Mis à l'épreuve par l'IA, le secteur de l'outsourcing au Maroc risque de subir les impacts de la loi sur le démarchage téléphonique qui doit entrer en vigueur en France en 2026. Décryptage. S'adapter ou être emporté, telle est l'équation pour des centaines de centres d'appels au Maroc. En raison d'un nouveau cadre réglementaire, ces opérateurs ne pourront plus exercer une partie de leur activité. Interdisant tout démarchage téléphonique « directement ou par l'intermédiaire d'un tiers agissant pour son compte » – sans consentement de façon « libre, spécifique, éclairée, univoque et révocable » –, le texte entrera en vigueur en août 2026. Dans les détails, ledit décret stipule qu'au cas où un consommateur refuse d'être démarché, le professionnel n'est plus autorisé à le recontacter avant l'expiration d'une période de soixante jours calendaires. En revanche, la violation de ces règles est sanctionnée d'une amende de 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. Lire aussi | Intelcia récompensé aux CX Awards 2025 pour son innovation en matière d'expérience client « En ce qui concerne Intelcia, cette nouvelle disposition nous impacte légèrement, juste à la marge. Et à mon sens, c'est une façon de responsabiliser certains outsourceurs qui sont encore dans la télévente à la dure. Aujourd'hui, l'enjeu de ce dispositif est d'emmener certains opérateurs à respecter certaines règles : abandonner les appels les dimanches, ne plus relancer les clients qui ont exprimé clairement leur refus... En somme, il faut noter que ce nouveau dispositif impacte plus les petits centres d'appels que les grands », nous confiait dans un article le CEO d'Intelcia. Une pilule difficile à avaler pour les centres d'appels marocains, dont l'essentiel de l'activité est orienté vers le marché francophone. Les emplois menacés ? Tributaire de la réglementation en France, qui constitue 80 % de son activité, le secteur de la relation client emploie plus de 90 000 personnes au Maroc et réalise un chiffre d'affaires de 18 milliards de dirhams (1,7 milliard d'euros). Aujourd'hui, ce sont des milliers d'emplois qui sont menacés. Cette loi vient donc aggraver la pression sur un secteur fortement pourvoyeur d'emplois, déjà mis à mal par l'automatisation de nombreuses tâches rendue possible par l'intelligence artificielle (IA). Selon un rapport publié en 2025 par Caribou Digital et Genesis Analytics, en partenariat avec la Mastercard Foundation, « 40 % du travail dans le secteur BPO/ITES [externalisation des services informatiques] en Afrique est susceptible d'être automatisé ». Lire aussi | Outsourcia crée une direction dédiée à la robustesse pour renforcer son modèle durable « Il faut dire que depuis le plan Emergence de 2007, le secteur de l'offshore au Maroc est sur une piste dynamique de croissance. En effet, plusieurs actions à l'époque, notamment les actions d'incitation qui ont permis aux grands groupes internationaux de venir opérer au Maroc, surtout dans le domaine de l'IT, ont favorisé le développement de l'activité. À ce jour, on parle de plus de 100 000 professionnels », nous confie une de nos sources. « Nous sommes dans un secteur qui se développe à 90 % à l'export en termes de revenus. On bénéficie ainsi de la croissance mondiale de l'outsourcing, qui est de l'ordre de 8 % par an. Ni l'IA ni les changements de réglementation n'ont affaibli cette dynamique, même en période de crise en Europe », rassure le président d'Outsourcia, Youssef Chraibi.