Une unité spéciale antiterroriste opérationnelle à Casablanca Au Maroc, comme dans tous les pays touchés par la déferlante intégriste, la sécurité est plus que jamais une nécessité. Et même une nécessité indispensable. 14 mois après les attentats meurtriers de Casablanca, une unité spéciale, dénommée "Brigade antiterroriste", est née. Elle est déjà fonctionnelle et compte 500 éléments répartis, à présent, entre Casablanca et Rabat. La chasse aux terroristes intégristes peut continuer. Encore une fois, le général Hamidou Laânigri a fait ses preuves. Les directives royales, annoncées dans l'allocution du Souverain du 29 mai 2003 suite aux attentats meurtriers de Casablanca, sont appliquées à la lettre. Une année après sa nomination à la tête de la DGSN (Direction générale de la sûreté nationale), Hamidou Laânigri passe à l'action. Son projet de doter le pays d'une unité spéciale en matière de lutte contre le terrorisme est déjà opérationnel. Au moins pour la ville de Casablanca, avant d'être généralisée dans toutes les contrées du pays. Il n'y a pas péril en la demeure, loin s'en faut (la menace terroriste n'est aussi importante qu'auparavant), mais comme chaque pays tourmenté par la pieuvre intégriste, le Maroc a éprouvé le besoin en moyens d'autodéfense que lui imposent sa vocation de pays ouvert sur l'Occident. Des moyens en structures spécialisées et en compétences humaines. Au total, c'est un dispositif de 500 agents, spécialisés en matière de lutte contre le terrorisme, qui a pris ses quartiers dans la grande ville de Casablanca secouée, un 16 mai, sous le coup de cinq explosions. Ce n'est qu'un début, annoncent les officiels, en attendant la sortie d'autres promotions de l'Institut de police de Kénitra. Pour éviter de basculer dans la psychose, on pourrait se rassurer en estimant que cette nouvelle brigade antiterroriste, déjà fonctionnelle à Casablanca, Rabat et Beni Mellal, a été conçue dans un souci de prévention, d'efficacité, et surtout dans un cadre de mise à niveau de la sûreté nationale. Quel est le cursus de formation des hommes qui y travaillent? Et disposent-ils de l'équipement adéquat? À ces deux interrogations, les réponses des responsables de notre sûreté tendent vers le positif. L'unité en question a suivi des formations très approfondies, assurées par des "pro" américains (style FBI), en techniques de repérage, traques de terroristes, arrestations, perquisitions et d'autres actions de reconnaissance, d'identification et de marquage d'objectifs islamistes. Selon des sources très bien informées, les éléments de cette brigade ont subi des séances soutenues de tirs d'armes à feu et autres techniques de désamorçage d'explosifs. Jeunes, dynamiques, forts (physiquement), les éléments de cette brigade sont dotés d'un matériel sophistiqué, propre à eux, dont ils se sont familiarisés lors de leur passage à l'Institut de police de Kénitra. Leur organisation ainsi que leur fonctionnement dépendent étroitement des différentes sûretés de Casablanca auxquelles ils sont affectés. Le tout sous la tutelle directe de la préfecture de police de la ville. Ils opèrent sur tout le territoire de Casablanca et font du renseignement leur ressource première et leur principal matériel du travail. Depuis plus d'une dizaine de jours, ils ne font pratiquement que cela: sillonner discrètement la ville afin d'identifier et de localiser les lieux de culte, les quartiers réputés abriter des “islamistes” (des no man's land comme Thomas et Sekouila…), ainsi que les autres secteurs stratégiques abritant les consulats et autres intérêts étrangers. Ils patrouillent en groupements, 14 groupes pour chaque sûreté de la ville, en quête de tout ce qui peut être utile en matière de renseignement. Un maximum de collecte d'informations. Restructuration de l'appareil sécuritaire Des informations pour se prémunir, des informations pour prévenir, des informations pour anticiper, des informations pour contrecarrer. Bref, des informations comme outil de sécurisation du territoire et de la population contre toute menace intégriste. En fait, au-delà de la sécurité des biens et des personnes, c'est la sécurisation de la démocratie, système politique par définition fragile, qui est en jeu. Il l'est encore plus dans un pays où de nouvelles doctrines aussi totalitaires qu'obscurantistes prônent la négation des libertés par la violence la plus abjecte. L'opinion publique garde toujours en mémoire les images de corps déchiquetés, de têtes arrachées et de membres éparpillés de victimes innocentes de ce 16 mai sanglant. Il a fallu donc agir, recruter, former, encadrer et déployer des unités spéciales composées de tout ce qu'il y a de meilleur dans le corps de la police. Une brigade plus active, moins statique, plus opérationnelle et totalement efficace en matière de neutralisation et de démantèlement des réseaux intégristes. “Les structures spécialisées, le Maroc en a toujours eu. Sauf que cette nouvelle unité constitue un nouvel arsenal qui renforcera le corps de police dans sa lutte contre le terrorisme”, confie un haut fonctionnaire de la DGSN. Et d'ajouter: “L'expérience pilote de Casablanca sera étendue à toutes les villes du pays qui seront, au fur et à mesure, dotées de pareilles brigades pour combattre l'extrémisme à la racine”. Pour rappel, les autorités marocaines ont pu mettre la main sur plus de 2100 intégristes depuis les attentats du 16 mai et prononcé, à peu près, 903 condamnations définitives dont 17 peines de mort. Aujourd'hui, la menace intégriste est encore persistante et les autorités publiques en sont conscientes. Les attentats du 16 mai 2003 n'ont été qu'un facteur déclencheur de cette refonte, de fond en comble, du système sécuritaire et sa restructuration avec de nouveaux moyens de bord, humains et matériels. La nomination du général Hamidou Laânigri à la tête de la DGSN en juillet 2003 s'est réalisée avec des objectifs à terme en vue de mettre en place une administration d'investigations et de sécurité qui fonctionne correctement, respecte ses prérogatives et honore sa mission. Un an après, les résultats commencent à tomber. La méthode Laânigri a donné les fruits escomptés. Et ce n'est là qu'un début. Au niveau de Casablanca, la préfecture de police s'est réorganisée, sur fond de décentralisation, et chaque sûreté préfectorale rend des comptes quotidiennement à la DGSN. Dans une interview accordée à la presse française en mai 2004, Hamidou Laânigri dira “qu'il a fallu redéployer l'appareil de la police pour reprendre en main les quelques quartiers de Casablanca laissés à l'abandon et qu'il faudra continuer sur la même lancée pour mettre hors d'état de nuire quelques groupuscules qui veulent porter atteinte à l'autorité de l'Etat”. A-t-on fait le nécessaire? Plutôt oui. Et le travail continue sans relâche. A ce jour, le bilan est édifiant en la matière. De nouveaux postes de police sont implantés partout dans la ville, une nouvelle unité de lutte contre le terrorisme est mise en place et l'on assiste de plus en plus à une meilleure coordination entre les différents services du dispositif sécuritaire. Le ratissage a effectivement été très large, dépassant le territoire national pour remonter les filières du terrorisme intégriste où des Marocains sont impliqués, en Europe, en Amérique et dans les pays du Golfe. Des demandes d'extradition des terroristes impliqués dans d'autres attentats à l'étranger (comme Benyaïch, Moussadek, Mzoudi…) ont été formulées par les autorités du pays pour pousser davantage les investigations policières sur les réseaux intégristes ainsi que leurs ramifications avec les différentes cellules démantelées au Maroc. En somme, et pour les plus hautes autorités du pays, c'est au niveau de la sécurité que la volonté de finir le travail est la plus urgente et la plus insistante. La tâche est immense, mais les hommes qui en ont la charge peuvent relever le défi.