Elle aurait fait, depuis près de dix ans, de nombreuses victimes et des scandales plus ou moins spectaculaires, avant d'être appréhendée et mise en examen pour ses graves défaillances et ses manipulations par des escrocs déguisés en promoteurs immobiliers. Il s'agit, bien sûr, de la fameuse loi sur la vente en l'état futur d'achèvement ou vente sur plan dont le législateur tente aujourd'hui de redresser les distorsions qui ont conduit à des dérives. Cette fois-ci, c'est le Conseil économique et social et environnemental (CESE) qui a été saisi du projet de loi y afférent, en a analysé les tenants et aboutissants et formulé des recommandations dans la perspective de protection des droits des acquéreurs et de rétablissement de la confiance entre vendeur et acheteur de bien immobilier. La loi n°44-00 (complétant le Dahir du 12 août 1913 formant code des obligations et des contrats) définit la vente en l'état futur d'achèvement comme « toute convention par laquelle le vendeur s'oblige à édifier un immeuble dans un délai déterminé et l'acquéreur s'engage à en payer le prix au fur et à mesure de l'avancement des travaux ». Elle a été adoptée le 3 octobre 2002 et est entrée en vigueur le 6 novembre 2003, dans un souci de protection juridique des parties prenantes lors de l'achat sur plan d'un bien immobilier, en particulier l'acheteur. En effet, par le passé, l'absence d'encadrement juridique de ce type de vente donnait lieu à des abus, aussi bien de la part des promoteurs immobiliers publics que privés, qui peuvent être résumés en quatre grands cas de figures : - Non-conformité du bien livré avec le plan et le cahier des charges initiaux ; - Livraison du bien sans apurement de la situation administrative, et donc non possession des titres de propriété; - Non achèvement du programme immobilier, après encaissement des avances ; - Non restitution des sommes payées en cas de défaillance. L'Etat a donc voulu réguler la pratique de vente sur plan par la voie légale. Elle prévoit des mécanismes de sécurisation de l'acheteur. Mais au-delà du fait que ces mécanismes ne couvrent pas tous les cas de figure litigieux dans la relation entre l'acheteur et le vendeur, certains des principes édictés ont buté sur des aspects pratiques, rendant leur application difficile et donc abandonnée. La mise en corrélation des appels de fonds avec l'état d'avancement des travaux Le législateur a cherché à mettre en adéquation les périodes de paiement avec les grandes phases d'avancement des projets immobiliers, tout en laissant la liberté au vendeur d'en fixer les montants. Trois phases dans la construction ont été retenues : l'achèvement des travaux relatifs aux fondations de la construction au niveau du rez-de-chaussée, l'achèvement des gros oeuvres de l'ensemble de l'immeuble et l'achèvement des travaux de finition. Bien que louable, cette réglementation s'est révélée insuffisante car elle ne couvre pas l'ensemble du cycle de vente, jusqu'à la remise des clés. Qui plus est, en l'absence de plafonds pour les montants à payer, elle ne garantit ni un appel de fonds en phase avec les besoins du chantier, ni un échelonnement équitable et justifié des paiements. La possibilité de prénotation Afin de préserver les droits de l'acquéreur, la législation prévoit la possibilité de prénotation, sur production du contrat préliminaire de vente, et après l'accord du vendeur. Dès lors, le vendeur ne peut plus disposer d'un duplicata du titre foncier. Or, dans la pratique, il est difficile pour l'acquéreur d'obtenir l'accord de principe du vendeur pour la prénotation. Qui plus est, l'éclatement du titre foncier en vue de créer un titre foncier de chaque partie divise n'intervient qu'à la fin des travaux, à l'obtention du permis d'habiter ou du certificat de conformité. La loi prévoit que le paiement de l'avance par l'acheteur doit être assorti d'une caution bancaire ou similaire, engageant le vendeur à restituer les montants avancés sur demande. Or, les banques n'ont pas adhéré au principe de caution bancaire, en raison des risques encourus en cas de défaut. Et les promoteurs se basant sur un financement sur fonds propres ont refusé le recours à l'intermédiation de la banque. Rares sont les projets immobiliers qui, dans les faits, se sont inscrits sous le régime de la VEFA et donc de l'apport de la garantie bancaire. L'essentiel est resté sur la pratique de l'avance sur la base de contrats de réservation.