Le ton s'est élevé d'un cran dans le conflit RAM-Air Sénégal. En recourant à la justice, le dossier prend une autre dimension et provoque l'étonnement du top management de la RAM. Le Sénégal serait-il en train de jouer le tout pour le tout au risque de précipiter la mort d'ASI ? Le rythme des rebondissements s'accélère dans le dossier RAM-Air Sénégal. Telle une mauvaise blague qui tourne au vinaigre, il a pris une tournure inattendue, jusqu'à prendre des allures d'affaire d'Etat. La décision du Sénégal de se référer au tribunal régional de Dakar pour se prononcer sur la question ne rentrait pas dans les pronostics de la compagnie marocaine. Le président de la RAM est pris d'assaut. Pour lui, « les divergences entre les deux actionnaires d'Air Sénégal International auraient aisément pu être aplanies, en leur temps, autour d'une table de négociation ou, plus simplement encore, au sein du conseil d'administration ». Sa déclaration ne changera pourtant rien à la tournure qu'est en train de prendre cette affaire, d'autant que la justice sénégalaise a d'ores et déjà traité le dossier en référé et qu'elle a même rendu son verdict. En effet, le jugement prononcé ordonne de désigner un expert judiciaire pour un nouvel audit et d'interdire à la RAM de se retirer de la gestion d'Air Sénégal International jusqu'à la fin de la mission de l'expert judiciaire, sous peine d'une astreinte financière excessivement lourde. Ce que les Sénégalais reprochent à la RAM La presse sénégalaise réserve sa «une» à cette actualité toute chaude, sans aucune nuance. Pour les Sénégalais, l'affaire est (presque) close. Royal Air Maroc va rester dans le capital d'Air Sénégal International. Est-ce la fin d'un feuilleton qui dure depuis plusieurs mois ? A priori, la réponse est négative. Car Driss Benhima réagit à nouveau et déclare que sa compagnie va faire appel de la décision. «Face à une situation devenue insupportable, Royal Air Maroc ne peut qu'exprimer, à nouveau, ses très vives inquiétudes et sa désillusion», selon un communiqué de la RAM. Et d'ajouter que les dirigeants de la RAM constatent que leurs partenaires sénégalais, après avoir exprimé unilatéralement leur volonté de prendre le contrôle d'Air Sénégal International, utilisent aujourd'hui la justice pour maintenir la compagnie au sein d'ASI.Du côté sénégalais, on reproche à la RAM son acte de résiliation du pacte d'actionnaires. En effet, dans un communiqué rendu public le 26 février dernier, la RAM a demandé à ses partenaires sénégalais l'établissement immédiat d'une stratégie permettant le transfert d'Air Sénégal International (ASI) à l'État du Sénégal, effective au plus tard le 30 juin 2009. La RAM avertissait en même temps que « dans le cas où une telle feuille de route ne serait pas mise sur pied, elle sera contrainte de tirer les conclusions de cette situation et de procéder au processus de retrait de la gestion d'Air Sénégal International dès la fin de mars 2009». Aujourd'hui, la RAM apporte plus de précisions quant à cet ultimatum. Sa version est la suivante : « la compagnie prévoyait un retrait progressif et une transition harmonieuse vers la prise de contrôle par les pouvoirs publics sénégalais, dans un délai raisonnable et non perturbant. La situation de crise économique mondiale, et celle du secteur aéronautique en particulier, ne permet aucun écart de gestion ni improvisation, sauf à mettre en cause la survie d'une compagnie, l'emploi de son personnel et les facilités de déplacement de ses passagers, et en particulier des voyageurs sénégalais ». La déclaration du ministère des Transports aériens visant à rassurer les partenaires marocains, en précisant que «l'action initiée par le Sénégal vise à faire rester la RAM au sein d'ASI, jusqu'à ce qu'une solution soit trouvée», réussira-t-elle à calmer (relativement) les esprits ? La situation requiert surtout des solutions urgentes, rationnelles et efficaces. Car entre temps, les comptes d'Air Sénégal International sont toujours bloqués par l'Agence sénégalaise chargée de récupérer les taxes aéroportuaires, ce qui peut menacer à très court terme la continuité de l'exploitation, selon la RAM.