Le roi est à Casablanca. Cela se remarque à plusieurs petits signes. Policiers en tenue impeccable, en surnombre aux carrefours stratégiques, effort sur la propreté et … prolifération de banderoles et autres doléances adressées au souverain. Sachant que le roi sillonne la ville pour estimer de visu la réalité quotidienne de ses sujets, certains mettent à profit ces rencontres inopinées et espérées pour exposer leurs soucis ou leurs demandes au premier décideur du pays. Bien entendu, il doit y avoir dans le lot des demandes farfelues, mais force est de constater que la plupart des missives concernent des blocages absurdes dans les processus administratifs ou des appels à un arbitrage ultime face à une situation de «hogra». Si la démarche en soi n'a rien de choquant, elle révèle toutefois une série de dysfonctionnements structurels. Le roi semble être la seule personnalité qui inspire encore confiance aux Marocains qui dénoncent, par leur geste, l'incurie d'un certain nombre d'acteurs, députés ou fonctionnaires. Dans un système normal, fonctionnant comme il se doit, nul ne devrait importuner autrui, a fortiori le roi, pour ce qui, vu sous un angle macroscopique, n'est que broutille. Si le roi devait régler tous les problèmes de voisinage, de relogement, d'erreurs administratives, etc. des journées de mille heures ne lui suffiraient pas. Et si tel était le cas, se poserait la question de l'efficacité des administrations, y compris du Parlement et de la nécessité de leur maintien. Comme dans tout projet, chacun a une place à tenir et un rôle à jouer. Lorsque pour pallier les carences des uns, les autres prennent le relais, c'est le résultat global qui en pâtit avec une perte d'énergie inutile. Pour une fois, il ne s'agit pas de manque de moyens mais simplement d'engagement, de conscience professionnelle, de respect de soi et des autres.
