Comme chaque année, la région d'Ait Baâmrane prolonge la campagne jusqu'à la fin de l'année. La filière connaît toujours un manque de statistiques qui permettraient de suivre son évolution. Les produits dérivés offrent de nouveaux débouchés et une internationalisation salutaire. Dans les grandes villes du royaume, l'on remarque, jusqu'à présent, un fruit estival réputé, pourtant, pour être consommé frais. La figue de Barbarie, fruit polyspermique du cactus, dont la saison de récolte dure normalement trois mois en est encore à ses derniers jours de la campagne 2016. Et ce n'est pas une aberration. En effet, à la région d'Ait Baâmrane, cette campagne de récolte dure jusqu'à la moitié de décembre, voire plus tard. Dans certains cas de dérèglement du cycle climatique, les fruits tardifs continuent aussi à être récoltés bien après l'été, mais sont destinés à la transformation et non à la consommation. En 2016, la campagne a été marquée par deux événements majeurs. Il s'agit de la canicule, qu'a connue la région de Sidi Ifni, et du ravage causé par la cochenille, parasite qui a dévasté les plantations dans les régions d'El Youssoufia, Sidi Bennour et Rhamna. Ces deux événements ont déséquilibré le secteur, en quête, depuis quelques années, de valorisation et en cours de transformation, grâce à l'arrivée d'un nouveau modèle d'exploitation. Le but de ces nouveaux opérateurs, dont la plupart est située dans la région de Sidi Ifni, est d'organiser le secteur en se concentrant, de plus en plus, sur le conditionné, à la place de la vente en vrac. En tout cas, la mue du cactus est à sa genèse, et nous sommes loin d'espérer avoir des statistiques qui révéleraient l'évolution du secteur. Pour l'instant, les quantités «conditionnées» ne représentent qu'une partie infime de ce qui est commercialisé dans l'ensemble du territoire national. Selon Kalthouma Achahour, présidente du Groupement d'intérêt économique, Sobbar Ait Baâmrane, constitué de quinze coopératives et cinq entreprises, les raisons sont multiples. «Les difficultés rencontrées dans la récolte, la commercialisation et l'investissement entravent nos efforts pour organiser la filière», souligne-t-elle. Cette année, la récolte a subi les périodes de canicule dans la région d'Ait Baâmrane et, par conséquent, une récolte tardive. Quelle solution adopter dans ce genre de cas de force majeur ? «L'exploitation locale», précise Achahour, qui préside ce GIE, spécialisé dans le frais, dédié à l'export et au marché national. Les opérateurs du secteur offrent également des produits dérivés. Ces derniers ne posent pas autant de difficultés car chaque coopérative ou unité s'occupe des phases en amont de la chaîne de production. En aval de cette chaîne, le GIE intervient dans le cadre de la prolongation de l'activité. Dans un élan général d'organisation du secteur qui englobe toutes les régions, d'autres GIE voient le jour. Internationalisation et produits dérivés Depuis quelques années, les professionnels ont pénétré certains marchés aussi éloignés que le Japon. Au fur et à mesure que la figue de Barbarie, et ces nouveaux produits dérivés, gagnent en notoriété, la demande augmente de manière considérable. À titre indicatif, les professionnels baâmranis ont pu écouler, au cours de la campagne 2016 (depuis le mois d'août, jusqu'à fin novembre) l'équivalent des quantités commercialisées au cours de toute l'année 2015. «On peut dire que la figue et ses produits dérivés commencent à être connus dans le monde entier. Il s'agit d'un saut quantitatif et qualitatif, par rapport au passé, bien que nous ayons énormément du retard à rattraper», poursuit la présidente. L'huile, la poudre de raquette, utilisée comme solution d'amincissement, les savons...etc., sont autant de produits qui sont actuellement disponibles sur le marché. Si les savons sont fabriqués de manière complètement artisanale, les autres produits nécessitent l'utilisation de machines sophistiquées de filtration et de pression. Autre opération, la transformation consiste à extraire la graine, la stocker et l'utiliser toute l'année. En matière d'effort de travail, il s'agit d'une opération qui nécessite un très grand tonnage de matière brute pouvant s'élever à 7 tonnes par jour pour une seule unité. En ce qui concerne l'huile, entre 800 kilos et 1 tonne sont nécessaires pour fabriquer, seulement, un litre d'huile de cactus, vendue au Maroc et à l'étranger à un prix qui avoisine 5.000 DH pour le conditionné et entre 3.000 et 4.000 DH pour le vrac. Pour les quantités dédiées à l'export, cela dépend bien évidemment de la quantité. Mais, «même ce produit dérivé aussi élitiste n'a pas été épargné par la contrefaçon. On en trouve parfois à 1.500 DH. Cela est impensable que ce prix couvre les dépenses de l'exploitation», nous explique Achahour. Il n'en demeure pas moins que l'avenir de la filière est prometteur. Les efforts déployés pour l'organisation de toutes les phases de production et de commercialisation donnent, petit à petit, leurs fruits bien qu'un travail colossal attend encore les professionnels. «La valorisation a transformé positivement le secteur. Même quand il s'agit de graves problèmes comme les maladies, les autorités nous accompagnent. Dans le passé, la canicule nous causait de très graves pertes, ce que nous avons pu éviter cette année en utilisant la récolte dans la transformation», conclut Achahour.