Le procès du directeur d'Al Alam, Abdellah Bakkali, a été reporté au 19 avril prochain. Hier, des dizaines de journalistes et de militants de droits de l'Homme ont exprimé leur soutien au secrétaire général du SNPM, devant le Tribunal de première instance de Rabat. «La presse est en danger», «le journalisme n'est pas un crime», «la presse ne peut être libre sans justice libre». Ce sont quelques slogans proclamés haut et fort par des dizaines de journalistes, des militants des droits de l'Homme et même des représentants de la coordination des diplômés chômeurs, hier devant le Tribunal de première instance de Rabat, avant l'ouverture du procès du directeur du quotidien Al Alam, poursuivi en justice, rappelons-le, suite à une plainte du ministre de l'Intérieur à cause de la publication d'un article dénonçant le recours à l'argent lors de l'élection de la Chambre des conseillers. Abdellah Bakkali était, hier, soutenu par plus de 80 avocats de différentes régions du Maroc qui ont demandé le report du procès afin de préparer la défense. La prochaine audience est fixée au 19 avril prochain. Les acteurs associatifs et les journalistes annoncent leur détermination à soutenir, jusqu'au bout, le secrétaire général du Syndicat national de la presse marocaine et à défendre la liberté d'expression et de presse. De leur côté, les dirigeants du parti de l'Istiqlal dénoncent les poursuites engagés à l'égard de Bakkali. Accompagné de quelques membres du comité exécutif, Hamid Chabat, le chef de file des héritiers de Allal El Fassi, a tenu à marquer sa présence au tribunal. Dans un communiqué, le secrétariat général du parti de la balance considère que l'engagement des poursuites à l'encontre de Bakkali, sur la base d'un point de vue, au sujet des circonstances dans lesquelles se sont déroulées les élections de la Chambre des conseillers, constitue «une violation irresponsable et à un musellement de la liberté d'expression». Abdellah Bakkali Directeur d'Al Alam Les Inspirations ECO : La décision d'engager des poursuites judiciaires contre vous intervient dans un contexte marqué par le débat sur la liberté de la presse. Coïncidence ? Abdellah Bakkali : À l'heure où le débat est en cours sur le nouveau Code de la presse, le gouvernement appelle à l'emprisonnement d'un journaliste. Ainsi, on peut déduire que certaines parties sont déterminées à ce que les peines privatives de liberté soient contenues dans le Code de la presse. Il s'agit d'une tentative pour orienter le débat général sur cette question. Il est clair que le gouvernement tient aux peines privatives de liberté. Quels sont les principaux reproches? C'est un procès politique, car il a trait à un sujet politique qui n'est autre que les élections. Il est empreint de plusieurs messages négatifs à l'égard de l'avenir, à commencer par le Code de la presse. À l'heure où le projet est discuté, le gouvernement appelle à l'emprisonnement d'un journaliste et la suspension d'un journal. Il s'agit aussi d'un message négatif vis-à-vis des élections. Le fait que le secrétaire général du Syndicat national de la presse, membre du bureau exécutif d'un parti politique et directeur d'un journal, soit poursuivi pour avoir dénoncé les résultats des élections de la Chambre des conseillers est, en effet, un message, on ne peut plus, clair : personne ne doit, en 2016, donner son point de vue à propos des résultats des élections. En ce qui me concerne, je tiens à ce que j'ai écrit et dit devant la justice. L'élection de la Chambre des conseillers a été entachée d'irrégularités et les responsables de l'administration territoriale y sont concernés. Comment peut-on protéger la liberté de la presse au Maroc ? Outre la loi, il est primordial d'instaurer la culture de la liberté d'expression et de presse. Le ministre de l'Intérieur ne doit plus considérer que les walis et gouverneurs sont sacrés. Ces derniers sont chargés de la gestion d'une grande partie des finances publiques. Aussi faut-il qu'ils fassent l'objet de contrôle à travers les médias, la justice et la société civile. Il n'est pas acceptable de vouloir immuniser les responsables territoriaux.