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Interview avec Karine Bechet Golovko : Retour sur les enjeux de l'escalade entre la Russie et l'Occident
Publié dans L'opinion le 04 - 10 - 2022

Contre-offensive ukrainienne, mobilisation partielle, annexion des régions du Donbass, menaces nucléaires, la guerre en Ukraine semble déboucher sur un nouvel épisode d'escalade entre la Russie et l'Occident. Karine Bechet Golovko, professeure invitée à l'Université d'Etat de Moscou, livre sa lecture. Entretien.
-L'Ukraine a réussi sa contre-offensive à Kharkiv et Kherson, et à Lyma, la Russie a réagi en annexant les régions sous son contrôle, est-ce un aveu d'échec ?
- Tout d'abord, sur le plan strictement militaire, la Russie n'a pas mis assez d'hommes sur le terrain, notamment dans la région de Kharkiv, pour maintenir le contrôle de la région en cas de contre-attaque. Plusieurs raisons expliquent ce que nous constatons sur le terrain, la Russie a fait le choix de ne pas décréter la mobilisation générale de sorte à ce que la vie continue son cours normal. Ceci fait que l'Armée manque de ressources humaines.
Deuxièmement, en scrutant attentivement le déroulement des opérations durant l'été et jusqu'à présent, on se rend aussitôt compte que la Russie est dans une logique de stabilisation de front, comme si elle entend s'arrêter un moment dans le but de préserver les acquis réalisés jusqu'à maintenant. Autrement dit, on a l'impression que la Russie laisse entendre qu'elle a pris les territoires qu'elle ciblait pour sécuriser la zone du Donbass et la Crimée. Raison pour laquelle elle n'a peut-être pas envie d'aller plus loin.
- Plusieurs observateurs parlent d'échec, qu'en pensez-vous ?
- Si la Russie a eu autant de mal à conquérir l'Ukraine comme elle l'entendait avant le 24 février, c'est à cause de cette sorte de stratégie de demi-mesures et de la confusion qui ont marqué son action. Souvenez- vous qu'au début du conflit, l'Armée a lancé son offensive éclair pour prendre le contrôle de Kiev, avant de ralentir son avancée en commençant à négocier. C'était une défaite politique.
À mon avis, la Russie a d'autant plus de peine qu'elle manque d'objectifs clairs, sachant qu'on parlait de démilitarisation et dénazification. Des objectifs pareils demeurent flous, sachant que Moscou a renoncé à la conquête de Kiev tout en disant qu'elle veut toujours dénazifier l'Ukraine. Comment peut-elle le faire sans changer le régime.
En définitive, j'estime que la Russie est confrontée à ses propres atermoiements et à ses hésitations. Je rappelle que dès le départ, elle ne voulait pas s'engager dans cette lutte puisqu'elle veillait à ce que les accords de Minsk soient appliqués à la lettre. Ces accords permettaient que le territoire du Donbass reste partie intégrante de l'Ukraine avec un statut d'autonomie avancée.

Actuellement, nous assistons à une stabilisation du front"
-Après le succès de l'Armée ukrainienne, pensez-vous que la Russie risque de perdre le contrôle des territoires dont elle a annoncé l'annexion ?
- Pour le moment, la majeure partie du territoire du Donbass est quasiment contrôlée. Ce qui pose problème pour les russes ce sont les régions reprises par les forces ukrainiennes qui contiennent des populations passives et qui ne sont pas autant engagées dans la lutte contre l'autorité de Kiev que celles de Donetsk et Lougansk. Ceci n'empêche qu'elles sont pour l'appartenance à la Russie.
-Est ce que l'Armée russe manque de renseignements contrairement à l'Ukraine qui bénéficie de l'appui efficace de la CIA qui lui donne une visibilité en temps réel de la situation sur le front ?
- D'abord, permettez-moi de dire que l'Armée ukrainienne n'est qu'une chair à canon qui ne décide de rien, toutes les opérations, dont les contre-offensives, sont conçues et planifiées à Washington. A mon avis, le renseignement a toujours été l'un des points forts de la Russie comme au temps de l'Union soviétique. Les dysfonctionnements se situent plus dans la décision politique que dans l'information qui remonte bien évidemment en temps réel. Donc, c'est la prise de décision qui pose problème.
-Si l'Ukraine continue de mener des contre-offensives aussi fulgurantes, est ce que la Russie pourrait se résigner à négocier d'égal à égal ?
- Les dirigeants russes, dont Poutine, Medvedev, Sergei Shoigu et les autres savent très bien qu'ils ne peuvent pas reculer vu qu'ils ont une idée de ce qui leur arrivera en cas de perte de la guerre. On parle en Occident d'un procès et de jugement pour crimes de guerre et crimes d'agression, etc... Donc, il n'est pas question de faire marche arrière, d'abord par instinct, en plus parce que le peuple russe ne pardonnera jamais que la Russie sorte perdante de la guerre avec toutes les conséquences que cela entraînera.
Je suis personnellement convaincue que, théoriquement, la Russie est en mesure de gagner la guerre au Donbass et les régions russophones parce qu'elle est dans sa terre. Certes, l'Ukraine a remporté quelques batailles, mais cela ne veut pas dire qu'elle est en mesure de gagner la guerre.
Actuellement, nous assistons à une stabilisation du front, selon les rapports des correspondants sur place. Je me demande combien de temps l'Ukraine pourrait se permettre de fournir des hommes pour poursuivre la lutte, sachant qu'il y a eu plus de 13.000 morts. Je me demande aussi combien de temps l'Occident va-t-il supporter les conséquences de son soutien indéfectible à l'Ukraine.

Certes, l'Ukraine a remporté quelques batailles, mais cela ne veut pas dire qu'elle est en mesure de gagner la guerre".
-En Russie, les partisans de la guerre sont-ils déçus ?
- Il y a toujours eu en Russie une opposition qui reproche les revers subis par les troupes russes. De son côté, le clan patriotique demande à revoir les objectifs et insiste pour qu'on change de vocable préférant parler de guerre plutôt que d'opération spéciale, sans être pour la mobilisation générale.
- Vladimir Poutine a lancé la mobilisation partielle, comment les Russes ont-ils réagi, sont-ils prêts à porter les armes ?
- Au début du conflit, la Russie s'est gardée de mobiliser ses forces à grande échelle, sachant que la population n'est pas assez préparée et que le service militaire ne dure qu'un an. Pour l'instant, la mobilisation de masse n'est pas à l'ordre du jour puisqu'il s'agit d'une guerre qui durera peut-être longtemps.
- A votre avis, la guerre durera au- delà de 2022 ?
- À mon avis, ça va prendre sûrement plus de temps que prévu, je pense que ça pourrait même prendre des années. Combien d'années ? Je n'en ai strictement aucune idée. Il est clair que les pays occidentaux entendent aller jusqu'au bout dans leur soutien à l'Ukraine, sachant que les discussions entre Vladimir Poutine et les dirigeants occidentaux tournent au dialogue de sourds. Maintenant, je constate que la Russie est dans une stratégie de réaction plutôt que dans un esprit de prise d'initiative. A mon avis c'est une stratégie perdante.
-Le président russe a maintes fois promis de réagir en cas d'intervention des pays occidentaux. Maintenant que les pays de l'OTAN soutiennent ostensiblement l'Ukraine avec une aide gigantesque, peut-on dire qu'ils sont devenus des co-belligérants?
- Il est évident que l'escalade et la mondialisation du conflit est un choix difficile pour n'importe quel dirigeant. Personne ne veut se voir imputer la responsabilité de mondialiser le conflit. Entrer dans une confrontation frontale avec l'OTAN est un choix extrêmement difficile. Mais force est de constater que le soutien militaire de l'OTAN à l'Ukraine est énorme.
Ceci dit, j'estime qu'il est important de mesurer le discours et les paroles prononcées publiquement. Pour l'instant, nous sommes loin d'un duel russo-otanien parce que la Russie essaye de saboter les livraisons d'armes et cible les dépôts et les camps d'entraînement des mercenaires et les bataillons de la légion étrangère.

Les va-t'en-guerre préfèrent parler de guerre plutôt que d'opération spéciale".
Propos recueillis par Anass MACHLOUKH
Une guerre qui tient le monde en haleine

Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, l'Armée russe n'a pas été autant en difficulté qu'actuellement. Après la déroute de Kiev, les Russes ont perdu plus de 6000 kilomètres de terre qu'ils contrôlaient auparavant dans les régions de Kharkov et Kherson suite à des contre-offensives ukrainiennes préparées conjointement avec les Etats-Unis.
Les russes ont subi un nouveau revers après la prise de Lyman par l'Armée de Kiev comme l'a annoncé le président Volodimir Zelensky. Pour sa part, la Russie a annoncé l'annexion de quatre régions, à savoir Lougansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson après les référendums qu'elle avait organisés et dont les résultats n'ont pas été reconnus par la communauté internationale.
Sur le plan militaire, l'Armée russe peine à atteindre les objectifs initiaux de son "opération spéciale", ce qui a poussé Moscou à préserver ses acquis en organisant des référendums dans les régions sous son contrôle. Beaucoup s'interrogent sur le marasme de l'héritière de la glorieuse Armée rouge dans un pays largement très inférieur en termes de rapport de force. Ces difficultés seraient d'origine plus politique que militaire, selon Karine Bechet Golovko.


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