Le 3 janvier 2010, le roi Mohammed VI installe la Commission consultative pour la régionalisation. Quinze mois plus tard, le souverain annonce les grandes lignes d'une révision de la Constitution qui concerne, non seulement la région, mais également la Primature et la Justice. La régionalisation avancée balise la voie pour une révision de la Constitution, longtemps mises sous le boisseau. Le discours du roi Mohammed VI d'hier est une véritable feuille de route avec, à la clé, des réformes constitutionnelles profondes et une réelle refonte de l'administration territoriale en vigueur depuis des années au royaume. Le discours sur la régionalisation était très attendu, depuis que le mandat de la Commission consultative sur la régionalisation (CCR) a expiré le 31 janvier 2010. Trois mois après cette date, le souverain énonce, dans la première partie de son discours, les grands axes du modèle régional que le Maroc entend entreprendre : «Prévoir l'élection des conseils régionaux au suffrage universel direct, et la gestion démocratique des affaires de la région». «Conférer aux présidents des conseils régionaux le pouvoir d'exécution des délibérations desdits conseils, en lieu et place des gouverneurs et des walis», souligne le roi Mohammed VI. Ce qui modifie complétement un type de gouvernance longtemps décrié et par les politiques marocains et par les organismes internationaux. La régionalisation avancée, telle annoncée par le souverain, aura des conséquences immédiate sur «la composition et les attributions de la Chambre des conseillers, dans le sens de la consécration de sa représentativité territoriale des régions», déclare le souverain. C'est la seconde fois que la régionalisation est à l'origine de réformes constitutionnelles. La dernière révision de la Constitution, en 1996, a été justement réalisée pour permettre au royaume d'instaurer 16 régions. A l'époque l'Etat marocain s'initiait à une «décentralisation» contrôlée. Une copie de la Constitution au mois de juin Dans la deuxième partie du discours, consacrée à la révision de la Constitution, le roi Mohammed VI énumère les grands axes de cette réforme : «La consécration constitutionnelle de la pluralité de l'identité marocaine unie et riche de la diversité de ses affluents, et au cœur de laquelle figure l'amazighité, patrimoine commun de tous les Marocains, sans exclusive», «la consolidation de l'Etat de droit et des institutions, l'élargissement du champ des libertés individuelles et collectives et la garantie de leur exercice, ainsi que le renforcement du système des droits de l'Homme dans toutes leurs dimensions, politique, économique, sociale, culturelle, environnementale et de développement», «la volonté d'ériger la Justice au rang de pouvoir indépendant et de renforcer les prérogatives du Conseil constitutionnel, le but étant de conforter la prééminence de la Constitution et de consolider la suprématie de la loi et l'égalité de tous devant elle», «la consolidation du principe de séparation et d'équilibre des pouvoirs et l'approfondissement de la démocratisation, de la modernisation et la rationalisation des institutions, à travers un Parlement issu d'élections libres et sincères (…), un gouvernement élu, émanant de la volonté populaire exprimée à travers les urnes, et jouissant de la confiance de la majorité à la Chambre des représentants», avec notamment, «la consécration du principe de la nomination du Premier ministre au sein du parti politique arrivé en tête des élections de la Chambre des représentants et sur la base des résultats du scrutin» et «le renforcement du statut du Premier ministre en tant que chef d'un pouvoir exécutif effectif, et pleinement responsable du gouvernement, de l'administration publique, et de la conduite et la mise en œuvre du programme gouvernemental». Voilà qui devrait soulager certains politiques inquiets de voir un éventuel retour en puissance des technocrates à la Primature. Pour une bonne concrétisation de cette feuille de route, le roi a nommé Abdellatif Manouni à la tête de la commission chargée de la révision de la Constitution, laquelle devra rendre sa copie d'ici le mois de juin, laquelle fera l'objet, ensuite, d'un referendum. Indéniablement, les marches du 20 février ont contribué à cette dynamique, les réformes constitutionnelles ne sont plus une demande propre aux partis politiques, certains d'entre eux en ont fait même un fond de commerce, une spécialité. Une menace brandie sporadiquement pour arracher plus de postes et de maroquins. Les marches ont réussi à «subtiliser» les réformes aux politiques pour les étaler sur la place publique. Elles sont désormais empreintes du sceau de la rue. « Le renforcement du statut du Premier ministre en tant que chef d'un pouvoir exécutif effectif, et pleinement responsable du gouvernement, de l'administration publique, et de la conduite et la mise en œuvre du programme gouvernemental ».