Durant toute cette semaine, Rabat accueille le 19e congrès international des sociologues de langue française. Des centaines de sociologues, chercheurs et doctorants, en provenance de plusieurs pays francophones, sont invités à intervenir et réfléchir sur les différents moyens de « penser l'incertain » dans ce monde en perpétuelle transformation. « Penser l'incertain » est le thème du 19e congrès international des sociologues de langue française, organisé par l'AISLF. Tsunamis, guerres, crises financières, ou encore printemps arabe. Le monde est plein d'imprévus, d'incertitudes difficiles à prévoir à l'avance. D'origine naturelles, mais aussi de plus en plus humaines, ils viennent déstabiliser des sociétés qui ne s'y étaient pas préparées. Les centaines de sociologues réunis à Rabat depuis le 2 juillet, et jusqu'à la fin de la semaine, mettront les sciences sociales au service d'une réflexion sur cet incertain grandissant qui caractérise le monde. « Penser l'incertain » est en effet le thème du 19e congrès international des sociologues de langue française, organisé par l'AISLF (Association internationale des sociologues de langue française), et qui fait suite à celui qui s'est tenu en 2008 à Istanbul (Turquie). Sous toutes les facettes sociologiques... Durant ces journées, rien n'échappera à l'analyse de ces sociologues. Education, santé, travail, rapports sociaux de sexe,...L'ensemble des domaines de société seront passés au crible. « Si Descartes avait été sociologue, il aurait dit « Nous pensons donc nous sommes », lance André Petitat, président de l'AISLF pour encourager l'assistance dans leur mission hebdomadaire. « Si nous sommes tous là pour penser l'incertain, nous ne sommes pas certains de nos conclusions », poursuit-il. La certitude aujourd'hui, c'est donc qu'il y a une urgence ! A la fois financière, écologique, démographique, ainsi qu'au niveau des libertés et des droits humains. Les sociologues seront ainsi départagés durant cette semaine en 34 comités de recherche pour travailler sur chacune de ces questions. Incertains multiples L'incertain prend en effet plusieurs formes, comme le définit le président de l'AISLF. « Les évènements à risques ordinaires, qui sont statistiquement prévisibles, les évènements à risques peu identifiés, et dont les probabilités et l'ampleur sont inconnues (guerres, crises, tsunamis,...), ainsi que les évènements à risques mal connus, comme certains de nos jeux avec le patrimoine génétique et l'environnement ». Un clin d'œil à l'hôte marocain L'enjeu est d'autant plus important que la mondialisation globalise l'ensemble de ces évènements. Même si « l'idée d'une société mondiale centralisée est incompatible avec la pluralité des cultures. Il ne semble n'y avoir de place que pour des solutions hybrides, intermédiaires, » fait remarquer André Petitat. Le congrès réservera dans son programme une place à la sociologie au Maroc, avec une discussion autour de ce sujet aujourd'hui, mercredi. La jeunesse sera enfin récompensée, puisqu'un « prix du jeune sociologue » sera remis à l'un des participants méritants de cette semaine. Ils ont dit Abdelhafid Debbagh, secrétaire général du département de l'enseignement supérieur, de la formation des cadres et de la recherche scientifique :« Le choix de la thématique est plus que pertinent. S'intéresser aux mutations sociales que nos pays connaissent face aux incertitudes, aux aléas, et aux risques encourus. Il revient parfois à l'individu seul de les prendre en charge. La sociologie, en tant que branche scientifique, est essentielle pour aider à prévenir les éventuels risques sociaux qui se présentent. Des risques que nous partageons dans le village mondial dans lequel nous vivons. » Wail Benjelloun, président de l'Université Mohammed V-Agdal de Rabat : « Le congrès se tient pour la deuxième fois en Afrique du Nord, après la Tunisie. Toutes deux sont des terres d'Ibn Khaldoun, qui est selon certains, le fondateur de la sociologie avec son ouvrage « Al Moqaddima ». L'époque est incertaine par endroits dans notre région, une incertitude plane sur les économies de beaucoup de pays. Les sociologues, souvent entraînés à étudier les structures et les fonctions de diverses institutions, sont plus que jamais amenés à insister sur les facteurs de transformations que connaît le monde d'aujourd'hui. Ce congrès est une occasion pour inciter les chercheurs à entreprendre une réflexion sur les moyens qui permettront d'améliorer la gestion de ces transformations. » Cristina Robalo Cordeiro, directrice du bureau Maghreb de l'AUF (Agence universitaire de la francophonie) « La sociologie n'est pas une science de la fatalité. Le sujet du congrès n'est pas l'inéluctable mais l'incertain. J'y verrais plutôt une connotation positive. L'incertain dans une société humaine est un autre nom de la liberté. Si la réalité sociale est une réalité éminemment vivante, c'est qu'elle est non pas cet arrangement mécanique d'éléments préfabriqués, mais un jaillissement perpétuel de nouveautés. Rien n'est donc jamais joué d'avance. » * Tweet * * *