Bourita vient de confirmer que l'approche marocaine consistant à dissocier l'économique du diplomatique est aussi appliquée avec l'Afrique du Sud. Il invite clairement Pretoria à oeuvrer main dans la main pour une meilleure coopération Sud-Sud. Ceci s'inscrit dans le prolongement de la démarche adoptée par le souverain avec le Nigeria et l'Ethiopie, les deux autres géants anglophones africains, avec qui la brillantissime idée de faire ensemble du business win-win ayant commencé à assouplir les positions politiques. Cela prendra cinq ou dix ans, mais arrivera le jour où l'intérêt économique de ces peuples l'emportera sur un égarement politique vieux de plus de trois décennies. Bourita, s'exprimant sur un journal sud-africain, a utilisé la notion de «coopération économique» à trois reprises. Plus encore, il invite Pretoria à travailler avec Rabat sur un modèle d'émergence économique du continent. C'est du lourd, et cela ne pourrait pas être que des paroles en l'air. Il faut donc jeter ce pont entre les deux capitales de l'extrême nord et de l'extrême sud du continent, et cela ne serait possible, dans l'état actuel des relations, que par l'intermédiaire des hommes d'affaires et de la société civile. Rappelez-vous qu'il y a moins de deux années, le roi Mohammed VI a rencontré le président sud-africain de l'époque, Jacob Zuma, à Abidjan, en marge du sommet UA-UE, et l'optimisme avait régné au sein de la communauté des affaires, à telle enseigne qu'une grande banque avait manifesté son souhait de s'implanter à Johannesburg. C'est dire qu'en langage politique, l'impossible est exclu, et en raisonnement économique, l'homme d'affaires avisé est celui qui sait se montrer précurseur et visionnaire. Bourita savait bien pourquoi il devait surfer sur la fibre du business panafricain et de l'émergence économique du continent. Il n'en fallait que peu pour qu'il le hisse au rang de patriotisme africain.