Une semaine sportive studieuse nous attend à Marrakech. Salon international, débats, conférences, workshop... Et pour une première édition, Moncef Belkhayat, ministre de la Jeunesse et des sports, a fait les choses en grand, afin de marquer les esprits. Il suffit juste de jeter un petit coup d'œil sur le programme pour s'en rendre compte. De grosses pointures locales et mondiales feront le déplacement à la cité ocre. Bien évidemment, le Salon est l'événement phare de cette semaine du sport, dont le coup d'envoi sera donné aujourd'hui. Un Salon auquel prennent part plus de 150 exposants. On devine bien que l'objectif visé est d'en faire un rendez-vous incontournable pour tous les acteurs impliqués dans le sport et les investisseurs potentiels. On le sait, pour Belkhayat, le sport est avant tout une affaire de business et doit devenir un levier de développement socioéconomique. Une grande bande-annonce qui nous interpelle tous. Et sur le terrain? Ce grand chantier est loin d'être une simple affaire, d'autant plus que le département de tutelle ne se fixe pas d'objectifs précis. Il n'est pas la seule variable dans cette équation. Cela dépend des autres acteurs, qui ne sont pas toujours en phase avec la nouvelle philosophie visant à faire du sport un véritable business. Pas de doute, malgré les ambitions et les effets d'annonce, tous les jalons d'une économie du sport sont loin d'être réunis. Il en faut néanmoins plus pour refroidir Belkhayat. Le ministre croit dur comme fer en son projet de professionnalisation du sport, étape nécessaire pour en faire un secteur économique en bonne et due forme. Dès sa prise de fonction, Belkhayat s'est attaqué au toilettage juridique des textes régissant le sport et à l'accélération du rythme de réalisation des infrastructures sportives, sans oublier entres autres, la création de la SONARGES (bras financier du ministère), des centres sportifs et la mise en place de contrats programmes avec les fédés. L'objectif est de créer un environnement propice pour les investissements et de crédibiliser le sport auprès des opérateurs économiques. Bref, une sorte de climat d'affaires où il fait bon investir ! Et sur ce terrain, la bataille de Belkhayat est loin d'être gagnée. En attendant les chiffres... Il y a lieu de préciser que les effets de l'arsenal mis en œuvre par Belkayat ne peuvent être perceptibles qu'à moyen et long termes. Un vrai business du sport ne se crée pas du jour au lendemain. En attendant... il faut dire qu'il existe bel et bien un marché du sport au Maroc. Seul et gros hic : tout le monde a beaucoup de mal à l'évaluer. Même les équipes de Belkhayat sont incapables d'avancer des chiffres. Comment alors développer un secteur si on ne dispose pas d'indicateurs clés, voire au moins d'une cartographie précise ? C'est le moment de lancer une grande étude sur la base de laquelle on pourrait déterminer des objectifs stratégiques. Un benchmarking international est également primordial. Tenez par exemple : Pour les grandes nations sportives, qui ont compris les enjeux réels de ce secteur, le poids économique du sport se situe, aujourd'hui, entre 0,5% et 2% du PIB. En France, et selon une étude récente, les dépenses sportives totales ont atteint 33,9 milliards d'euros en 2008, soit 1,7% du PIB, contre 30,3 milliards trois ans auparavant. À elles seules, celles des ménages représentent plus de la moitié de ces dépenses. C'est dire que le sport est un sacré business, surtout lorsque l'on sait que son chiffre d'affaires mondial devrait atteindre 133 milliards de dollars en 2013, contre 114 milliards en 2009, soit un taux de croissance annuel moyen de 3,8%. Les projections du cabinet international PWC ont de quoi rassurer les acteurs marocains, dans la mesure où l'Afrique est citée parmi les zones qui bénéficieront de cette croissance. Comment le Maroc peut-il capitaliser sur cette euphorie? Pour le cabinet PWC, «les sports majeurs qui sont depuis longtemps fortement enracinés à l'échelle locale rayonnent aujourd'hui sur de nouveaux territoires. Pour gagner dans l'environnement sportif du 21e siècle, il est primordial de penser à l'échelle internationale et d'agir au plan local». Du pain sur la planche pour le ministre des Sports. Le Maroc a toujours eu de grands champions, le temps est venu aujourd'hui de construire une économie du sport sur des bases solides. Ministère, fédés, clubs, investisseurs... sont tous concernés. La volonté politique en haut lieu est là. Et si Belkhayat réussit ce sacré pari de baliser le terrain d'un véritable marché marocain du sport, son but sera inscrit dans les annales de l'histoire. S.B