À Casablanca-Settat, la gouvernance locale est fragilisée par la marginalisation systématique de la police administrative communale, pourtant essentielle pour réguler l'urbanisme, l'hygiène et la sécurité publique. Un rapport de la Cour régionale des comptes de septembre 2025 souligne que les obstacles politiques et administratifs entravent l'efficacité de ce corps malgré ses moyens modernes et son professionnalisme. La police administrative communale, pilier fondamental de la gouvernance locale et garant de la régulation urbaine et sanitaire, se trouve dans une situation critique dans la région de Casablanca-Settat. Un rapport de la Cour régionale des comptes, rendu public en septembre 2025, a mis en lumière un phénomène préoccupant : la marginalisation systématique de ce corps par certains présidents de communes et d'arrondissements, fragilisant ainsi l'efficacité et la crédibilité de cette institution clé au niveau local. Créée dans un cadre légal strict régi principalement par la loi organique n° 113.14 relative aux communes, notamment l'article 100 encadrant la police administrative, la police communale joue un rôle fondamental dans la vie quotidienne des habitants. Ses missions couvrent des domaines sensibles et essentiels comme l'hygiène, la propreté, la sécurité publique, le contrôle de l'occupation du domaine public, la gestion des infractions d'urbanisme, et la prise en charge des plaintes citoyennes. Dans la métropole économique de Casablanca, la police administrative communale compte environ 150 agents, répartis dans les seize arrondissements, sous la supervision des présidents d'arrondissements et de la commune. Ces agents sont équipés d'outils modernes — uniformes, portables, tablettes connectées, véhicules de fonction — pour assurer des contrôles efficaces et mettre en œuvre au mieux les décisions administratives et réglementaires. Un rapport de la Cour des comptes qui tire la sonnette d'alarme Le rapport de la Cour régionale des comptes de Casablanca-Settat dénonce un phénomène de marginalisation forte chez plus de 19 présidents d'arrondissements et de communes. Il établit que ces élus minent le rôle de la police administrative en dénigrant ses agents, en ignorant ou en écartant systématiquement leurs procès-verbaux. Ces pratiques freinent les poursuites des infractions constatées, car moins d'un tiers de ces procès-verbaux aboutirait à des décisions d'avertissement, et quasiment aucune sanction de fermeture n'est appliquée malgré les infractions répétées. Lire aussi : L'industrie de la carrosserie automobile atteint 65 % d'intégration locale Cette attitude hostile apparaît également motivée par des calculs électoraux, où l'application stricte des règlements pourrait être perçue comme nuisible pour certains intérêts politiques locaux. À Maârif, arrondissement emblématique de Casablanca, des campagnes organisées et rapports instrumentalisés viseraient même à écarter les agents, réduisant encore leurs marges d'action et l'autorité du corps sur le terrain. Cette marginalisation a des conséquences lourdes. La police administrative communale, devant être la première ligne de régulation des comportements contraires aux normes établies, voit son efficacité compromise. L'absence de sanctions et la faiblesse des contrôles favorisent les infractions en matière d'hygiène, d'urbanisme, d'occupation non réglementaire de l'espace public, nuisant directement à la qualité de vie et à la sécurité des citoyens. La faiblesse du corps affecte aussi la gestion coordonnée des plaintes et réclamations des habitants, ce qui contribue à une fracture grandissante entre les populations et les institutions locales, alimentée par un déficit de confiance. Dans un contexte urbain où les défis liés à la propreté, à la sécurité et à l'organisation spatiale se complexifient du fait de la croissance démographique et des mutations économiques, le rôle d'une police administrative communale forte et respectée est plus que jamais stratégique. Un paradoxe face à des moyens modernes Le décalage est d'autant plus flagrant que la police administrative communale est dotée d'équipements modernes et d'une formation poussée des agents, qui disposent d'outils numériques innovants facilitant le contrôle en temps réel et la gestion des données sur les infractions et les contrevenants. Cette modernisation est accompagnée d'une tentative d'extension progressive des compétences sur toute la ville depuis 2019, preuve de la volonté institutionnelle d'asseoir un contrôle local efficace. Malgré cet arsenal technique et opérationnel, l'autorité et l'efficacité de la police administrative sont gravement affaiblies par des obstacles politiques et administratifs provoqués au plus haut niveau des présidences de communes et arrondissements, créant une forme d'autonomie entravée qui ne profite ni à la collectivité ni à la gouvernance urbaine. Le rapport de la Cour des comptes ne se limite pas à pointer les dysfonctionnements, mais appelle aussi à une reconnaissance plus forte de la police administrative communale et à la réorganisation de ses relations avec les autorités locales. Il incite les présidents de communes et d'arrondissements à réaffirmer la place de ce corps, en valorisant son travail et en garantissant la prise en compte de ses procès-verbaux dans la chaîne décisionnelle.