Le Maroc vit actuellement un tournant historique dans le mode de gouvernance des territoires. Le projet de la « régionalisation avancée » est actuellement en débat. Il a été lancé par SM le Roi le 3 janvier 2010 à Marrakech. Le Souverain entend par cette initiative la rénovation et la modernisation des structures du Royaume avec un nouveau modèle gouvernemental spécifiquement marocain. Toutes les régions du pays vont bénéficier de cette dynamique de régionalisation avancée. En d'autres termes, il s'agit d'instaurer un équilibre entre les régions. Un équilibre qui fera jouer les synergies et la solidarité entre régions proches. Pour assurer la réussite de ce nouveau chantier, le Souverain a installé une Commission Consultative de Régionalisation (CCR) dirigée par Omar Azziman (ancien ministre de la Justice et actuel ambassadeur du Maroc à Madrid) et composée de 21 membres. Il s'agit d'une commission d'experts qui doit élaborer une vision de la nouvelle région en revoyant tous les paramètres : découpage, attributions, pouvoirs de substitution, etc. Par sa spécialité, cette commission ne sera pas soumise à des contraintes politiques ou sécuritaires. Mais ce travail fera l'objet d'une large concertation avec tous les acteurs concernés par la Région. « Nous tenons tout d'abord à saluer la pertinence du contenu du rapport de la commission consultative de la régionalisation que Nous avions chargée, le 03 janvier de l'an passé, d'élaborer une conception générale d'un modèle marocain de régionalisation avancée. A cet égard, Nous rendons hommage à la commission, son président et ses membres, pour la consistance et le sérieux du travail accompli. Nous saluons, au même titre, la contribution constructive que les organisations politiques, syndicales et associatives ont apportée à ce chantier fondateur », avait dit le Souverain dans Son discours du 9 mars. « La régionalisation avancée apportera une contribution déterminante au développement économique et social du pays, à travers la valorisation des potentialités et des ressources propres à chaque région, la mobilisation des différents acteurs locaux, la participation à l'élaboration et à la mise en oeuvre des grands projets structurants et le renforcement de l'attractivité des régions », souligne la CCR dans son rapport, soumis au Souverain. La Commission recommande ainsi 12 régions au lieu de 16 actuellement (voir ci-dessous les 12 régions proposées). Objectif : faire un équilibre entre les régions. « Nous avons pu constater que le Maroc continue à être marqué par la persistance de réelles inégalités régionales. La répartition de la richesse par région se caractérise par une forte concentration sur le littoral, de Tanger à Agadir (le Grand Casablanca, Rabat-Salé-Zemmour-Zaër, Souss-Massa-Drâa, Tanger-Tétouan et Marrakech-Tensift-Al Haouz). Au plan social, ces mêmes inégalités touchent les secteurs de l'éducation, de la santé et de l'accès aux services de base (l'eau potable, l'électricité et le logement) », soulève-t-on de même source. Le projet de régionalisation avancée s'assigne comme objectif fondamental et prioritaire : la mise à niveau sociale des régions. En effet, lit-on dans le rapport de la Commission, une réforme structurante de cette importance ne pourrait susciter la pleine adhésion des populations que si elles ressentent dans des délais raisonnables une amélioration significative de leurs conditions de vie. Dans cet esprit, une approche d'évaluation des besoins pour résorber les déficits majeurs dans la santé, l'éducation, les infrastructures routières, l'eau potable, l'électricité et le logement social, a été effectuée. Les secteurs ainsi ciblés sont en lien direct avec le développement humain et recoupent dans une large mesure les compétences qui seront dévolues aux régions dans le cadre de cette réforme. La quantification menée sur la base de deux scénarios a permis d'aboutir à l'estimation d'une enveloppe se situant dans une fourchette de 128 à 215 milliards de dirhams. Ces moyens financiers devraient permettre, d'une part, la généralisation de l'accès à l'eau potable, à l'électricité et l'éradication des bidonvilles et de l'habitat insalubre, et, d'autre part, pour les secteurs de la santé, de l'éducation et des infrastructures routières, soit une convergence des régions vers la moyenne nationale (premier scénario), soit un ajustement aux standards nationaux et internationaux en la matière (deuxième scénario). En affirmant que le système de mise à niveau ne doit pas être conçu comme un programme d'assistanat permanent, mais un appui permettant à terme aux régions de remédier elles-mêmes à leurs déficits, la commission suggère que la mise à niveau soit entreprise dans un horizon de deux mandatures, délai qui n'est ni trop long pour que les populations ne perdent pas confiance dans ce projet de réforme, ni trop court pour, d'une part, ne pas accentuer les pressions au niveau des ressources de l'Etat et s'ajuster aux capacités d'accompagnement des nouvelles structures régionales, d'autre part. Pour le même souci, elle recommande à ce que l'inscription dans la loi des montants affectés à ce programme permettra une programmation pluriannuelle, un suivi et une évaluation adéquats. A cet effet, un Fonds de mise à niveau devra être créé, et dont les critères de répartition et d'éligibilité seront définis par une commission ad hoc. Elle recommande également à ce que la mise en œuvre soit conduite en s'ajustant aux spécificités de chaque région. Au volet des ressources, la CCR recommande, entre autres, de retenir le principe que tout transfert de compétence aux régions doit s'accompagner des ressources y afférentes et que ce principe soit consacré par la loi et qu'une commission spécialisée veille à la définition précise aussi bien des compétences que des ressources. Autre recommandation importante de la CCR : les régions devraient être dotées de ressources additionnelles significatives dès le lancement du chantier de la réforme régionale. A cette fin, la CCR a procédé à une quantification qui a abouti à une enveloppe estimée à 8 milliards de dirhams dont la source sera alimentée à partir d'une redistribution des ressources entre l'Etat et les régions. La CCR recommande, par ailleurs, que le projet de régionalisation avancée devra consacrer le principe de solidarité entre les régions dans le souci de contribuer à l'atténuation des effets liés à la concentration de la richesse, au retard de développement, à la diversité géographique ainsi qu'aux particularités démographiques caractérisant les régions. Dans ce sens, la CCR recommande, entre autres, le maintien du système de transfert actuel de l'Etat vers les collectivités locales avec un renforcement des effets péréquater équitables. Dans cette réforme de la régionalisation, le secteur privé est lui-aussi appelé à y contribuer. « Dans le cadre de la régionalisation avancée, le secteur privé est appelé à jouer un rôle déterminant en matière de valorisation des potentiels et de création des richesses », souligne la CCR, estimant que « plusieurs contraintes structurelles au développement du secteur devront être desserrées, et ce, par l'amélioration, au niveau régional, de l'environnement des affaires et le renforcement des partenariats public-privé ». Autre suggestion à souligner : « procéder à l'instauration d'un système d'information statistique régional en tant que sous-système du SNIS, en vue de répondre aux multiples besoins sans cesse croissants liés aux nouvelles dynamiques de développement économique et social ». D'autre part, le projet de réforme de la loi organique des finances devrait intégrer le projet de la régionalisation avancée en introduisant la dimension régionale dans la présentation du budget de l'Etat. De même, la commission souligne la nécessité d'adapter le cadre régissant les finances des régions aux nouvelles dispositions de la loi organique des finances. A note que ce projet de « régionalisation avancée » fera l'objet d'un référendum. Les 12 régions proposées 1- Tanger-Tétouan 2- Orient et Rif 3- Fès et Meknès 4- Rabat-Salé-Kénitra 5- Béni Mellal-Khénifra 6- Casablanca- Settat 7- Marrakech- Safi 8- Drâa-Tafilalet 9- Souss-Massa 10- Guelmim-Oued Noum 11- Laâyoune-Saguia Al Hamra 12- Dakhla-Oued Eddahab