Gigantesque chantier à ciel ouvert : Casablanca a hérité des programmes de développement les plus ambitieux, et des ratages les plus flagrants. Si l'expansion vertigineuse que connaît la métropole y est pour quelque chose, la gestion humaine de la ville aussi laisse grandement à désirer. Les sessions chaotiques du Conseil de la ville donnent un large aperçu sur la façon dont les décisions sont prises au sein de cette assemblée censée tirer les ficelles du développement. Résultat : sur l'ensemble des projets structurants dans lesquels la ville est engagée, beaucoup accusent un retard considérable. Par ailleurs, la ville elle-même fonctionne sans réel plan d'aménagement urbain depuis plus de 20 ans. Ce qui explique en grande partie la situation anarchique dans laquelle se trouve Casablanca aujourd'hui. En parallèle, il y a la gestion du quotidien des Casablancais. Les transports Les transports sont une des grandes plaies dont souffre la métropole. Les besoins en déplacement ont décuplé ces dernières années, notamment à la lumière de la poussée démographique enregistrée au niveau de plusieurs arrondissements et qui est favorisée par un exode démesuré. Il est à citer en ce sens la province de Nouaceur et ses communes qui enregistrent une poussée démographique pulvérisant les records nationaux (près de 12%, contre une moyenne nationale de moins de 2%). Certes, des efforts ont été enregistrés sur ce volet précis, à l'image de la mise sur les rails de la première ligne de tramway, mais il faut attendre la mise en place des autres projets (métro aérien, RER, etc.) pour répondre aux besoins réels de déplacements massifs enregistrés principalement dans les arrondissements et communes périphériques. L'assainissement L'assainissement est également à considérer comme un point noir dans le Casablanca d'aujourd'hui. Avec un taux de raccordement de 45% des foyers au réseau d'assainissement liquide, la métropole est à la traîne comparativement aux principales villes du pays. Dans un contexte similaire, l'évacuation des eaux pluviales est aussi problématique à Casablanca. Les inondations qui avaient paralysé la ville en 2010 sont toujours présentes à l'esprit. Il est à rappeler en ce sens cette menace qui pèse sur la ville, l'oued Bouskoura en l'occurrence. La menace réside dans le fait que la ville est bâtie sur le lit naturel de l'oued. Un projet d'envergure destiné à protéger la métropole des crues de l'oued Bouskoura a été pensé, mais tarde à voir le jour. Il s'agit du « Super Collecteur Ouest » (SCO), tunnel prenant source au niveau de la route El Jadida et débouchant en mer sur une longueur d'environ 7 km et une profondeur moyenne de 20 m. Le SCO est dimensionné pour permettre un débit de 100 m3/s sans se mettre en charge, à une vitesse d'écoulement voisine de 7 m/s. Le tracé de cet ouvrage se développe exclusivement sous les grandes artères du secteur ouest du périmètre urbain de Casablanca et rejoint la mer à proximité de Sidi Abderrahman. Souvent évoqué lors des sessions du Conseil de la ville, cet ouvrage éminemment important ne semble pas être plus qu'un sujet de discussion. Les déchets Casablanca est aussi une ville qui produit près de 3 000 tonnes de déchets ménagers par jour. En dépit de l'existence de trois gestionnaires délégués pour la collecte, les amoncellements de déchets n'épargnent presque aucun quartier. Les rapports entre l'autorité délégante et les délégataires sont souvent tendus, les dissensions au sein du Conseil de la ville aidant, chose qui impacte négativement la qualité du service. Les Casablancais prennent leur mal en patience, en attendant de voir ce que va enfanter la reconduction des contrats prévue au début de l'année 2014. En somme, Casablanca n'est pas un modèle en matière de gestion déléguée, en dépit du fait qu'elle ait été un laboratoire en la matière. « La gestion déléguée ne pourra être une réussite tant que les commissions de contrôle et de suivi ne font pas leur travail », souligne cet élu au Conseil de la ville. Les bidonvilles Casablanca est également rongée par les bidonvilles dont la résorption semble de plus en plus improbable, alors que leur disparition était fixée à l'année en cours. Outre ceux qui se développent en périphérie, des bidonvilles sont incrustés en plein centre-ville même. L'un des plus choquants se situe à la rue Chiadma, pas loin de l'Ecole royale navale. Communément appelé « Douar Schneider », ce bidonville, situé en plein cœur de la métropole, abrite plus d'une cinquantaine de familles. Les habitants, si on peut les appeler ainsi, mènent une existence pitoyable dans des taudis délabrés. Un calvaire qui dure depuis l'année 2002. Chaque famille (4 personnes en moyenne) dispose d'une baraque bâtie grossièrement sur une surface de moins de 2 m2. Les habitations menaçant ruine Toujours sur le volet du logement, le dernier recensement datant de l'année 2004 faisait ressortir que plus de 130 000 ménages au Maroc vivaient dans des maisons menaçant ruine. À l'époque, plus de la moitié était concentrée à Casablanca, soit 65 000 ménages environ. Des chiffres qui doivent être actualisés et bien évidemment revus à la hausse de nos jours. Près de 50% de ces ménages sont concentrés à Derb Soltane, alors que l'ancienne médina concentre quelque 30%, avec près de 20 000 ménages. À elle seule, l'avenue royale abrite près de 12 000 ménages vivant dans des maisons dans un état de délabrement avancé. Valeur d'aujourd'hui, Casablanca devrait compter entre 20 000 et 25 000 maisons menaçant ruine, chacune abritant plusieurs ménages. Mais la liste des maux qui affectent la ville est loin d'être exhaustive. Insécurité, ruralisation, chômage, commerce informel sont autant de problèmes qui paralysent la métropole économique. L'insécurité Casablanca est également réputée pour être une ville où l'insécurité est galopante. Vols et agressions sont perpétrés de jour comme de nuit. Il s'avère ainsi dangereux, parfois, de quitter les grandes artères où la fréquentation est dense et d'emprunter les petites ruelles. Depuis le début de l'année en cours, les éléments de la police judiciaire, toutes brigades confondues, ont procédé à l'arrestation de près de 40 000 individus pour crimes divers, allant du vol à l'arraché jusqu'au trafic de drogue ou l'homicide. www.lematin.ma