La Cour suprême fédérale allemande a décidé d'examiner la plainte déposée par le Maroc contre deux médias du pays, accusés d'avoir relayé des informations jugées diffamatoires sur une prétendue utilisation du logiciel espion israélien Pegasus par les services marocains. La plus haute instance judiciaire allemande a annoncé qu'elle se penchera sur la plainte déposée par le Royaume du Maroc contre deux médias allemands, Zeit Online et Süddeutsche Zeitung. Ces publications avaient affirmé en 2021 que Rabat avait utilisé le logiciel israélien Pegasus pour espionner des responsables politiques européens, parmi lesquels figuraient le président français, Emmanuel Macron, le président du Conseil européen, Charles Michel et le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez. Le Maroc, qui a toujours rejeté ces accusations mensongères et de diffamatoires, avait décidé de porter l'affaire devant la justice allemande après la publication de ces articles. Les tribunaux de Hambourg avaient initialement rejeté la requête du Royaume, estimant qu'un État étranger ne pouvait saisir la justice nationale pour des motifs de diffamation, cette dernière étant protégée par la liberté de la presse inscrite dans la Constitution allemande. Mais la Cour suprême fédérale a finalement choisi de rouvrir le dossier afin d'examiner la recevabilité du recours marocain. Cette décision marque un tournant procédural, puisqu'elle reconnaît la possibilité d'analyser sur le fond les arguments du Maroc, qui estime avoir été victime d'atteintes à sa réputation internationale. L'affaire trouve son origine dans les articles publiés en 2021 par plusieurs consortiums médiatiques européens, relayant des données d'Amnesty International et de Forbidden Stories sur l'usage présumé de Pegasus dans divers pays. Rabat avait fermement nié toute implication, rappelant qu'il ne dispose d'aucun lien avec cette technologie et qu'aucune preuve n'a jamais confirmé les allégations d'espionnage. Dans le même contexte, le Maroc avait également intenté une action en justice à Madrid contre le journaliste Ignacio Cembrero, qu'il accusait d'avoir affirmé que les services marocains avaient utilisé Pegasus pour espionner des responsables et des journalistes, dont lui-même. Toutefois, cette plainte a été rejetée à deux reprises par la justice espagnole, en mars 2023 puis en novembre 2024. Entre-temps, l'Espagne a elle-même confirmé que les téléphones du Premier ministre Pedro Sánchez et de la ministre de la Défense Margarita Robles avaient été piratés via Pegasus en 2022, sans toutefois impliquer le Maroc. L'enquête espagnole, rouverte en 2024 après des échanges avec les autorités françaises, reste en cours pour déterminer l'origine des attaques. Il est à préciser que la Cour suprême allemande va se prononcer sur la seule question juridique de la recevabilité de la plainte marocaine, c'est-à-dire si un État étranger peut engager une action en diffamation contre des médias en Allemagne. La décision ne portera pas sur le fond des accusations concernant Pegasus, mais elle déterminera si le Maroc peut obtenir réparation dans le cadre du droit allemand.