Bien que les prix soient libéralisés, certaines dénonciations constituent un acte minimal au vu des énormes carences soulevées dans le domaine de la protection des consommateurs marocains. Pour que le mépris des consommateurs au Maroc cesse de prendre de l'ampleur, des actes vigoureux devraient remplacer ceux déjà existants Dans le cas où l'un désire consommer son thé à la terrasse d'un café bien chic à 55 DH, alors que l'autre ne peut consommer qu'un thé à 10 DH mais dans un autre café populaire, peut-on parler d'une arnaque pour le premier ? Sinon, quand et comment peut-on déterminer une arnaque en matière de prix ? De telles questions laissent réfléchir sur le contrôle des prix et la protection du consommateur. Lors d'une rencontre, Mohamed Lasri, chef de la division Economique à la préfecture de Casa-Anfa, a souligné «l'adoption d'une politique de la concurrence au Maroc constitue la suite logique d'un processus entamé dès le début des années quatre vingt pour la libéralisation des prix. Un processus qui a permis la dérèglementation de la quasi-totalité des produits et services réglementés dans le cadre de la loi 008-71 du 12 octobre 1971. Ainsi, sur 170 produits et services règlementés, seule une liste restreinte comprenant une vingtaine de produits et services demeure aujourd'hui encadrée : services publics, monopoles, produits de santé, produits subventionnés (sucre, la farine de blé tendre, le gaz butane et les graines de tournesol». Face à une telle déclaration, peut-on comprendre que le consommateur doit subir des prix excessifs ? Encore une fois Mohamed Lasri intervient : «je rappelle que l'instrument fondamental de la politique de concurrence au Maroc, la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence puise ses sources d'inspiration dans les grands principes du libéralisme économique. En ce sens, les pouvoirs publics au Maroc sont appelés à veiller à ce que la législation nationale soit en conformité avec les principes de transparence, de non discrimination, de loyauté, édictés par l'OMC et avec les dispositions de l'ensemble des résolutions sur les règles équitables convenues au niveau multilatéral pour le contrôle des pratiques commerciales hors la loi. Ceci dit que la libéralisation des prix au Maroc impose à tous les acteurs concernés, d'adapter les méthodes de vente aux nouvelles règles de fonctionnement concurrentiel du marché». Quant à la question relative à l'arnaque en matière des prix, le chef de la division économique à la préfecture de Casa Anfa, a rappelé que l'Etat n'a plus le droit d'intervenir sur les prix, sauf dans des situations exceptionnelles expressément limitées par la loi. Il a ajouté que les autorités ne peuvent intervenir en faveur d'une déclaration pour un prix excessif, seulement si le prix en question est un produit subventionné par l'Etat. Par contre, les autorités se donnent le droit d'intervenir, voire même verbaliser le commerçant quand il s'agit de défaut d'affichage. Il est clair que la bonne qualité des produits achetés et des services payés est un droit, mais pas le seul. Les consommateurs ont également le droit de se défendre dans la jungle des publicités mensongères, conditions commerciales abusives, prix excessifs et autres déclarations, d'origines peu claires… Mais comment un consommateur, peu outillé, peut-il faire le bon choix et assumer sa part de responsabilité face à un secteur commercial qui ne cesse d'enregistrer une croissance notable et un marché marocain de plus en plus ouvert ? Libéralisation hâtive Le fait est souvent oublié au Maroc. Le consommateur marocain a certes des droits, mais sont-ils suffisamment protégés ? Ce n'est un secret pour personne, en matière de protection du consommateur, le Maroc est à la traîne. Mohamed Lasri confirme que la libéralisation des prix n'a pas été accompagnée par la mise en place de mesures susceptibles de protéger les consommateurs. L'absence d'un statut juridique a eu comme principale conséquence, la dispersion des efforts et l'inexistence de structures de tutelle spécialisées dans les questions liées à la protection du consommateur. Pourtant, un projet de loi sur la protection des consommateurs avait été élaboré en 2000. Rappelons que ce projet de loi sommeille depuis plusieurs années au secrétariat Général du Gouvernement. Ladite loi, a pour objet de définir les dispositions régissant la liberté des prix et d'organiser la libre concurrence. Elle définit les règles de protection de la concurrence afin de stimuler l'efficience économique et d'améliorer le bien-être des consommateurs. Elle vise également à assurer la transparence et la loyauté dans les relations commerciales. Mais un projet de loi qui a déjà la particularité d'être un contexte institutionnel et législatif de la protection du consommateur marocain, est-il suffisant pour la création d'un certain équilibre entre les intérêts des commerçants et des différents prestataires et la protection du consommateur d'autre part ? Il faut dire, que malgré les efforts consentis, les mesures introduites par les autorités, ont du mal à s'installer dans les mœurs du marocain qui n'est pas assez préparé pour ester en justice, même si c'est son droit le plus naturel. La sensibilisation du consommateur est devenue une nécessité, compte tenu de sa vulnérabilité devant les arguments de vente agressifs utilisés à outrance par les entreprises contemporaines. C'est à ce niveau-là, qu'interviennent les associations de consommateurs, dont le rôle de l'inculcation des concepts de base de la consommation saine, sécurisée aux consommateurs marocains, semble de plus en plus impératif. Malheureusement, le mouvement consumériste est encore à l'état embryonnaire et ne dispose que de moyens limités pour agir. Il faut dire qu'au regard du droit positif, les associations n'ont pas encore le droit de porter plainte au nom de leurs adhérents. La loi 06-99 consacre les principes fondamentaux du libre jeu de la concurrence, elle permet de : n Sortir du contrôle des prix; n Substituer au contrôle des prix des dispositions concernant la concurrence; n Renforcer les règles d'information et de protection du consommateur; n Adapter l'économie nationale au nouveau contexte économique international; La loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence promulguée par le Dahir n° 1-00-225 du 5 juin 2000 publié au bulletin officiel n° 4810 du 6 juillet 2000 est entrée en vigueur le 6 juillet 2001. Volumineux, ce texte de plus de 200 articles, vise à assainir les relations entre fournisseurs et consommateurs.