C'est une affaire qui éclabousse le microcosme marrakchi. Un trafic de foncier public qui risque de tirer, dans son sillage, plusieurs responsables territoriaux et grands élus avec une détermination judiciaire sans équivoque. Ce dossier a éclaté grâce à la bienveillance d'une association locale de défense des deniers publics qui pointe du doigt de gros bonnets, mais aussi suite à une grande réactivité du procureur, appuyées par le feu vert du président du Parquet général du royaume. De source médiatique, les prévenus procédaient à la cession de foncier public à des individus à un prix dérisoire. On peut facilement imaginer la finalité de l'approche. Aujourd'hui, la BRPJ de la ville ocre a convoqué l'ancien wali, l'ancien directeur de l'agence urbaine (qui se trouve déjà derrière les barreaux pour corruption), l'ancien directeur du domaine public, le directeur du CRI et le maire en exercice. La présomption d'innocence étant intacte, il y a cependant lieu d'en déduire des faits. Marrakech n'en est pas à son premier scandale foncier. L'on se rappelle du Casino Saadi, en plein cœur du quartier huppé de l'Hivernage, cédé par le conseil communal, il y a une vingtaine d'années, au prix de 500 DH/m² alors que le prix réel lui était vingt fois supérieur! Ce dossier traîne malheureusement depuis quinze ans! Ce rappel nous renvoie directement à ce dossier aujourd'hui en instruction. Si nous louons l'ouverture d'une enquête avec de «grandes figures locales», il y a aussi lieu de rappeler l'importance du facteur temps dans l'instruction. Car il en va de la confiance du citoyen dans ses institutions, dont la justice. Or, ce qui est justement demandé dans ce dossier, c'est de lever le voile sur la vérité, toute la vérité, nonobstant les noms ou les fonctions des personnalités citées. C'est le point d'orgue de cette affaire et de bien d'autres, afin d'envoyer un message clair, net et précis: les deniers publics sont une ligne rouge à ne pas franchir, au risque de se faire coffrer. En espérant que le Parquet ne nous décevra pas !