OSTREICULTURE. Une bactérie mutante affecte dangereusement une bonne partie de la production ostréicole au Maroc et des opérateurs s'inquiètent pour la pérennité de la filière. L'huître marocaine seraitelle en péril? A en juger par le vent d'inquiétude qui souffle en ce moment sur les lagunes de Dakhla, Oualidia et Mdiq, la filière ostréicole nationale connaît, en effet, une phase critique. Les éleveurs qui développent des exploitations marines sur ces trois sites, les plus importants du Royaume, tentent d'éviter la psychose. C'est le cas notamment de Mohamed Saïdi, opérateur ostréicole connu à Oualidia et à Dakhla, pour qui «le business des huîtres ne connaît pas de problèmes notables qui pourraient en menacer le développement». La menace à l'amont de cette activité est pourtant grave. En cause: l'écosystème naturel, qui subit depuis quelque temps des variations d'autant plus dangereuses qu'elles menacent la pérennité même de la filière. Tous les professionnels de la filière ne le disent pas, mais les prémices du mal remontent à 2008 déjà, année où l'on avait constaté un phénomène de mortalité d'huîtres tout à fait anormale en Europe, principal fournisseur de matière première pour les fermes ostréicoles marocaines. Quid des normes zoo-sanitaire? Cette matière première, c'est ce que les opérateurs de la filière appellent des “naissains”, larves destinées à l'élevage industriel dans les “écloseries”. Les autorités marocaines exigent en principe des certificats attestant que les naissains importés sont indemnes de toute affection virale. Pourtant, en dépit des certificats délivrés aux importateurs, ces derniers ont constaté des taux de mortalité allant jusqu'à 75%, alors que la norme admise ne doit pas dépasser les 15%... Pour des raisons bizarrement inexpliquées, un virus (dit herpès marin), présent dans les coquilles des huîtres, a muté et sa variante s'est révélée plus dangereuse que la souche d'origine. Aujourd'hui, la mutation semble avoir atteint un seuil critique dans l'écosystème de Dakhla. «Le processus de contamination est très rapide car six heures environ suffisent à affecter l'intégrité biologique de l'huître», commente Rachid Kandy, dirigeant de Cultimer, entreprise d'élevage ostréicole de Dakhla et vice-président de l'Association marocaine d'Aquaculture (AMA), groupement fédérant les industriels du secteur. Pour ces fermiers ostréicoles, le malaise ne s'arrange pas avec les déficiences structurelles de la filière. On est loin, en effet, des 110.000 tonnes d'huîtres commercialisées en France. A peine produit-on entre 300 et 400 tonnes au niveau national. Le développement reste encore à venir, mais à condition que des règles zoo-sanitaires strictes soient établies. C'est en principe le travail -complémentaire- de l'Office national de Sécurité sanitaire des Produits alimentaires (ONSSA) et de l'Institut national de la Recherche halieutique (INRH).