dont ils ne disent pas un mot. Les politiques démagogiques et les discours populistes, ils n'en ont plus rien à faire. Ils refusent catégoriquement le paternalisme des adultes moralisateurs, fondé sur la patience et l'abnégation. Ils sont étonnés de constater qu'il leur est impossible de bénéficier des mêmes avantages que leurs collègues citoyens des grands centres urbains. Pourquoi cette ségrégation injuste entre une même catégorie de population au sein du même pays dont les différences sont dictées par une géographie que les adultes s'entêtent à maintenir en l'état ? Est-il normal que pour eux, le vide culturel, sportif, professionnel soit quasi-total pour condamner les talents naturels empêchés de pouvoir s'exprimer et ce, au seul tort de ne pas résider dans les grandes agglomérations? Ces frontières «imperméables» qui sont injustement implantées entre la ville et la campagne et qui continuent à sévir.
Comment ces jeunes des campagnes peuvent-ils espérer faire entendre leur voix au Maroc où elle est «muselée» par la force des choses, tandis que se déroulent des congrès mondiaux de la jeunesse dont ils sont totalement exclus, sans autre forme de procès?
Nous sommes tous interpellés face à une situation qui condamne la moitié de nos jeunes Marocains au désespoir.
La responsabilité est collective et partagée entre gouvernement, pouvoirs publics, parlement, collectivités locales, partis politiques, syndicats, société civile, acteurs socioéconomiques et autres.
Nous sommes tous interpellés en urgence et sur tous les fronts: éducation, jeunesse et sports, formation professionnelle, emploi, culture, agriculture, développement rural... Nous sommes tous moralement concernés par le sort d'une jeunesse minée par l'oisiveté et le désoeuvrement total, qui est déchirée entre la contrainte de rester auprès de leurs familles à secourir, s'aventurer dans l'exode vers les villes ou de tenter, à la vie à la mort, l'embarquement en direction de l'eldorado européen.
Une certitude : ils sont des centaines de milliers dans les douars et les villages à ne pas comprendre que l'Etat serine depuis des décennies des stratégies sans cesse renouvelées de promotion du monde rural au moment où nos campagnes se vident de la fleur de l'âge et de la force de travail, dont ils sont chassés par la mal-vie, le dénuement et les horizons constamment fermés.
Une problématique coriace
Au Maroc, la jeunesse rurale représente un potentiel humain considérable, dont la valorisation constitue un défi crucial pour le développement durable du Royaume. A condition que cette catégorie de population soit impliquée dans la dynamique du renouveau que connaît un pays en transition ouvert à toutes les réformes. Mais force est de constater que leurs potentialités restent sous-exploitées et mal connues. Pour un grand nombre d'entre eux, les opportunités sont restreintes et se retrouvent fort désavantagés sur le marché de l'emploi. En outre, la jeunesse rurale est confrontée à de nombreux problèmes socio-éducatifs, économiques et culturels. Sa majorité se trouve dans une situation précaire. Elle est souvent marginalisée et son intégration dans le développement demeure un énorme défi à relever. Dans le Maroc profond, enclavé, ils sont confrontés au désoeuvrement, aux frustrations, au désespoir suscité par des horizons pessimistes. Un grand nombre d'entre eux ne vacillent plus que dans le dilemme d'opter entre l'exode casablancais ou l'eldorado italien. Si le rapport du cinquantenaire sur le développement humain s'est appliqué à dégager des scénarios favorables profilant un « Maroc possible », les dures réalités nous font découvrir le revers de la médaille à telle enseigne, que l'on redoute le «Maroc impossible» qui semble peser de plus en plus lourdement dans les perceptions des jeunes ruraux. Déjà, dans nos universités et écoles, le pessimisme gagne du terrain sur les chances d'une improbable insertion réussie dans la vie active, quand ce ne sont pas les sirènes du paradis d'outre-mer qui bourdonnent à leurs oreilles. Et si dans les villes, les jeunes sont de plus en plus tiraillés entre le chômage des uns, la contrebande pour d'autres et la délinquance pour le reste, que pourrait-il en être dans les campagnes marocaines ? D'emblée, l'observateur est choqué par la grande frustration ressentie par des milliers de ruraux peinant à voir concrètement l'impact sur l'amélioration de leur condition d'existence de l'INDH, du Plan Maroc Vert, Moukawalati, Taahil, Idmaj, microcrédit, des politiques publiques centrales ou régionales, des programmes de proximité des structures représentatives… bref, en un mot, des stratégies sans cesse renouvelées, mais parfaitement ignorées par les adolescents, qui ne cessent de réitérer le poncif de la promotion et du développement global et intégré du monde rural.
Il est vrai que le monde rural pèse entre 14 et 15 millions d'habitants auxquels s'ajoutent facilement quelques autres millions de « péri-urbains » se déplaçant constamment entre la campagne et la périphérie des villes. En termes de richesses, il représente, par l'agriculture bon an mal an, le premier poste du PIB à hauteur de 15-20% et est le premier secteur employeur de l'économie nationale et des jeunes.
Mais le monde rural, c'est aussi le chômage structurel, la précarité de l'emploi, l'exploitation intensive de la jeune force de travail, le désert culturel, le sous-équipement socio-collectif et sportif, la vulnérabilité sociale et l'oisiveté pathologique. Multipliant les mouvements migratoires internes et étrangers.
Le comble, c'est que la jeunesse rurale n'a jamais fait l'objet de recherches approfondies, y compris dans les départements institutionnels en charge directe ou indirecte de ce créneau, et le bilan est bien trop maigre en énumérant sur les doigts d'une seule main et depuis les années 60, à ce jour, les productions recueillies. En éliminant les enquêtes urbaines sur les lycéens et étudiants, il ne reste plus que l'enquête de feu Paul Pascon en 1969, « Ce que pensent 296 jeunes ruraux dans le Haouz » pour faire connaissance avec certaines conclusions sur les attentes et comportements des jeunes ruraux. Et c'est d'ailleurs à l'occasion d'un colloque de sociologues et d'économistes réunis en décembre 2007 à rabat, rendant hommage au chercheur et professeur fondateur de l'IAV Hassan II, que fut crûment posée la problématique : « Que fait l'Etat pour le monde rural ? ». Ils se sont accordés à situer l'IDH (Indice de développement humain) dans les campagnes marocaines positionnant le Maroc parmi les pays les moins avancés au monde. Avant de proclamer leur diagnostic: « Rêver d'une société rurale développée et intégrée à l'économie de marché, relève presque de l'utopie. Le constat d'échec des politiques publiques depuis l'indépendance du Maroc renforce ce pessimisme ».
La sale vie!
Il faut se résoudre à l'évidence : dans la conscience collective dominante, la jeunesse rurale marocaine rime avec Harragas, kamikazes, diplômés chômeurs, trafics de drogue, prostitution, contrebande, travail au noir, esclavage domestique… Autant dire que l'image n'est pas reluisante du tout, car si Jean Ferrat chantait Aragon « La femme est l'avenir de l'homme », chez nous, la jeunesse se croit condamnée à traîner les boulets d'une nation sans aucune visibilité de leur devenir.
Cadeaux, anniversaires, booms, surprise-party, jet-sky, playstation, colonies de vacances, cybercafés... Autant de loisirs banalisés dans les villes qu'ils n'ont encore jamais connues. Jouets, ils n'en ont jamais eus quand ils étaient enfants et ne savent toujours pas ce que c'est.
Aventures, relations amoureuses, les sortis du samedi soir, le cinoche... Autant d'autres illusions qu'ils s'efforcent de chasser de leur esprit pour ne pas « flipper ». Megarama, Mega Mull, Marjane, cabarets, dancings, restaurants, voitures, villas, appartements, frusques... A leurs yeux, seuls les Martiens en ont, car il faut être né dans une autre planète pour en jouir. C'est en vain que vous tenterez de leur soutirer un mot pour tout ignorer de ces choses de la vie. Ils en veulent à tout le monde de vivre en marge du monde moderne.
Qu'ils soient des bleds enclavés de Médiouna, de Fkih Bensalah, d'Oued Zem, de Bejaâd, de Khouribga, d'Ouled Zmam, de Souk Sabt, de Jemaâ Foucault, d'Errachidia, de Nador, et de partout ailleurs, qu'ils soient âgés entre 16 et 25 ans, ils gardent une rancune tenace à l'adresse de tous ceux qu'ils tiennent responsables de leur sort peu enviable. C'est-à-dire de leur chômage, leur abandon scolaire touchant toutes les familles, leur exploitation dans des emplois précaires et travaux pénibles des champs, de la garde des troupeaux, pour aller puiser de l'eau à la source... Quant au CNJA «auto-sabordé», ils n'ont pas la moindre idée de ce à quoi cela peut ressembler. Et encore moins des organisations de masse de jeunesse des partis politiques. La jeunesse rurale demeure prisonnière d'un cumul de frustrations qui épuisent ses rêves d'un monde meilleur dans la... sale vie qu'elle trinque au présent !
Le gouvernement ?
Un … «OGNI»
Quant vous interrogez les jeunes dans nos campagnes sur l'actualité nationale, leur réponse est immédiate: «nous ne savons pas ce qui se passe dans le pays». Et connaissez-vous les ministres du gouvernement ? «Pas du tout», rétorquent-ils !
C'est dire que pour la majorité de nos jeunes ruraux, le gouvernement ne signifie pas autre chose qu'un... «OGNI», c'est-à-dire un objet gouvernant non identifié. La Fondation Mohammed V pour la solidarité vous dit quelque chose? Même réponse. La Parlement, c'est quoi ce truc-là ? Les partis politiques vous rendent visite ? Jamais de la vie. Et les syndicats ? Pas une seule fois.
Les ONG vous aident-elles ? On n'en voit jamais. Mais alors, qui s'occupe de vous ? Un...OGNI!
L'analphabétisme fait des ravages et ne fait pas bon ménage avec la politique.
Selon les résultats extraits du dernier recensement de 2004, le Maroc enregistre un taux d'analphabétisme très élevé, qui touche 43% de la population âgée de plus de 10 ans, soit plus de 9 millions de personnes. Ce taux est estimé à 29,5% pour la tranche d'âge 15-24 ans (19,2% pour le sexe masculin contre 39,5% pour le sexe féminin). Le monde rural enregistre toujours un taux plus élevé par rapport au monde urbain, pour la même tranche d'âge, il est respectivement de 13,5% et de 48%.
Les jeunes de la campagne souffrent de l'absence des maisons de jeunes, le manque d'encadrement, l'absence d'activités sportives et culturelles... Au niveau politique, la situation des jeunes est pareille dans la majorité écrasante des cas en se désintéressant de la chose publique par simple indifférence, par méfiance ou même parfois par cynisme.
Ce désintérêt se manifeste concrètement par l'abandon du droit de vote, pourtant abaissé à l'âge de 18 ans. Ce qui affaiblit encore plus leur « pouvoir » dans les choix démocratiques. Au niveau politique, les jeunes ruraux du Maroc constituent une masse critique tout indiquée pour contribuer en masse à instaurer un exercice de démocratie participative au sein des collectivités locales rurales dépourvues de jeunes talents. Cependant, la majorité de ces jeunes est souvent instrumentalisée par des politiciens sans scrupules pour servir de tremplin ou de force motrice à l'occasion des campagnes électorales.
Les résultats du dernier scrutin des législatives en septembre 2007, ont démontré clairement une crise de la chose politique dans le pays.
Ceci dit qu'une relecture du rôle de la jeunesse rurale dans une société en transition se pose avec acuité et à tous les niveaux.
D'autres pratiques délinquantes continuent de ravager la jeunesse rurale, notamment la consommation de drogue. Devant cette panoplie de problèmes destructeurs de la jeunesse, l'exode et l'immigration deviennent une fatalité pour ces jeunes afin d'échapper à ces problèmes.
Survivre à Tadla-Azilal
Le plus vieux métier du monde!
Si les jeunes hommes chôment sans demander leur reste, les jeunes filles se voient souvent contraintes à se prostituer pour faire vivre leurs familles dans le besoin. «Le plus vieux métier du monde se pratique au vu et au su de tout le monde dans le coin», témoignent des habitants désabusés par ces réalités incontournables. Non sans illustrer leurs propos avec l'exemple de Oued Zem qui en fait, semble-t-il, sa triste renommée. F.L., au printemps de son âge, divorcée après moins de deux années de mariage, souffre le calvaire tous les jours en s'astreignant à la navette entre Béni-Mellal et Kasbah Tadla. Elle est contrainte de vendre son corps à des adultes sans scrupules qui la «réquisitionnent» à domicile, pour en récolter quelques sous. Des fois, elle n'en voit même pas la couleur: «souvent, je suis chassée, menacée et jetée à la rue en rase campagne sans un rond», se souvient-elle, les sanglots étranglant sa voix. Embarquée sur la route en faisant de l'auto-stop, face à de nouveaux «clients» avides, elle espère les attendrir en leur racontant son calvaire de la veille: «je suis prête à faire n'importe quoi pour trouver le moyen d'aider ma pauvre famille qui m'attend», désespère-t-elle encore une fois chemin faisant.
A la saison des pluies
Les écoles ferment
Si la nouvelle peut faire plaisir aux enfants ravis de l'aubaine de «bouder» leurs classes, l'Education nationale (et donc rurale) ne devrait pas s'en réjouir pour autant en apprenant que des écoles ferment leurs portes à la saison des pluies. L'établissement de Sidi Ghanem à proximité de Mers Assukar, sur la route de Médiouna en offre un regrettable exemple à la périphérie, pourtant, de la plus grande ville du pays. Une fermeture qui peut durer le temps que durera le mauvais temps. «Ce sont les instituteurs qui nous ont ordonné de rester chez nous quand il pleut», témoignent ces écoliers déchirés entre aller à l'école ou se rendre à la corvée des champs. Perdre le bénéfice des cours du programme de l'année à cause des intempéries, voilà la réalité qui devrait préoccuper davantage nos académies régionales semblant peu se soucier de la mise en quarantaine des campagnes essuyant la colère de dame météo.
Souk Essabt. La «rurbanisation»
dans tous ses états!
Le visiteur pénétrant dans cette ville flanquée dans le Maroc profond, s'arrachera les cheveux en constatant d'emblée une immense bourgade vivant hors de l'espace et du temps. Où tout le monde se bouscule à la guise des humeurs instinctives, en pleines processions par vagues humaines ininterrompues, à pied ou motorisées, s'empressant de se rendre vers le Souk du samedi que chaque semaine fait. Une incroyable anarchie généralisée y règne à longueur de journée et le credo des lieux semble dominer sous le slogan du «Chacun pour soi». Tout le monde commerce en contrebande, femmes, hommes, vieillards, enfants dans un brouhaha incessant et indescriptible. Une ville-souk ou un souk en pleine ville, imaginez de quoi cela peut avoir l'air. Chevaux de trait, mulets ânes, bétail se disputent la concurrence avec les engins mécanisés en pleines artères de la cité. Les tracteurs aussi, figurez-vous. Les transports publics pour rallier tout ce beau monde au souk, sont assurés par les «carrossas» à bord desquelles, dans des conditions précaires, s'entassent en vrac grands et petits, femmes, adultes, enfants et bébés.
De Fquih Ben Salah à...Talian
Voir Venise ou… mourir !
Il est de notoriété publique que la région de Khouribga prospère à travers le trafic du commerce de voitures importées d'Italie. Le marchandage bat son plein dans les places squattées à cet effet. La capitale phosphatière s'est même rendue célèbre en se résignant à vivre au rythme «transalpin» avec la nuée de pizzaïolos qui y poussent comme des champignons. C'est devenu la hantise des jeunes candidats à l'émigration qui vont bosser au pays de Venise pour aider leurs familles au Maroc, faire du commerce florissant de voitures et ouvrir des restaurants ou pizzerias. A quelques encablures de là, Fkih Ben Salah ne déroge pas à la règle, les jeunes d'ici ne rêvant que de «brûler» de l'autre côté du bassin. «Le chômage des diplômés fait des ravages dans la ville et les jeunes des douars environnants broient du noir, confrontés à l'impasse», persiste et signe un jeune salarié d'une compagnie agroindustrielle faisant la navette quotidienne entre Béni-Mellal et Fkih Ben Salah. C'est le rêve italien qui trotte dans la tête de la fleur de l'âge de nos campagnes, villages et douars. Plus rien ne compte à leurs yeux. Plus rien ne les retient ici. De Fkih Ben Salah à...Talian, ils restent à l'affût de la moindre occase propice à la grande traversée. Leur choix est irrévocable : voir Venise ou…mourir !


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