Dans les coulisses de la Fédération démocratique du travail A la veille du bouclage de ce numéro de La Gazette du Maroc, la course battait toujours son plein pour le secrétariat général de la Fédération démocratique du travail. Outre Taïeb Mounchid et Houcine Kafouni, un troisième candidat en la personne de Abdelhadi Khaïrat manifestait son intention de briguer le poste. Face aux dissensions qu'une telle compétition menaçait d'engendrer pour l'avenir de la nouvelle centrale, la direction de l'USFP a appelé l'ensemble des Ittihadis du Conseil national fédéral à faire l'unité autour d'un seul nom. Le congrès constitutif de la Fédération démocratique du travail s'est clos tard dans la nuit du dimanche 6 avril, sans que les congressistes aient pu trancher pour ce qui est de la composition du Bureau national fédéral et, partant, sur le nom du secrétaire général, le premier de l'histoire de cette centrale. Bien plus, d'autres problèmes avaient surgi lors des élections des membres du Conseil fédéral et avaient suscité de vifs débats. Tout d'abord, c'est le Parti socialiste démocratique qui allait inaugurer la série de points de contestation à l'origine de l'interruption à plusieurs reprises des travaux. Ainsi, estimant que le quota qui lui a été imparti au sein de cette instance ne correspondait ni à l'importance de ses adhérents ni à l'efficacité de ses cadres qui ont contribué à la mise en place des structures de la nouvelle centrale, le PSD était allé jusqu'à menacer de se retirer de la FDT. Après maints conciliabules et autres arbitrages, le PSD a pu obtenir 15 sièges au lieu des 8 initialement prévus. De leur côté, les sensibilités de la GSU et le PPS décrochèrent respectivement 4 et 2 sièges du fait que les deux n'étaient représentés, qu'à titre individuel, par quelques cadres syndicalistes affiliés à ces deux formations. Du fait de ces réajustements, le nombre des membres du Conseil national fédéral a été porté de 121 à 127. La bavure des amis de Mounchid L'autre question à l'origine de la controverse a trait à la procédure d'attribution de la représentativité, au sein du Conseil national fédéral, aux différents syndicats sectoriels constituant la FDT. Les congressistes ont finalement tranché sur la base d'un élu pour dix congressistes. Mais lorsqu'on est passé à l'exécution de cette recommandation au niveau du Syndicat national de l'enseignement (SNE), une grande polémique a opposé les partisans de deux membres du Bureau politique de l'USFP, en l'occurrence Taïeb Mounchid et Abdelhadi Khaïrat. En fait, ce sont les amis de Mounchid qui sont à l'origine de l'incident puisqu'ils ont tenté de faire passer une liste fermée de 11 représentants du SNE au Conseil national fédéral. Liste sur laquelle ne figurait pas, entre autres, le nom de Abdelhadi Khaïrat. Ce dernier n'a guère apprécié la manœuvre visant sa mise au placard, d'autant plus qu'en sa qualité de président du congrès constitutif précité, il considérait que cette responsabilité lui donnait au moins le droit d'être consulté lors de l'établissement de la liste. Les débats qui ont suivi ont été très animés. Finalement, la décision a été prise de laisser ouverte la porte des candidatures à tous les congressistes du secteur de l'enseignement qui le désirent. De ce fait, à la liste des 11 proposée par les amis de Mounchid, dix autres candidats se sont déclarés, dont Abdelhadi Khaïrat. Le dépouillement des votes a permis à ce dernier d'accéder au Conseil national fédéral, ce qui l'habilitait à briguer le poste de secrétaire général. Ces incidents ont évidemment perturbé le déroulement des travaux du congrès constitutif de la FDT, qui devaient durer trois jours, les 4, 5 et 6 avril 2003 à Bouznika. Aussi, la nécessité s'est-elle imposée de reporter l'élection des 13 membres du Bureau national fédéral qui, selon les statuts, devraient choisir parmi eux le (premier) secrétaire général de la Fédération démocratique du travail, qui vient d'être constituée sous la coupe de l'USFP. Une tâche difficile qui soulève les passions. Comment Amaoui a pris la CDT A ce propos, force est de constater que les temps ont changé, et les hommes aussi. On est loin des circonstances qui ont entouré la désignation du premier secrétaire général de la Confédération démocratique du travail (CDT), à l'issue de son congrès constitutif de 1978. On avait alors proposé le poste à deux cadres syndicaux qui avaient contribué de très près à cette naissance. Tous deux avaient de leur plein gré décliné l'offre. Il s'agit respectivement de feu Ahmed Bouzidi (PTT) et d'Abderrahman Chennaf (SNE). Les deux avaient expliqué leur refus par leur appréhension devant la lourdeur de la charge, craignant de ne pas être à la hauteur de la responsabilité que leurs camarades voulaient leur confier. Une situation qui avait donné l'opportunité à Noubir Amaoui de proposer sa candidature à la tête de la CDT, qui fut acceptée faute d'autres candidats en lice. Il est vrai que le Bureau politique de l'USFP de l'époque, dirigé par feu Abderrahim Bouâbid, avait décidé de se tenir à l'écart, laissant les syndicalistes décider en toute liberté du choix du secrétaire général de la CDT. Ce qui ne semble pas être le cas, aujourd'hui, même si officiellement la direction de l'USFP a voté majoritairement la semaine dernière, en faveur d'une option analogue lui défendant d'interférer dans ce dossier (voir la précédente édition de La Gazette du Maroc). Cette option est cependant respectée de curieuse manière puisque deux membres de ce même Bureau politique se chamaillent pour le poste. En effet, à côté de Taïeb Mounchid qui a engagé depuis longtemps ses forces dans la course au secrétariat général de la FDT, le nom de son collègue Abdelhadi Khaïrat était de plus en plus cité à la fin de la semaine en cours. Ces candidats sont tous deux issus du secteur de l'enseignement. S'ils n'arrivent pas à s'entendre, ou plutôt si les pressions exercées par d'autres syndicalistes de l'USFP n'arrivent pas à dissuader Khaïrat de se retirer de la course, le risque est grand de voir le secteur ittihadi de l'enseignement divisé lors du vote. Une perspective qui pourrait profiter à l'autre candidat, Houcine Kafouni en l'occurrence, responsable du syndicat des phosphates. C'est probablement pour éviter que ces dissensions ne s'enveniment, que l'ensemble des syndicalistes ittihadis membres du Conseil national fédéral de la FDT, ont été appelés à se réunir dans la matinée du dimanche 13 avril, au siège du secrétariat provincial de l'USFP à Casablanca. A l'ordre du jour, un seul point mais capital : s'entendre sur le nom du secrétaire général de la FDT et éviter ainsi que l'animosité engendrée par les frictions à ce sujet ne dégénère, handicapant les premiers pas du nouveau-né et décevant à nouveau les espoirs que les syndicalistes qui ont quitté la CDT ont mis dans ce projet.