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Les USA : une puissance néo-coloniale
Publié dans La Gazette du Maroc le 31 - 03 - 2003

Interview d'Alexis Standish, expert en géostratégie et rédacteur en chef de la revue Jane's intelligence Digest
Alexis Standish est le rédacteur en chef de Jane's Intelligence Digest, une revue spécialisée dans la collecte de l'information et du renseignement. Possédant une grande expérience dans les questions de géopolitique, de sécurité et de terrorisme, Alex Standish a travaillé auparavant comme journaliste pendant des années à la BBC. Il a à, ce titre, couvert de nombreux conflits allant des Balkans (Albanie, Kosovo, Macédoine, Serbie) au Moyen-Orient en passant par la Russie et l'Europe centrale.Dans l'entretien qu'il nous a accordé, Alexis Standish décortique les jeux et les enjeux de la guerre déclenchée par Bush et ses éventuelles répercussions sur la région et bien au-delà.
La Gazette du Maroc : quelle est votre lecture de cette deuxième guerre du Golfe par rapport à celle de 1991 ?
Alexis Standish : les deux guerres sont totalement différentes dans la mesure où les objectifs sont très différents. En 1991, l'objectif était de chasser l'Irak du Koweït alors que la guerre de 2003 est destinée à changer le régime en place à Baghdad et à installer un gouvernement alternatif. Je pense donc que les objectifs sont entièrement différents et cela se vérifie d'ailleurs dans la coalition conduite par les Etats-Unis. En 1991, l'Amérique avait reçu un soutien international avec l'aval de l'ONU alors que cette fois-ci, il n'y a rien de cela.
Bush défie donc l'ONU, la communauté internationale et la légalité ?
Je pense que la question de la légalité fait l'objet déjà d'un débat parce que clairement l'ONU n'a pas formellement approuvé ni endossé l'action militaire. Ce qui est en soi révélateur du point de vue de la position de la majorité des membres du Conseil de sécurité.
Néanmoins, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont pris bien sûr une position alternative avec la résolution 1441 qui leur a permis d'appliquer de graves mesures et d'entreprendre des actions contre Saddam Hussein et son régime. Je pense que la question de la légalité doit être débattue réellement par les avocats et les experts en droit international.
Mais, je pense que certainement en termes de situation géographique, cette guerre a créé une division très significative au sein des Nations Unies, à l'intérieur de l'Union Européenne, de l'OTAN. Je pense que cette division va durer potentiellement et de loin beaucoup plus longtemps et de manière beaucoup plus significative que cette campagne.
Quel est notre commentaire quant à la stratégie adoptée par les parties en conflit ?
Je pense qu'en ce qui concerne la stratégie, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne essayent d'éviter d'être entraînés dans une confrontation urbaine, ils préfèrent plutôt assiéger Baghdad dans l'espoir d'un soulèvement à l'intérieur du pays et chasser Saddam Hussein. Mais jusqu'à présent, cela n'est pas évident et encore moins en ce qui concerne un soutien local de l'invasion conduite par les Etats-Unis. On a entendu des informations faisant état d'un tel soulèvement. Ce sont des informations qui ne sont pas confirmées de sources indépendantes. Par voie de conséquence, nous devons être très prudents quant à la propagande qui nous vient de toutes les parties en conflit. Je pense qu'en ce qui concerne les Irakiens, ils sont en train de livrer une guérilla urbaine. Ils appliquent la tactique de la guérilla en s'attaquant aux convois de ravitaillement qui sont apparemment moins bien défendus que les troupes de combat. Les Irakiens ont remporté quelques succès en faisant prisonniers des militaires anglais et américains. Ils ont également abattu des avions. Je pense que leur tactique a ralenti l'avancée des troupes que les Etats-Unis espéraient réaliser. Mais allons assister à davantage d'attaques de ce genre. Le régime irakien a, à sa disposition, un certain nombre de groupes dont certains sont spécialement entraînés pour ce genre de guerre. Donc je pense que cette guerre ne sera pas aussi propre comme l'ont annoncée et espérée les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.
Les militaires américains et britanniques affirment que le pire est à venir. Quelle est votre analyse ?
Je pense qu'en termes de pire , il y aura des combats de rue à Baghdad qui exposeront les forces américaines et leurs alliés à d'éventuelles lourdes pertes et, bien sûr, parmi la population civile de même que du côté de l'armée irakienne. Je pense que livrer une guerre urbaine est le pire scenario. On aura affaire à une bataille extrêmement difficile. Prenez l'exemple des Russes lorsqu'ils avaient encerclé la capitale Tchétchène Grozny. Le combat urbain était très coûteux pour les deux parties en conflit, et extrêmement dangereux parce que les combattants qui défendent la ville la connaissent très bien. Ils peuvent tendre des embuscades, placer des tireurs isolés.
La guerre en Irak ne sera pas “ propre ” et va durer plus longtemps que ce qui a été initialement prévu à savoir quelques jours ou quelques semaines. Il faudra s'attendre à ce que cette guerre dure plusieurs mois.
Comment jugez-vous le rôle des médias dans cette guerre ?
Je pense que l'une des difficultés avec les médias, c'est qu'en partie les Irakiens ont eu l'intelligence d'inviter la presse occidentale à couvrir cette guerre. C'est quelque chose que les Serbes avaient appris afin de montrer au monde les hôpitaux, les victimes civiles et les dégâts causés aux populations civiles et de gagner la sympathie de l'opinion publique internationale. C'est l'un des aspects de cette guerre. De l'autre côté, les forces coalisées ont des journalistes avec eux et qui couvrent l'autre face de la guerre. Les deux parties belligérantes limitent bien sûr la liberté de mouvement des journalistes. Le journalisme est une arme à double tranchant : par conséquent le journaliste doit faire très attention dans ses reportages dans la mesure où il est très facile d'avoir de la sympathie pour un protagoniste. Il est difficile de rester objectif. Toutefois, il existe une véritable guerre de propagande. On l'a vu avec la fausse information faisant état de la défection du vice-premier ministre Tarik Aziz qui s'était réfugié au Kurdistan et qu'il était interrogé par la CIA. Du côté irakien, on a évoqué l'implication d'Israéliens dans le conflit.
Alors la première victime est la vérité, comme on dit ?
Absolument
BQuelle est votre perception du jeu de la Turquie dans cette guerre et en particulier au sujet du Kurdistan ?
Je pense que la situation avec la Turquie est extrêmement sensible. Nous savons qu'il existe un certain nombre de troupes turques qui opèrent dans les régions kurdes au nord de l'Irak depuis déjà des années. Ce n'est pas nouveau. Toutefois, un grand nombre de soldats turcs attendent à la frontière. Il semble qu'il y ait une certaine détermination de la part d'Ankara de jouer un rôle dans ce conflit. Les responsables turcs n'ont pas cessé de mettre en garde, depuis des mois, contre une éventuelle forme d'indépendance accordée aux Kurdes irakiens. Ce qui représentera un prétexte pour une invasion turque. Je pense que l'une des difficultés réside dans le fait que les forces coalisées, les Américains en tête, avaient armé certains groupes kurdes et l'un des objectifs des Turcs est de les désarmer.
Je pense qu'il existe un conflit potentiel au Kurdistan irakien. Toutefois, les Turcs se trouvent dans une position très délicate parce que la première guerre du Golfe de 1991 a engendré de graves conséquences économique, avec l'afflux de réfugiés. Cette fois-ci, ils ne veulent pas revivre la même situation avec des centaines de milliers de réfugiés. Ils sont également préoccupés par les conséquences de cette guerre sur la population kurde. Après des années de conflit avec le parti séparatiste kurde turc, le PKK, aujourd'hui ils redoutent le risque d'un nouvel éclatement du conflit. Je pense que le gouvernement turc est déjà assez préoccupé par la crise économique. Les militaires sont de proches alliés de l'OTAN et des Etats-Unis qui ont exigé l'ouverture de l'espace aérien turc aux forces américaines, mais l'attitude du parlement turc a compliqué la situation aux Américains pour ouvrir le front nord. Attitude qui aggravera certainement les relations américano-turques.
Pensez-vous réellement que Saddam Hussein dispose d'armes de destruction massive et qu'il représente une menace pour les Etats-Unis ?
Au sujet des armes de destruction massive, il y a certainement quelques questions légitimes à poser concernant des agents chimiques. Je pense que l'Agence internationale de l'énergie atomique est convaincue de l'absence du renouvellement du programme nucléaire irakien. Il n'y a aucune preuve. Nous avons affaire à une question d'armes biologiques. Nous savons que Saddam avait utilisé des armes chimiques contre les Iraniens lors de la guerre qui a opposé les deux pays dans les années quatre-vingts. Il les a également utilisées contre les séparatistes kurdes au cours de leur soulèvement au nord de l'Irak.
Jusqu'à présent, il n'y a aucune preuve attestant que Saddam Hussein dispose d'armes de destruction massive. Au cas où il les détient, il les utilisera probablement au cours de cette guerre. Mais de mon point de vue, il ne le fera pas pour ne pas s'aliéner l'opinion publique internationale.
Pour le moment, Saddam estime que la guerre se déroule “ bien ” pour lui surtout que le monde voit dans l'Irak une victime et par conséquent, il ne tient pas à perdre cet avantage moral.Vous m'avez demandé si le régime irakien constitue une menace pour les Etats-Unis, ma réponse est non. Il n'y a aucune preuve, par contre la Corée du Nord dispose de missiles de longue portée.
Cette menace fait partie de la propagande de cette guerre. C'est une justification américaine pour cette campagne. Néanmoins, il existe un risque pour les alliés des Etats-Unis dans la région et particulièrement Israël qui a reçu des missiles Scud…. en 1991.
Israël dispose bel et bien d'armes nucléaires et de destruction massive. Pourtant il a toujours refusé de signer les conventions de l'ONU et constitue une véritable menace pour les pays de la région. Quel est votre commentaire ?
Je pense qu'il existe une critique légitime faite à l'encontre d'Israël et des Etats-Unis. Israël possède un programme nucléaire non reconnu mais grâce aux révélations du technicien israélien Mordechai Vanunu, on sait qu'Israël dispose non seulement d'armes de destruction massive, mais que les recherches dans ce domaine se poursuivent. Et comme vous l'avez dit, Israël ne s'est pas conformé aux résolutions de l'ONU. Il existe de réelles préoccupations avec par exemple le recours des Etats-Unis au veto au Conseil de sécurité pour protéger Israël, ou l'aide de plus de 10 milliards de dollars que Washington vient d'octroyer à Tel-Aviv notamment aide militaire. Nous pouvons comprendre pourquoi les Etats-Unis sont un intermédiaire honnête parce que d'un côté ils se sont engagés pour réaliser une paix négociée et un règlement du conflit israélo-palestinien. De l'autre côté, on voit Israël faire ce qu'il veut parce qu'il bénéficie du parapluie américain. Nous pensons qu'il existe des questions très légitimes au-delà du rôle d'Israël dans la déstabilisation de l'ensemble du Moyen-Orient.
Au-delà de la question du pétrole, qu'est-ce qui pousse Bush à envahir l'Irak ?
C'est une question difficile. Je ne suis pas dans les secrets du président américain mais si l'on revient en arrière, il y a deux ans, nous avons averti dans notre publication Jane's que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne frapperaient l'Irak tôt ou tard parce qu'ils étaient préoccupés par le fait que Saddam Hussein tentait d'améliorer ses relations avec les pays voisins. Il a également réussi à diviser le Conseil de sécurité en ayant à ses côtés notamment les Russes. Ces derniers sont bien sûr très intéressés par l'industrie pétrolière. Washington et Londres sont inquiets du fait que Saddam a la possibilité de contourner les sanctions de l'ONU et de reconstruire son profil dans la région comme étant un dirigeant nationaliste arabe.
Ses commentaires au lendemain des événements du 11 septembre à savoir que l'Amérique a eu ce qu'elle méritait et son soutien financier aux familles des commandos suicides palestiniens. Tout a été combiné contre lui. Et je pense que l'administration Bush, dont certains membres étaient impliqués dans la première guerre du Golfe sous Bush père, ont exercé une influence sur Bush junior qui estime que la première guerre du Golfe déclenchée avec l'aval de l'ONU aurait dû aller plus loin que le souci de contenir Saddam et qu'il fallait le chasser du pouvoir.
Toutefois si je ne peux pas dire ce qui motive Bush personnellement, je peux dire sur le plan géopolitique pourquoi de nombreux faucons tiennent à renverser Saddam et installer à sa place un gouvernement pro-occidental et pourquoi le premier ministre britannique est embarqué dans cette guerre alors qu'il n'a rien à gagner politiquement, mais plutôt tout à perdre.
Je dois dire qu'au moment où la guerre progresse et que le nombre des victimes croît, on verra une pression politique qui sera exercée sur Tony Blair et je crois que c'est son dernier mandat en qualité de premier ministre.
Et qu'en est-il de la réélection de George Bush ?
Je pense que la réélection de George Bush reposera sur deux choses. La première est la perception par l'opinion publique américaine de cette guerre parce que si cette campagne se poursuit longtemps et si des militaires américains sont tués, de plus en plus d'Américains interpelleront Bush : “ pourquoi faisons-nous cette guerre ? ” Et là Bush subira des pressions. La deuxième chose, l'économie américaine n'est pas en bonne santé avec un déficit budgétaire de 300 milliards de dollars auxquels s'ajoute le coût de la guerre. D'ailleurs Bush a réclamé 75 milliards de dollars supplémentaires pour soutenir cette campagne. Je pense que si la situation économique des Etats-Unis ne s'améliore pas, Bush sera dans le pétrin sur le front financier.
Lancer une invasion militaire avec un petit nombre de pays occidentaux soulève un problème de crédibilité. Et l'une des difficultés sera posée en termes de reconstruction de l'Irak après la guerre, la communauté internationale estime que les dégâts causés par l'invasion doivent être réparés par les envahisseurs, à savoir les Américains, les B ritanniques et probablement les Australiens et non pas par la communauté internationale qui s'est opposée à cette guerre.
En 1991, le plus gros de la facture de la guerre a été payé par l'Arabie Saoudite et le Koweït à concurrence de 80 % alors que cette fois-ci Bush et Tony Blair doivent trouver l'argent avec l'apport d'un grand soutien international. Cela va être une guerre très coûteuse. Les estimations entre 200 à 250 milliards de dollars. Toutefois et bien qu'il faille s'attendre à ce que les sociétés américaines raflent la grande partie des contrats de reconstruction, les firmes espagnoles, britanniques et italiennes auront leur part également.
Si on parle de l'après-Saddam, comment voyez-vous la future carte géographique de la région et quelle serait la prochaine cible inscrite au tableau de chasse de Bush ?
Je pense qu'il y a une grande confusion au sujet de l'avenir de l'Irak, simplement parce qu'il n'y a pas le plan de l'ONU. Au Kosovo, on avait une résolution onusienne qui a arrêté les termes de l'administration du pays par l'ONU alors qu'on n'a pas inclus cela dans le cas présent. Cela pourrait être une forme d'administration militaire américaine pour une courte durée, suivie d'élections organisées sous les auspices de l'ONU. Mais l'une des difficultés c'est la division au sein de cette même ONU avec les positions de la France, de l'Allemagne, de la Russie et peut-être de la Chine, pays qui ne semblent pas enclins à légitimer cette guerre en donnant un mandat onusien pour installer un gouvernement après la chute de Saddam Hussein. Cela va poser problème surtout que les Kurdes ont leur propre calendrier. Ils disent vouloir un Irak fédéré, mais veulent encore l'autonomie dont ils ont bénéficié jusqu'à présent. Il y a également les interrogations sur la position de la majorité chiite qui représente près de 60 % de la population. La question de l'Iran et le rôle qu'il jouera par l'intermédiaire du Conseil de la révolution irakienne qu'il soutient. Je pense que le pire des scénarios serait une administration militaire américaine, parce qu'elle deviendra une cible non seulement pour la guerilla pro-Saddam mais aussi dans la région pour ceux qui sont opposés à une présence militaire américaine. Je pense que pour le deuxième volet du calendrier de Bush, les Américains sont très préoccupés par la perspective d'un gouvernement chiite à Baghdad, de peur de voir l'Iran exercer une grande influence sur l'Irak de l'après-Saddam. Quant à la prochaine cible, l'Iran est extrêmement inquiet en ce moment surtout avec une présence militaire américaine à ses frontières. Les Américains ont tenu des rencontres secrètes avec les Iraniens, il y a eu quelques accords qui n'ont pas été évidemment rendus publics. Je pense que ce sont des accords temporaires parce que les Etats-Unis sont très préoccupés par le programme nucléaire iranien. Donc les Américains, au cas où ils n'envahissent pas l'Iran, ils seraient tentés de mener des frappes aériennes contre les installations nucléaires iraniennes. Une autre grande question est la Corée du Nord. On aura probablement des accords négociés parce que les Américains ne pourront pas ou ne voudront pas se risquer à entrer dans une nouvelle guerre juste après celle menée contre l'Irak, surtout qu'actuellement la communauté internationale est très en colère contre les Etats-Unis devenus une puissance néo-coloniale et qui poursuivent un calendrier anti-islamique. Et finalement, la guerre qu'ils livrent n'est pas une guerre de libération mais plutôt une guerre de conquête et je pense que, sous certains aspects, cela a fait le jeu de Saddam Hussein, à savoir que les Etats-Unis s'engagent dans un conflit avec un grand pays musulman. Cela justifierait le soutien aux groupes comme Al Qaïda et je pense qu'on se trouve dans une situation encore plus instable avec l'invasion de l'Irak. Cela servira de prétexte à un anti-américanisme et à la recrudescence du terrorisme.
Dernière question, pensez-vous que les Etats-Unis démantèleront dans quelque temps leurs bases installées dans le Golfe et quel serait l'impact de la guerre sur les pays de la région ?
Il y a un grand risque de déstabilisation avec la probabilité de la chute de certains régimes. Quant aux bases américaines, je trouve qu'il est difficile de croire qu'une fois une base américaine installée, elle sera facilement démontée. Après la première guerre du Golfe, les bases américaines sont toujours en Arabie Saoudite et au Koweït. Donc ces bases ne seront pas démantelées du moins de mon vivant.


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