La Zombie n'a pas toujours eu le statut de star du fantastique. Réinventé par George Romero, il fut longtemps, l'un des monstres les moins sollicités de l'écran. Relégué à des emplois sublaternes, avant que « La nuit des morts-vivants », puis surtout « Zombie », ne secouent sa vieille carcasse et lui donnent les armes pour se mesurer aux grandes et nobles figures du genre. Pendant de nombreuses années, le Zombie fut le parent pauvre du cinéma fantastique, la créature que les réalisateurs du genre ne tenaient pas en trop haute estime. Ils lui préféraient le sanguin et aristocratique Dracula, le torturé monstre de Frankenstein, le tourmenté Loup-garou et même la Momie. « Les zombies sont des cous », dira plus tard le réalisateur Jess Franco qui les enfonce plus bas que terre dans son lamentable « L'abîme des morts-vivants », une appréciation finalement assez répandue avant que George Romero ne les impose définitivement avec « La nuit des morts-vivants » en 1968. Avant que n'arrive donc « La nuit des morts-vivants », le zombie végète généralement dans des productions d'un intérêt relatif. Principalement « Le Roi des zombies », « La revanche des zombies », « La vallée des zombies », ... Réalisés par des artisans, variablement doués, du trop politique William Beaudine au plus applique Edward Cahn, les morts-vivants y sont les gardiens d'un trésor enfoui, les esclaves d'un toubib nazi ou d'une dictature qui les exploitent en vue de créer une nouvelle et invincible armée, les jouets d'une puissance extraterrestre. Rien que de très banal rien de très conventionnel dans le traitement. Si Bela Lugosi, en docteur fou, ne fabriquait pas des morts-vivants pour en faire l'attraction du cabaret de « Zombie à Broadway », le Zombie d'avant 68 serait même d'un mortel ennui. Pourtant, trois réalisateurs donnent à la créature une belle aura surnaturelle en utilisant intelligemment ses maigres ressources. D'abord Victor Halperin, à l'occasion de son inquiétant « White Zombie » de 1932, puis dans « La révolte des zombies », déjà plus modeste. Ensuite, Jacques Tourneur dans le poétique et voluptueux « Vaudou ». Puis le Britannique John Gilling dans « L'invasion des morts-vivants », une production Hammer. A chacune de ces manifestations, le mort-vivant y apparaît comme la bête de somme, dans les plantations de Haïti comme dans les mines d'étain de Cornouille, où encore dans un moulin où Bel Lugosi les mène au fouet. Il constitue de la main d'œuvre docile, pratiquement gratuite. Si dans « White zombie », les morts-vivants se suicident collectivement en se jetant du haut d'une falaise, c'est aussi pour affirmer qu'ils sont privés de leur âme par la magie noire d'une cérémonie ?. Rendez son âme à un zombie et il deviendrait un homme. Ou une femme amoureuse dans le cas de la belle envoûtée du chef-d'œuvre de Jacques Tourneur. Il n'est pas encore question de ces surnanbules. Le cannibalisme des morts, c'est George Romero qui l'a imaginé. De même qu'il a établi le seul moyen pour s'en débarrasser ; une balle dans la tête ou le crâne réduit en bouillie. Des poncifs éculés en 2005. Avant 1968, ils auraient révolutionné le genre, transformé le mort-vivant en une créature nettement plus agressive, plus dangereuse. Un monstre anthropophage et sans conscience aucune. Qu'était le zombie auparavant, sinon une victime source de compassion. La victime d'un sorcier, de formules cabolistique et décoctions du culte vandou. Quand en 1968 « La nuit des morts-vivants » arrive sur les écrans, souvent en double programme, les spectateurs n'ont pas vu l'oeil hagard d'un zombie depuis belle lurette. En clair, les réalisateurs et producteurs du fantastique s'en détournent. Il n'y a bien que la maison Hammer pour ne pas l'oublier dans son illustration systématique des grands mythes du genre avec « L'invasion des morts-vivants » en 1968.