Le Festival du Film Libanais ou Lebanese Film Festival (LFF), instance qui soutient les films locaux, depuis 2001, a suspendu son activité. Les regards sont tournés aujourd'hui vers Beirut International Film Festival, autre festival phare de la ville, connu pour son regard international sur le septième art. A son lancement en 2001, LFF ouvrait le bal à d'autres manifestations cinématographiques et venait assouvir les envies des cinéastes locaux souhaitant montrer leurs œuvres au public. Le festival, programmé sur une semaine au mois d'août, avait démarré sur une initiative des organisateurs de «Né à Beyrouth», une des boîtes de production promouvant la production locale. Le changement de gouvernement et la crise financière sont-ils à la base de la fin du festival ? Sans doute, puisque le partenaire principal du festival et l'une des banques les plus ancrées dans la région, la banque Audi, s'est désistée après 10 ans de collaboration. «Nous avons été surpris par le retrait de notre principal partenaire, qui nous accompagnait depuis le début, d'autant que la décision nous a été communiquée à la dernière minute, au mois de juin», explique Nadim Tabet. Une décision navrante au regard d'un statu quo aléatoire vu qu'au Liban, à la différence du Maroc, le cinéma n'a jamais été dûment subventionné. «Ce sont les sponsors et les partenaires privés qui financent ce genre de manifestation culturelle, aucune instance cinématographique ne nous soutient financièrement», déplore Nadim Tabet. «C'est le seul festival de film professionnel au niveau local. Il regroupe des films de genre et des films indépendants de réalisateurs aussi bien confirmés qu'émergents», explique Nadim Tabet, réalisateur et directeur de la programmation. Au fil des ans, des films bien pensés ont fait leur chemin grâce au LFF ; citons Chou sar ? de De Gaulle Eid, Khiam, le documentaire du duo d'artistes peintres-réalisateurs Joanna Hadji Thomas et Khalil Jreije et Conversation de salon de la talentueuse Danielle Arbid. Quant à la programmation internationale, elle reste foncièrement timide, ceci étant une volonté des organisateurs. «Notre objectif est différent des visées de Beirut International Film Festival qui est noyé dans les productions outre-mer», relève Nadim Tabet, non sans une pointe d'amertume. A l'exception de quelques rétrospectives de grands réalisateurs étrangers tels que Luc Besson, peu de films étrangers ont été sélectionnés au LFF à ce jour. Le festival devait cependant programmer cette année Circumstance de l'iranienne Maryam Keshavarz, une coproduction libano-iranienne filmée à Beyrouth par «Né à Beyrouth» et primée au festival de Sundance aux Etats-Unis. Partie remise ! L'arrêt de ce festival est d'autant plus surprenant que sa 9e édition, en 2010, fut un réel succès en termes de qualité de film et de recettes, d'autant que le festival avait introduit, voilà deux ans, un prix spécial récompensant les réalisateurs qui sortent du lot. «Le but c'est de soutenir le cinéma libanais et de le faire connaître, enchaîne Nadim Tabet. Dans cette perspective, nous envisageons de déléguer ces assises à une autre équipe ou réviser la formule en l'adaptant sous forme de journées cinématographiques.» Pierre Sarraf, un des fondateurs du festival, suggère une formule qui ne condenserait pas la totalité des films en une semaine, mais regrouperait plutôt plusieurs petits évènements adaptés à chaque film. Une proposition qui contrasterait avec les festivals régionaux et internationaux d'envergure qui brillent de tous feux à Dubaï, Abu Dhabi et Doha et où sont programmées de grandes premières mondiales, mais qui n'en serait pas moins intéressante tant qu'elle vise à booster la production locale. Il faut dire que le paysage des festivals est des plus foisonnants au Liban, un des festivals les mieux établis étant Beirut International Film Festival, créé en 1997. Cette instance, forte d'un historique louable, axe sa sélection sur des films étrangers indépendants et accueille une brochette de cinéastes dépassant les frontières du pays des cèdres, promouvant notamment la production cinématographique au Moyen-Orient. En 2010, le festival avait programmé, parmi d'autres, des œuvres des pays arabes: EL Djinn de l'Algérienne Yasmine Chouikh et Sin Palabras (Sans mots) du Marocain Othman Naciri. Moins notoire mais tout aussi prolifique, Ayyam Beirut Cinema'iyya ou les journées cinématographiques de Beyrouth est un festival semestriel non compétitif proposant des films en langue arabe. L'ambitieux Docudays s'ajoute aux maillons de cette chaîne, sans compter les petits évènements tels que 48 Hour Film Competition et Outbox. Dans une petite ville comme Beyrouth, cette multitude de manifestations a indéniablement fait de l'ombre au LF, malgré sa solide identité de promoteur de films locaux. Preuve que le septième art dans une ville culturelle comme Beyrouth reste balbutiant, en dépit des efforts collectifs de ses jeunes cinéastes zélés. Une contradiction de taille si l'on considère son potentiel audiovisuel costaud, canalisé, hélas, dans des vidéo-clips creux et vains. A suivre.