Trois mois après avoir porté, à la magistrature suprême, l'ex-comédien Volodymyr Zelensky, les ukrainiens lui ont donné carte blanche aux législatives anticipées de ce dimanche en permettant à son parti, «Serviteur du Peuple», de remporter à lui seul la majorité absolue au Parlement avec 42,4% des voix selon les résultats publiés par la Commission électorale après le dépouillement de près de la moitié des bulletins. Les projections effectuées par plusieurs médias ukrainiens confèrent au parti du président au moins 226 sièges sur les 450 que compte le Parlement monocaméral de cette ancienne république soviétique aux portes de l'Union Européenne. En s'appuyant donc sur ce parti, pro-occidental, qui a drainé la majorité des suffrages, et en s'apprêtant à prendre le contrôle du Parlement, le nouveau président ukrainien a donc les coudées franches pour former son gouvernement et notamment pour «casser le système» comme il l'avait promis pendant sa campagne électorale et, avec l'aide des 70% nouvellement élus ce dimanche soir, de réformer un pays confronté à d'énormes difficultés économiques mais aussi au conflit armé qui l'oppose aux séparatistes pro-russes dans l'est du pays et qui a fait près de 13.000 morts en cinq ans. Avec un tel score, Volodymyr Zelensky devrait, comme il l'avait promis, mettre fin à l'immunité des élus et mettre en œuvre l'amnistie fiscale, la réforme judiciaire et la libéralisation de l'économie. Le nouveau président ukrainien qui a fait de l'obtention d'un cessez-le-feu durable dans le Donbass, une priorité de son mandat et retiré des troupes en plusieurs endroits du front, pourrait aussi tenter d'obtenir certaines concessions de la part du président Vladimir Poutine après que la semaine dernière ait eu lieu un nouvel échange de prisonniers. En s'exprimant depuis son quartier général de campagne, le président Zelensky qui, ce dimanche, a considéré qu'il était encore prématuré de parler d'éventuelles alliances, a déclaré que cette victoire «n'est pas seulement un signal de confiance mais aussi une immense responsabilité» et formulé le souhait qu'elle lui permette de mettre «fin à la guerre». La victoire de Zelensky et celle de son parti sont la preuve très claire de la profonde déception des ukrainiens vis-à-vis de leurs élites. Jugées corrompues, ces dernières n'avaient pu ni mettre fin à la guerre ni améliorer les conditions d'existence de la population d'un pays grand comme la France et qui est aussi l'un des plus pauvres du vieux continent. Mais les ukrainiens, qui veulent absolument faire table rase du passé, ne se sont pas contentés d'élire un comédien à la tête du pays puisqu'il ont, également, décidé de faire entrer au Parlement Sviatoslav Vakartchouk, une superstar du rock et son tout jeune parti «Golos» (La Voix) qui en ayant pour objectif de «dépoussiérer la vie politique en Ukraine» est, tout de même, parvenu à obtenir 6% des suffrages selon les sondages réalisés à la sortie des urnes. Ainsi, après avoir su faire de son mouvement -tout juste né en Mai 2019- l'une des surprises des législatives anticipées de ce dimanche, le rocker qui a ainsi fait écho au succès remporté en avril dernier par l'ancien comédien Volodymyr Zelensky s'est écrié: «Les gens ont voté pour le changement et nous sommes heureux d'en faire partie (…) Golos va au Parlement pour changer les règles dans la politique (…) Pour nous, l'essentiel est que l'Ukraine se rapproche de l'Europe» entendez par là, faire partie de l'Union européenne et de l'OTAN. Que dire pour terminer sinon qu'après avoir clairement manifesté en Avril dernier leur volonté de faire table rase du passé en élisant un homme dépourvu de toute expérience politique, les ukrainiens lui ont donné, ce dimanche, les moyens de gouverner. Une nouvelle Ukraine serait-elle en train de naître ? Il semble bien que oui mais attendons pour voir…