Grande distribution Le ministère de l'Industrie, du commerce, de l'énergie et des mines vient de procéder à une enquête sectorielle relative au développement des grands magasins. Les résultats de cette enquête font ressortir que la grande distribution a de bonnes perspectives. Néanmoins, nonobstant ces potentialités, de nombreux facteurs continuent de peser sur le développement du secteur. Nul n'ignore l'importance du commerce dans l'activité économique d'une nation. De par sa contribution à la formation du PIB (38 % au Maroc), la création d'emplois et son rôle de “ mode ” entre le producteur et le consommateur. D'où l'intérêt de l'enquête menée par le MCI qui avait un double objectif : “disposer d'une base de données de certains indicateurs qui permettent de dégager la structure du secteur et mettre les bases d'un diagnostic périodique qui serait à même d'éclairer les opérateurs de manière significative sur l'évolution du secteur ”. Il était, en effet, très utile de procéder à ce type d'enquête. La mondialisation et la globalisation des marchés ainsi que l'accélération des mutations technologiques ont transformé le paysage commercial. La diversification de l'offre et l'innovation ou l'amélioration des produits ont provoqué la naissance d'un autre genre de commerce plus compatible avec le nouveau contexte mondial. Tout cela dans le but d'affermir la compétitivité du secteur et de mieux répondre aux besoins des consommateurs devenus plus exigeants en matière de qualité et de service. Du commerce traditionnel (souks et kissariats), le Maroc est entré dans l'ère de la grande distribution au début des années 90, suite à la libéralisation de l'économie nationale, politique menée depuis 1984. Il faut reconnaître que cette politique a donné des résultats positifs au niveau de l'inflation “puisque depuis cette date, le taux d'inflation moyen a varié entre 3 et 7 % alors qu'il se situait entre 10 et 12 % ”. Naissance de la grande distribution Le désengagement de l'Etat a été à l'origine de l'émergence de nouvelles formes de distribution (supermarchés, coopératives de consommation, etc…). Ce qui n'a pas manqué de transformer certains commerces de détail en petites et moyennes surfaces telles que l'alimentation et la confection. “Toutefois, ce n'est qu'à partir des années 90 que l'on va assister à l'émergence des grandes surfaces, notamment de grandes chaînes de distribution nationale ou à participation étrangère qui ont pénétré le marché national ”, souligne l'enquête du MCI. Ces grandes surfaces demeurent concentrées dans les villes de Casablanca et Rabat qui hébergent, à elles deux, 60 % du marché. Quant à la part de l'investissement étranger, l'enquête montre que la majorité des grandes surfaces spécialisées dans les domaines de l'électroménager, l'habillement ou l'ameublement, sont à 100 % à capitaux marocains. En revanche, les investisseurs étrangers contribuent pour une large part dans les chaînes de distribution à prédominance alimentaire. Il faut souligner, par ailleurs, que cette participation étrangère devrait connaître une augmentation sensible au cours des prochaines années du fait de la création d'une zone de libre-échange, envisagée par l'accord d'association avec l'Union européenne qui sera finalisé à l'horizon 2010. Dans cette perspective, de nombreuses entreprises nationales ont ou sont en train de créer des “joint-ventures” avec les groupes étrangers intéressés par le marché marocain. Cela s'explique par l'engouement de plus en plus avoué des investisseurs étrangers pour le secteur commercial national. Ce dernier demeure prédominé par l'alimentation. L'enquête du MCI explique cette tendance par : “l'évolution croissante de la consommation alimentaire, la variété des produits offerts par les supermarchés et hypermarchés, le rapport qualité / prix dû à un fort pouvoir de négociation avec les fournisseurs leur permettant d'obtenir des prix attractifs, les facilités de financement accordées…, la politique marketing “agressive” pratiquée avec parfois des espaces de publicité gratuits pour les fournisseurs qui les approvisionnent.” Quant au développement des grands magasins de commerce spécialisé, il serait attribué, en particulier, aux facilités de paiement, à la diversité des choix et au rapport qualité / prix. Malgré la contribution de la grande distribution à la croissance économique et la création d'un grand nombre d'emplois, ce développement continue d'être assujetti à de multiples entraves, parmi lesquelles l'enquête du MCI relève principalement : “manque d'infrastructure de base, la concurrence déloyale du secteur informel, la baisse des marges bénéficiaires, la multiplicité des intermédiaires et l'absence de personnel qualifié ”. Mais il n'en demeure pas moins que malgré l'avenir, apparemment prometteur selon l'enquête du MCI, il est légitime de s'interroger sur les perspectives du secteur et de savoir si le Maroc est en voie de transition vers une “société de consommation”, en égard à la faiblesse du pouvoir d'achat (19 % de la population vivent en dessous du seuil de la pauvreté, soit moins de 10 DH par jour). Aussi, est-il permis d'émettre des doutes sur les potentialités du commerce “ moderne ” à s'imposer définitivement à notre culture et à marginaliser le commerce traditionnel de proximité.