Pékin a annoncé, jeudi 12 juin, la suppression totale des droits de douane sur les produits en provenance des cinquante-trois Etats africains avec lesquels elle entretient des relations diplomatiques, dans le cadre d'un nouveau pacte économique pour étendre l'accès des exportateurs africains au marché chinois. Jusqu'à présent, les pays africains classés parmi les moins avancés (PMA), tels que le Mali ou la Tanzanie, bénéficiaient déjà d'un accès exempté de droits et de quotas. Ce régime sera désormais étendu aux Etats à revenu intermédiaire, selon les termes définis par le ministère chinois des affaires étrangères, à l'issue d'une réunion de haut niveau organisée à Changsha avec plusieurs ministres africains. Accès accru pour les économies industrialisées Cette décision pourrait favoriser les pays disposant d'un tissu industriel relativement étoffé, comme le Maroc, l'Egypte, le Nigeria, l'Afrique du Sud ou le Kenya, en leur permettant d'exporter leurs productions vers la Chine sans obstacles tarifaires. Le dispositif entend instaurer une forme de traitement équitable entre les nations africaines, indépendamment de leur niveau de développement. Parmi les bénéficiaires, le Maroc apparaît comme l'un des principaux gagnants de cette réorientation commerciale. Doté d'une base industrielle diversifiée et d'une capacité d'exportation structurée, le royaume chérifien est en mesure de tirer parti de cette ouverture pour accroître la présence de ses produits transformés sur le marché chinois. Les filières automobile, textile, agroalimentaire et phosphatière pourraient en particulier profiter de cette exemption, à la faveur d'une compétitivité déjà éprouvée à l'échelle mondiale. Les autorités chinoises ont souligné que cette ouverture ne remettrait pas en cause les mesures d'accompagnement destinées aux PMA, qui continueront à bénéficier d'un appui technique, d'un soutien en matière de formation, et d'actions ciblées de valorisation commerciale sur le territoire chinois. Déséquilibres commerciaux persistants Les échanges sino-africains ont connu une croissance soutenue ces dernières années, mais demeurent marqués par un déséquilibre structurel en faveur de la Chine. En 2024, l'excédent commercial enregistré par Pékin à l'égard du continent s'élevait à 62 milliards de dollars. Le nouveau cadre tarifaire pourrait corriger partiellement cette asymétrie, à condition que les exportations africaines se diversifient et montent en gamme. Les autorités chinoises n'ont cependant fourni aucune indication sur les mécanismes de suivi ou les critères d'évaluation de l'effet de cette mesure sur les balances commerciales des pays partenaires. Engagements financiers maintenus Lors du sommet sino-africain tenu en septembre 2024 à Pékin, les autorités chinoises avaient déjà annoncé la mobilisation de 360 milliards de yuans (environ 50 milliards de dollars) sur trois ans, sous forme de crédits et d'investissements, à destination des économies africaines. Cette enveloppe, présentée comme un retour aux engagements d'envergure après une période de relative retenue post-pandémique, vise à soutenir les infrastructures, les industries locales et l'insertion des produits africains sur les marchés extérieurs. La décision de suppression des droits de douane, désormais étendue à l'ensemble des pays du continent liés à Pékin, constitue un jalon supplémentaire dans cette orientation, et place la Chine au centre des projections commerciales à moyen terme de plusieurs économies africaines.