La célébration eucharistique aura lieu le vendredi 15 Février à 19h en la cathédrale Saint Pierre à Rabat.Né à Lyon en 1934, ordonné prêtre en 1960, il est arrivé en 1967 au Maroc, qu'il n'a quitté qu'en 1980 et 1981, où il a fait le tour des pays musulmans, dans le cadre de la préparation de sa thèse de doctorat en théologie sur les Centres d'étude Chrétiens en monde musulman. Il a ainsi, pendant plus de 40 ans, exercé la totalité de sa carrière au Maroc. Il a commencé à avoir la charge d'aumônier de la Paroisse Universitaire à Rabat, puis a été, de 1973 à 1980, vicaire général de l'évêché. Mais il a débuté son œuvre la plus généreuse en 1981, avec la reprise de la bibliothèque de la Source, qu'il a gérée jusqu'en 2000, année où il a laissé à ses successeurs un centre de documentation et de réflexion d'une richesse et d'un rayonnement reconnus au-delà des frontières du pays. Après un nouvel épisode de travail plus proche du diocèse, entre 1995 et 2000, où il a repris ses fonctions de vicaire général, il est retourné à ce qui nous est toujours apparu à tous comme sa vraie vocation, qu'il a servie jusqu'au-delà du moment où la maladie l'avait trop affaibli, l'organisation, la direction, et l'animation d'un centre culturel, cette fois à Bni Mellal. L'œuvre du Père Levrat La bibliothèque de La Source à Rabat En 1980, le père Levrat a pris l'initiative de mettre le fonds documentaire constitué par le diocèse de Rabat à la disposition des chercheurs marocains. La bibliothèque est rapidement devenue le Centre le mieux pourvu en ouvrages et revues historiques sur tous les aspects de la société marocaine. En 2011, l'évêché a remis et transféré ce patrimoine à la Bibliothèque Nationale du Maroc, qui est en train de l'organiser. Le Groupe de recherche Islamo-Chrétien (GRIC) Le GRIC, dont le Père Levrat est cofondateur, mène depuis plus de 25 ans, un dialogue et une réflexion entre intellectuels chrétiens et musulmans dans de nombreux centres européens, Bruxelles, Paris, moyen orientaux, Beyrouth, Le Caire, maghrébins, Tunis, Alger, Rabat, et de l'Ouest de l'Afrique, Dakar. Les résultats de ces débats ont déjà fait l'objet de cinq publications. Le Complexe Culturel de Beni Mellal Le Complexe Culturel de Beni Mellal mérite une mention particulière. Il est né, sur la base du fonds accumulé depuis 1973 par le père résident de ce site, des relations amicales et professionnelles entretenues sans défection depuis plus de 40 ans entre le père Levrat et Omar Akalay, tous deux hommes de grande culture et de grande générosité. Le père Levrat a pris la charge de créer et de gérer ce projet à partir de la bibliothèque et de la collection de tableaux et de bijoux qu'O. Akalay mettait à la disposition de l'animation culturelle, après le décès de son épouse, avec qui il l'avait constituée pendant trente ans.dans le but d'en faire don à un organisme culturel ouvert au public. La bibliothèque a été inaugurée en 2005, avant l'ouverture du musée, riche de 150 tableaux de peintres marocains représentant les petits métiers et les scènes de la vie quotidienne et de bijoux en argent, de différentes régions, de manuscrits du Coran turcs, du 17ème au 19ème, de miniatures persanes et qui comprend une salle où sont exposées les œuvres des peintres locaux. Comment on peut créer une œuvre culturelle avec de la générosité, de la ténacité et de l'amitié Le complexe a été créé comme association en participation à but non lucratif en vue de mettre en commun les compétences complémentaires de ses deux fondateurs. La construction a été financée intégralement par Monsieur Akalay. Le fonds documentaire comprend 4.000 livres qui étaient en service dans les locaux de l'ancienne église, 5.000 livres du patrimoine Akalay traitant de sciences humaines concernant le Maroc, l'Islam, l'économie politique, la sociologie et d'un nombre important de livres d'art portant sur les grands peintres ou émanant des grands musées mondiaux, 7.000 volumes (livres et périodiques), don de la Fondation du Roi Abdul Aziz al Saoud de Casablanca, 3.000 livres environ donnés par la bibliothèque de la Source, traitant pour la plupart du Maroc et de son histoire, 1.765 livres offerts par le Ministère de la Culture, et d'autres donnés par la Bibliothèque Nationale du Maroc, et par de très nombreuses personnes privées, marocaines et étrangères, et enfin les publications de l'Institut d'Etudes Africaines et l'Institut Universitaire de la Recherche Scientifique. L'œuvre littéraire 1987, Une Expérience de dialogue, les Centres d'étude chrétiens en monde musulman, Thèse de Doctorat en théologie, Altenberge, Christlich-Islamisches Schrifttum. 1993 et 1999, Du Dialogue, Casablanca, Horizons méditerranéens, (revu et réédité sous le titre Dynamique de la rencontre, une approche anthropologique du dialogue, L'Harmattan) (aussi présenté comme La force du dialogue pour le respect mutuel des religions et des civilisations). 1999, Approches, Al Asas, Témara. 2003, La force du dialogue, Marsam, Rabat. Les principes et la pensée du Père Levrat Les propos du Père Levrat, dont nous reprenons les idées les plus fortes, exprimés au cours d'un entretien animé par N. Ziane et publié par le journal Le Matin le 16.07.2005, sont aujourd'hui encore plus d'actualité qu'il y a sept ans. Tant que nous restons limités à nos petits univers la peur et la méfiance nous paralysent Rencontrer l'Autre, l'accueillir, c'est d'abord l'écouter. L'écouter longuement, écouter sa différence tout en acceptant de ne pas tout savoir de lui. Ecouter en étant désireux de l'accueillir avec ses richesses et de comprendre ce qui donne sens à sa vie. Ecouter et aussi interroger, non comme un juge, mais comme un amoureux qui désire mieux connaître, mieux comprendre le secret de l'Autre, ce qui est au cœur de sa vie et lui donne sens... L'écoute et le questionnement sont une condition du dialogue, son moment le plus important. L'écoute, l'accueil de la parole de l'Autre, et donc de l'Autre lui-même, permettent à un dialogue vrai de s'engager... Chacun, alors, peut livrer le meilleur de ses convictions. Le dialogue devient partage, il peut porter des fruits. Le dialogue interreligieux, vécu comme une relation, et non comme une fusion, ne conduit pas à un quelconque syncrétisme fade. Le dialogue nous permet de nous connaître, de nous estimer, de nous respecter, et, également, de nous enrichir les uns par les autres. Il nous fait entrer, progressivement, dans un monde fraternel et relationnel Nous sommes, tous, héritiers d'une culture, de ses richesses certes, mais aussi de ses limites, de ses routines sociales, de ses préjugés, souvent fruits de manipulations politiques. Notre connaissance des autres traditions religieuses est, généralement, partielle, partiale - voire même simpliste et caricaturale. Notre bagage intellectuel en ce domaine se limite, parfois, à quelques stéréotypes, quelques clichés... C'est pourquoi le travail intellectuel ─selon les dons de chacun─ est indispensable pour connaître la tradition de l'Autre et en découvrir les richesses. ...la nécessité de créer des ‘lieux' de rencontre entre adeptes de différentes religions. Tant que nous restons, les uns et les autres, limités à nos petits univers, l'autre apparaît toujours comme une menace : la peur, la méfiance nous paralysent. Alors l'agressivité se développe insensiblement, et, à la moindre occasion, des réactions violentes peuvent surgir. L'important est de se retrouver, pour vivre et faire quelque chose ensemble, dans un climat de liberté, de respect, d'amitié. De son travail dans la maison d'édition, Wallada, créée par O. Akalay, alors cadre de banque, pour participer au développement intellectuel de son pays, il disait "Un historien, universitaire, juif marocain, Germain Ayache, dirigeait la collection de sciences humaines. Lorsque ce dernier a été emporté par la maladie, Omar Akalay, m'a demandé de prendre la direction de cette collection, avec pleine liberté de choisir les livres à publier. Quand un musulman demande à un chrétien, étranger de surcroît, de succéder à un juif pour diriger une collection de sciences humaines, cela manifeste un vrai climat de confiance et de liberté !"