Face à la forte concurrence des compagnies aériennes mondiales, Royal Air Maroc s'apprête à jouer un rôle de premier plan dans les grands événements mondiaux à venir avec de fortes ambitions. Cependant, les griefs ne manquent pas, au contraire, ils s'accumulent notamment sur la qualité de ses services et la cherté de ses billets, notamment pour la diaspora marocaine. Paradoxalement, c'est au moment où Royal Air Maroc (RAM) entend renforcer sa flotte et moderniser son offre pour répondre aux exigences du transport aérien international, que la contestation monte contre ses pratiques tarifaires. En première ligne, les Marocains résidant à l'étranger (MRE), nombreux à dénoncer une flambée des prix qui compromet leur retour au pays, en particulier durant la période estivale. Le sujet a récemment pris une tournure politique avec l'intervention remarquée de la députée Fatima Kachouti à la Chambre des représentants. Au cours d'une séance de questions orales, l'élue a rappelé la promesse faite en début d'année par le chef du gouvernement M. Aziz Akhannouch, selon laquelle les billets d'avion pour la diaspora devaient flotter entre 300 et 600 dirhams – l'équivalent de 28 à 55 euros – pour les vols vers le Maroc cet été. Dans les faits, les tarifs affichés sur les plateformes de réservation dépassent souvent dix fois ce montant. À l'appui de cette critique, de nombreux témoignages circulent sur les réseaux sociaux. Des familles dénoncent des prix « indécents », parfois supérieurs à 600 euros pour un aller simple au départ de villes européennes vers Casablanca ou Marrakech. Pour beaucoup, le voyage annuel au Maroc – moment de retrouvailles, de mémoire et d'attachement – devient un luxe inaccessible. Le sentiment d'abandon gagne du terrain, alimenté par la conviction que la promesse gouvernementale n'a pas été suivie d'effets concrets. Lire aussi : Aéronautique : Boeing consolide sa présence malgré les velléités de diversification de la RAM Face à l'indignation, le ministre du Transport et de la Logistique, M. Abdessamad Kayouh, s'est voulu rassurant, tout en soulignant les limites de l'action publique. « Le gouvernement n'a aucune autorité sur les prix des billets d'avion », a-t-il déclaré. Depuis la libéralisation du ciel marocain en 2006, les tarifs sont fixés librement, en fonction de l'offre et de la demande. Il a toutefois invité les voyageurs à réserver très en amont afin de bénéficier de prix plus compétitifs – une réponse jugée largement insuffisante par l'élue et une partie de l'opinion. Pour la députée Kachouti, l'enjeu dépasse les logiques de marché. Il s'agit d'un lien vital entre le Royaume et sa communauté expatriée. « Ce n'est pas qu'une question de prix, c'est une question de considération et de lien national », a-t-elle martelé. À ses yeux, l'Etat ne peut se contenter de renvoyer la balle aux compagnies, sans prendre de mesures pour encadrer ou inciter à une politique tarifaire plus équitable. Un service à bord loin des standards internationaux ? Les critiques ne s'arrêtent pas aux prix. De nombreux passagers pointent également la qualité inégale des prestations offertes par Royal Air Maroc, notamment sur les vols moyen-courriers reliant l'Europe au Maroc. Retards fréquents, repas de bord jugés médiocres, personnel de cabine parfois peu attentif, conditions de remboursement difficiles : les griefs abondent. Si certains saluent les efforts de la compagnie pour moderniser sa flotte et intégrer de nouveaux appareils, ils regrettent que le service client ne suive pas la même dynamique de progrès. Dans les comparatifs internationaux, la RAM peine encore à rivaliser avec les grandes compagnies du Golfe ou même certaines low-cost européennes sur des critères de confort, de ponctualité ou de rapport qualité-prix. Or, avec la Coupe d'Afrique des Nations 2025 puis la Coupe du monde 2030, le transport aérien marocain se prépare à un stress logistique majeur. La capacité de la RAM à absorber cette demande tout en répondant à des standards internationaux devient cruciale. Consciente des attentes, la RAM a entamé un plan ambitieux de transformation. Le renforcement de la flotte, avec l'acquisition d'appareils de nouvelle génération, s'inscrit dans une logique de repositionnement stratégique. Objectif : faire de la compagnie un hub africain performant, capable de répondre aux flux touristiques, économiques et diplomatiques qui convergeront vers le Maroc dans les années à venir. Dans cette perspective, la compagnie nationale devra également réussir sa mue commerciale et relationnelle. La confiance des passagers – en particulier ceux issus de la diaspora – constitue un socle indispensable pour asseoir son développement. Pour l'heure, ce lien apparaît fragilisé, miné par une perception d'iniquité et une communication souvent jugée défaillante.