La bonne gestion des marchés publics requiert du gouvernement d'avoir une vision qui a pour objectifs le renforcement des principes de la bonne gouvernance, de l'égalité et de la transparence, la promotion de la concurrence loyale, la lutte contre les ententes et les complicités illicites et la protection de la liberté et de l'égalité d'accès à la commande publique, a souligné la députée Malika Akhech-Khouche, membre du groupe du progrès et du socialisme à la chambre des représentants. Intervenant lors de la journée de consultation entre les deux chambres du Parlement et le gouvernement à propos de la réforme du système des marchés publics (siège du Parlement, 27 avril 2022), la députée a indiqué qu'il sera difficile au Maroc de maîtriser son modèle de développement et lui assurer toutes les chances de réussite, s'il n'est pas en mesure d'améliorer le système de gouvernance, garantir un climat propice à la finance et aux affaires et créer les conditions de l'Etat de Droit dans le domaine économique, à travers notamment l'élimination de toutes les formes de prévarication et la corruption, la promotion de la transparence et de la concurrence loyale et la lutte contre le monopole illicite et l'économie de rente. Revenant sur le rôle important des marchés publics dans le développement économique et social et la création de l'emploi, elle a rappelé qu'ils représentent quelque 24% du PIB du pays. Elle a également mis en relief l'impact direct et consistant des marchés publics sur l'encouragement de l'investissement, le soutien de l'entreprise nationale, la gouvernance des dépenses publiques, la gestion des finances publiques et l'assainissement du climat de la finance et des affaires. Parallèlement aux décrets de 1998, de 2007 et du 20 mars 2013, on a tenté de procéder à la réforme du système des marchés publics, a-t-elle rappelé, estimant que la réforme véritable est celle qui ne se limite pas à la refonte du système juridique, mais qui vise aussi à corriger les dysfonctionnements de la pratique, à renforcer le contrôle et à améliorer qualitativement la réalisation des marchés publics pour le bien du citoyen et dans l'intérêt général. Une telle réforme doit également avoir pour objectif de sévir sévèrement contre toute action illicite visant les fonds publics, a-t-elle dit. Parmi les dysfonctionnements qui marquent la passation des marchés publics figure notamment le recours excessif au système des dérogations sans motif valable dans plusieurs cas, a rappelé la députée du PPS, qui a demandé à ce que le gouvernement dévoile le nombre de ces dérogations pour la passation des marchés publics à travers les négociations ou l'emploi des bons de commande. Elle a également indiqué que malgré le fait que le taux d'exécution des budgets des administrations publiques soit toujours modeste, les entreprises prestataires se plaignent du retard ou du non règlement par ces mêmes administrations publiques de leurs arriérés. Selon elle, il est nécessaire de corriger une telle défaillance à travers la simplification des procédures de paiement tout en évitant d'éluder la responsabilité à l'égard de l'utilisation des fonds publics. Après avoir rappelé que de nombreux ministères et administrations publiques consacrent des budgets pour financer des projets de travaux et de construction (habitat, santé, enseignement, équipement, eau...), elle a estimé que ces ministères ne doivent pas avoir pour vocation de se spécialiser dans la construction. Leur mission première, a-t-elle expliqué, consiste à élaborer les politiques et les conceptions tout en confiant la mission de la construction à une agence publique unique qualifiée et spécialisée qui se chargerait de la supervision de la réalisation des marchés publics des travaux. Elle s'est en outre interrogée sur l'actualité et la faisabilité de la règle du choix du moins-disant, estimant qu'il est peut être temps d'approfondir la définition des critères en vigueur et de les élargir. Est-ce que le prix suffit-il tout seul ? Ou faut-il tenir compte de manière transparente d'autres critères non moins importants concernant notamment la qualité, la rapidité et la considération des dimensions environnementales par exemple ? La députée Malika Akhech-Khouche a évoqué aussi le cas des marchés publics qui n'attirent qu'un seul concurrent, en raison des ententes illicites qui les accompagnent dès le lancement de l'appel d'offres les concernant, soulignant la nécessité de combler la lacune juridique qui favorise un tel phénomène attentatoire à la concurrence loyale. Elle a fait observer dans le même ordre d'idées que de nombreuses administrations et institutions publiques ainsi que les collectivités locales ne tiennent pas de registres réservés aux ordres de service et aux ordres d'arrêt pour permettre de suivre et de contrôler le degré de respect par l'entreprise prestataire des délais de réalisation fixés dans le contrat. D'autres violations sont également commises en matière de suivi quantitatif et qualitatif et de contrôle technique de la part du maitre d'ouvrage, a-t-elle ajouté. Il en résulte la plupart du temps, a-t-elle dit, des écarts importants entre les quantités des travaux programmés dans le cahier des charges et la quantité effectivement réalisée ainsi qu'entre les quantités payés après le décompte final. Encore une fois ce sont les finances de l'Etat qui en pâtissent, a-t-elle expliqué. Et de s'interroger sur le fait que malgré le fait qu'ils soient blacklistés pour avoir failli à leurs obligations dans des marchés publics ou pour d'autres problèmes, certains entrepreneurs et prestataires de services et de fournitures privés continuent de passer des marchés publics en violation de la loi. Et après avoir appelé le gouvernement à avoir une vision claire en la matière, elle a estimé nécessaire de remédier à la dispersion des textes qui encadrent les marchés publics, à travers l'adoption d'une loi ou d'une loi-cadre des marchés au lieu d'un simple décret, tout en procédant à la compilation des textes y afférents dans un seul code des marchés publics. M'Barek Tafsi