Vendredi 1er juillet, nombreux sont ceux qui ont bravé la chaleur pour accomplir ce qu'ils nomment leur «devoir citoyen». Avant même l'annonce officieuse des résultats du scrutin, la plupart d'entre eux ont clamé haut et fort leur décision de voter «oui», si bien que l'isoloir en est devenu un accessoire superflu. Vendredi 1er juillet. 35 degrés au compteur météorologique de la journée. Malgré la température qui ne cesse de grimper, les bureaux de vote accueillent leurs premiers votants dès leur ouverture à 8 heures du matin. «Je suis passée voter avant d'aller au travail, mon patron est indulgent aujourd'hui, et n'est pas très regardant sur les horaires», nous lance Basma, 29 ans. D'autres profiteront d'ailleurs de cette largesse patronale pour s'accorder une grasse matinée, en prétendant par la suite être allé voter. Dans la cour principale du lycée Moulay Youssef de Rabat, les habitants vivant à proximité errent à la recherche de la salle qui leur est attribuée. La mécanique est bien huilée, et plusieurs personnes sont là pour orienter les égarés. «Au dos de ma carte d'électeur était inscrit le lieu où je devais aller voter. Et une fois ici, on m'a indiqué dans quelle salle je devais aller», nous explique une votante rassurée de pouvoir exercer ce qu'elle nommera son « devoir citoyen ». D'autres ont même reçu leur affectation électorale par sms. Une fois franchi le seuil de la salle de classe où sera opéré le vote, chacun tend sa carte d'électeur à la personne chargée de vérifier sa présence sur les listes électorales, qui répète le nom à haut voix aux autres fonctionnaires pour une seconde vérification. «Il est souvent arrivé, durant la journée, que des personnes aient oublié leur carte d'électeur, mais on vérifie s'ils sont inscrits», nous lance un jeune homme mobilisé pour cette journée spéciale. D'autres arrivent au bureau de vote munis de leur seule intention de voter. « S'ils sont inscrits, on les laisse voter. De toute façon, tous ceux qui sont présents dans ce bureau connaissent la plupart du temps les votants. On est tous du même quartier ». Et l'ambiance bon enfant qui règne en ce jour de référendum le prouve. Dans la cour principale du lycée Moulay Youssef de Rabat, les habitants vivant à proximité errent à la recherche de la salle qui leur est attribuée. Autre lieu, même ambiance, cette fois-ci au collège Mouad Ibn Jabal de Diour Jamaâ. On se salue, les bises chaleureuses sont monnaie courante. Les « oui » et les « non » trônent sur un bureau, près de l'urne transparente. Les personnes âgées sont nombreuses à venir voter, seules ou accompagnées. La chaleur étouffante ne les a pas découragées, malgré leur faiblesse physique apparente. «Il fait très chaud aujourd'hui. Mais je suis venu parce qu'il fallait venir. C'est le roi qui l'a dit», nous confie Abdelouahad, 75 ans, qui s'accorde une pause avant de repartir chez lui. Ne cachant pas leur intention de vote, certains oublient même de prendre la feuille bleue, celle du « non », avec eux dans l'isoloir. Et même quand on la leur tend, ils ressortent avec, après avoir fait leur choix attendu. Rabha, 78 ans, s'exclame même, en glissant son enveloppe – non fermée – dans l'urne, « oui ! oui ! oui ! ». A la sortie, elle exprime à nouveau sa joie. «J'attendais ce jour avec impatience. Même si ce matin, j'ai eu du mal à trouver le bureau de vote. J'ai dû beaucoup marcher avec ma fille pour trouver ce collège. Mais c'était un devoir !» Badr, 25 ans, sort du bureau de vote un grand sourire aux lèvres. Il regarde fièrement son pouce marqué du point noir indélébile qui marque les votants. Cravate dénouée, il est sorti rapidement du travail pour aller voter. «C'est la première fois que je vote, et je suis heureux de l'avoir fait. Je sens que j'ai fait un acte citoyen. Et c'est l'une des premières fois où je sens que l'on m'a donné l'occasion d'exprimer mon avis». Quant aux attentes des votants, elles convergent toutes vers un seul mot : changement. Même si rares sont ceux qui ont lu le projet de la nouvelle constitution, qu'ils approuvent pourtant. «Honnêtement, je n'ai pas lu le texte. Par contre, j'ai lu les quelques résumés rédigés par la presse et écouté les essais d'explication qui sont passés à la télé», avoue Basma, 29 ans. Avant d'ajouter, «je trouve que le roi a été à l'écoute du peuple. Ce dernier a eu un certain nombre de revendications que le roi s'est hâté d'appliquer. Avant, on ne pouvait même pas avoir droit à ce genre de requêtes, alors ne demandons pas la lune !». D'autres sont à milles lieues des portées du texte, comme Saâdia, 47 ans, sortie de sa cuisine pour aller voter, avant de se remettre aux fourneaux. «Si je me suis déplacée au bureau de vote, c'est surtout pour les jeunes, pour les générations futures. En votant, j'ai pensé à eux. Je n'ai pas lu le texte, je suis analphabète. Mais j'en ai entendu parler à la télévision. J'espère que la Constitution donnera de l'emploi aux jeunes, et que ça diminuera le taux de chômage». Quant à ceux qui sont contre ce projet, ils semblent avoir préféré le boycott au vote «non».