Seize opérateurs marocains ont fait le déplacement à New York pour prendre part au Fancy Food, l'un des plus grands salons mondiaux de l'agroalimentaire. Accompagnés par Maroc Export, certains en sont à leur première participation, d'autres sont devenus des habitués des lieux. Mais tous ont un seul objectif, se faire une place sur ce marché de plus de 300 millions de consommateurs, mais qui reste très difficile d'accès. «Yes we can». L'équipe de Saâd Benadellah, DG de Maroc Export, n'était pas la seule à crier ce slogan sur les toits. Les quatorze exposants, dont certains sont désormais des habitués du salon de l'agroalimentaire de prestige Fancy Food, n'ont cessé d'exprimer haut et fort cette pensée qui consacre le droit de rêver, d'espérer, même dans les circonstances les plus difficiles. Ils étaient là, chez notre sixième client, ce géant de la consommation, avec comme seule et unique idée de séduire des partenaires venus en masse découvrir les nouveautés de l'édition 2009. Lors d'entretiens tenus à l'improviste ou de rencontres B to B programmées plusieurs jours à l'avance par le staff de Maroc Export, les exposants marocains avaient le devoir de paraître sous leur meilleur jour pour convaincre des prescripteurs potentiels habitués au meilleur. Ce sont en effet pas moins de 140.000 visiteurs professionnels qui étaient attendus à ce salon, où 81 pays étaient représentés. C'est dire que les opportunités étaient bel et bien là, mais qu'il fallait se battre pour se démarquer de la concurrence, notamment méditerranéenne. Cette année, il a été délibérément décidé de choisir de monter le pavillon marocain à côté de ceux des pays concurrents. «Nous avons souhaité nous trouver dans le même hall que les Turcs, les Tunisiens et les Egyptiens afin de voir de près ce qu'ils font et de pouvoir faire un benchmark en aval», déclare Sâad Benabdellah. Autrement dit, le Maroc veut être là où ses rivaux se positionnent sans avoir peur de se battre. «Cela nous permettra de mieux aiguiser nos armes», ajoute le DG de Maroc Export. Etre plus agressif sur ce marché En effet, l'idée qui fait son bonhomme de chemin est d'être plus agressif pour pouvoir appréhender ce marché, l'un des plus grands du monde avec quelque 300 millions de consommateurs, de surcroît à grand pouvoir d'achat. Et c'est là où réside l'intérêt du marché US. C'est ce qui explique aussi tout l'acharnement de la part des opérateurs marocains à vouloir exporter aux Etats-Unis, malgré toutes les barrières à l'entrée. «Ceux qui n'y ont pas encore mis le pied doivent y réfléchir. Ce marché est devenu incontournable de par la taille et la valeur ajoutée qu'il dégage, si toutes les spécifications du cahier des charges clients sont respectées a l'arrivée du produit», soutient une source à MFB (Maroc Fruit Board). Ce groupe, qui représente environ 70% de la production nationale en agrumes, est déjà présent en Amérique à travers des lots de clémentines exportés. «Personne ne peut plus ignorer les Etats-Unis en tant que marché de demain», ajoute la source. Aujourd'hui, au-delà de la clémentine, le groupe peut se targuer d'être entièrement prêt pour investir ce marché très exigeant en matière de calibre, de présentation, de période et de qualité du fruit. «Les nouvelles plantations permettront de disposer de fruits ayant la taille requise pour les Américains. Cela nous permettra d'écouler davantage de clémentines sur ce marché, mais de penser aussi à la diversification future en termes de primeurs et de légumes», confie la même source. Ce groupe fait en effet partie des premiers opérateurs nationaux ayant réussi à exporter au pays de l'Oncle Sam et ce, bien avant 2006, année de signature de l'accord de libre-échange avec les Etats-Unis, auquel le Maroc doit en effet plus de 200% de l'évolution de ses exportations. Ces dernières sont passées de 275 millions de dollars en 2005 à quelque 700 millions de dollars en 2008, notamment grâce aux belles performances enregistrées par les filières conserves de légumes et poisson en conserve. Ce ne sont par ailleurs pas ces dernières qui étaient présentes en force au Fancy Food, où trois producteurs d'huile d'olive étaient sur place. Il s'agit de Atlas Olive oil, Agro-Nafis et Les terroirs de Volubilis. Le propriétaire de ces derniers n'est autre que Youssef Gardam, gagnant de l'une des précédentes éditions de l'émission «Challengers» diffusée sur 2M. Habitué des plateaux de télévision, il ne peut toutefois cacher sa fierté d'être passé sur France 2 quelques jours seulement avant l'ouverture du Fancy Food. C'était dans l'émission «Voyages en Méditerranée», animée par Marie et Michel Drucker. «L'émission s'est attelée à présenter notre façon de faire et celle des Espagnols, par ailleurs hyper sophistiquée. Mais tout compte fait, les gens ont apprécié la nôtre, qui privilégie le côté humain. Nous comptons capitaliser sur cette image dans nos campagnes de communication et de promotion», soutient celui dont 90% de la production (50.000 litres par an) sont destinés à l'exportation. Et d'ajouter, «nous devons éviter les erreurs de nos concurrents qui ont fait du volume leur principale préoccupation. De toutes les façons, nous n'avons pas les capacités requises pour rivaliser sur ce terrain, c'est donc sur la qualité que nous devons axer tous nos efforts». Quand l'habit fait le moine Ceci dit, sur le marché américain, être bon ne se limite pas à faire un produit de qualité. La forme intervient au même titre que le fond pour juger si un produit est valable ou non. Ceci veut dire calibre pour les fruits et légumes, et packaging quand il s'agit de produits transformés. Un aspect qui n'a pas échappé à la famille Khalil à la tête de l'entreprise Dari Couspate. Son couscous est en vente dans les épiceries fines des Etats-Unis sous un emballage proprement dédié au marché local. Aux oubliettes les packaging en plastique. Ici, c'est le carton qui est de rigueur si l'on veut séduire la ménagère américaine. Dari Couspate y est arrivé en partie. Autrement dit, même si pour le moment, l'entreprise n'arrive pas à écouler de grandes quantités sur ce marché (100.000 dollars exportés annuellement), l'important demeure aujourd'hui d'asseoir la marque. «Notre priorité n'a pas été de faire du volume, mais de se faire connaître en tant que Dari Couspate. Nous aurions pu choisir la facilité en produisant pour le compte d'une autre marque déjà installée. Or, pour nous, réussir, c'est être présent sous notre propre label», explique Hassan Khalil. En effet, il est un secret de polichinelle que de nombreux produits marocains, notamment des conserves de poisson, sont en vente dans les grandes surfaces américaines mais sous des marques étrangères, essentiellement espagnoles. Choix de la facilité, comme l'a dit Hassan Khalil ? Reconnaissons tout de même qu'arriver à mettre un pied sur le marché américain n'est pas une mince affaire. Y consolider sa présence l'est encore moins. Et pour cause. Les réflexes développés par les opérateurs marocains pour installer leurs produits sur les marchés classiques, notamment européens, ne sont pas de rigueur quand il s'agit de s'adresser à la clientèle américaine. «Pour pouvoir vendre aux Etats-Unis, il faut avoir un importateur sur place qui lui, se charge de chercher un réseau de distributeurs locaux», explique Ali Benmokhtar, consultant auprès de l'USAID dans le cadre du programme d'accompagnement NBO. Et de poursuivre, «je dirais même qu'il faut disposer de plusieurs importateurs si l'opérateur ambitionne de couvrir plusieurs régions américaines». Quand on vise le marché US, il faut résolument voir grand !