"The sea is behind" est un titre inspiré de la fameuse déclaration du conquérant berbère Tarik Ibn Ziad, sur la colline de Gibraltar qui porte glorieusement son nom, face à ses combattants décidés à conquérir l'Espagne en 711, incitant ses fidèles à envahir l'Europe après avoir brûlé tous leurs bateaux. Cela relève évidemment de l'Histoire mais sans véritable histoire dans la lignée des films précédents de Hicham Lasri. Tout comme "The sea is behind", ces films sont caractérisés par le manque d'anecdote, plutôt une succession de situations sans véritable lien, ni cohérence thématique permettant au spectateur de suivre sans peine la linéarité des événements. Il s'agit d'une écriture décousue à la manière d'un cinéma de Mustapha Derkaoui d'il y a vingt ans, que Lasri ressuscite contre vent et marée. L'auteur ne se rend-t-il pas compte que les temps ont bien changé et qu'un tel cinéma est largement dépassé et n'est trouvable nulle part ailleurs? Son cinéma est celui de la marge avec des personnages authentiques tout aussi sales, vulgaires, vrais, imprévisibles, faibles, soumis et oisifs. Les acteurs Malek Akhmis, Hassan Badida et Hamid Najah constituent son meilleur choix et qu'on retrouve dans presque tous les films de Lasri, habitués depuis les premières tentatives à cette ambiance de désarroi permanent que le spectateur va consommer en noir et blanc à l'insu des protagonistes. "The sea is behind" est bourré de références tant politiques, sociologiques que personnelles que Lasri reprend inlassablement dans tous ses films en vue d'insister sur son ancrage social, tel un intellectuel souffrant d'un quelconque remords transmis par l'image et le son au conscient et subconscient de l'humble public que nous sommes. N'empêche que nous assistons à des scènes fortes, provocantes, voire choquantes parfois, témoins d'une audace inégalée et rarement retrouvée sur l'écran marocain et que Lasri sait si bien agencer. : Résumé du film Tarik se maquille et s'habille en femme. Il danse sur une carriole tractée à la fois par un cheval mourant et par son père qui ne le regarde plus. Il suit le rythme effréné d'une fanfare composée de pauvres hères, des parias, des punks et des désaxés. Suivi, par la foule, Tarik vibre de sensualité féminine en s'abandonnant à cette passion, son visage barré par une moustache qui revendique sa virilité tronquée. Car Tarik est un artiste de H'Dya. Il se travestit en femme et danse contre de l'argent à l'occasion des fêtes, des cérémonies de fiançailles ou de mariage. H'Dya : une tradition marocaine, proche de la fête foraine, qui pendant longtemps a rythmé les festivités et le quotidien des marocains avant de disparaitre à cause d'un certain conservatisme qui a rongé la société marocaine, comme tant d'autres sociétés arabes...