Il y a de cela quelques mois, une jeune femme s'est vue refuser son visa touriste. L'ambassade des Emirats arabes unis au Maroc aurait refusé sous prétexte que la jeune femme de 24 ans est célibataire, de moins de 30 ans et non accompagnée. Une jeune femme figure de la «Marocaine» assimilée au stigmate de prostitution. La référence à la sexualité réelle ou supposée des femmes voyageant seules leur attribue des significations tarifées ou «libres» qui la transforme en un stigmate connu par l'ensemble des Emiratis et des Marocains. Cette culture de la discrimination de la femme marocaine est aussi due aux déferlements de haine que ces femmes marocaines subissent de la part de certains pays arabes. Parmi les principaux, la «campagne anti-Marocaines», «voleuses de maris nationaux», que des Saoudiennes menaient en 2016. Mais également les mobilisations autour d'une série koweïtienne sur «les Marocaines» suscitait la colère de Marocains sur les réseaux sociaux et qui a été suivie d'excuses officielles présentées par le ministre koweïtien des Affaires étrangères en 2010. Cette discrimination stéréotypée, Meryem*, 24 ans, l'a vécu en novembre 2021, avant même de poser le pied aux Emirats arabes unis ou elle devait faire une escale. Témoignage : «Je voulais organiser un voyage touristique avec mes amis pour partir en Inde, plus précisément à Mumbai. Mes amis hommes, eux, partaient pour le business. J'ai d'abord demandé le visa indien à l'ambassade d'Inde au Maroc. Je l'ai récupéré le lendemain sans aucune difficulté. Le parcours de mon voyage m'obligeait à faire une escale d'une nuit à Dubaï. J'ai donc dû demander un visa touristique à l'ambassade des Emirats arabes unis qui me l'a automatiquement refusé. Cependant, mes amis ont eu leurs visas sans encombre. Le motif qui m'a été présenté était que j'étais la seule femme marocaine, célibataire de moins de 30 ans du groupe. Et comme plusieurs autres femmes, j'ai été victime d'une discrimination du stéréotype de la 'prostituée'.» Trangresser des lois régressives Toutefois, ce processus de refoulement des jeunes femmes marocaines ne les empêche pas d'atteindre leurs objectifs touristiques fixés avant leur départ du Maroc. Pour sa part, Meryem* a dû faire appel à un subterfuge pour contourner cette discrimination. La jeune femme a donc dû falsifier des documents pour pouvoir entrer sur le territoire émirati pour seulement quelques heures. «Après avoir été refusée, j'ai effectué une seconde demande de visa qui m'a été accordée grâce à un ami qui m'a déclarée comme employée dans sa société. J'étais considérée comme businesswoman, j'avais un donc un tuteur, et là, c'était accordé. Mais je n'ai pu avoir qu'une seule entrée, pour l'aller ou pour mon retour au Maroc.» Ce genre de refoulement est assez répandu dans les pays arabes. En effet, en décembre 2021, une ressortissante marocaine a été interdite d'embarquer pour la Jordanie. La jeune femme devait prendre l'avion pour Amman, mais étant célibataire, elle a été refoulée. Si ces Marocaines n'étaient pas à la fois femmes, étrangères, parties sans tuteur homme, n'étaient pas célibataires, elles ne seraient pas stigmatisées et elles ne seraient pas assimilées à des «prostituées». Cette stigmatisation révèle à la fois d'une volonté de contrôle des femmes et de la résistance louable de ces dernières. Heureusement, la parole se libère sur les réseaux sociaux. De nombreuses activistes tentent de recueillir des témoignages de femmes ayant été discriminées, pour mieux combattre ces inégalités. * Le prénom a été changé pour préserver sa vie privée.