L'expérience marocaine dans la gestion des ressources hydriques, à travers des projets de réutilisation des eaux usées traitées, portés par les collectivités territoriales, a été mise en avant lors de la COP30 à Belém, en Amazonie brésilienne. Un side event organisé au deuxième jour de la Conférence de l'ONU sur le climat par l'Association marocaine des présidents des conseils communaux (AMPCC) et la Direction générale des collectivités territoriales (DGCT) sous le thème « Réutilisation des eaux usées : alternative innovante de l'économie circulaire dans les espaces urbains », a permis de débattre des enjeux liés à cette pratique, perçue comme une réponse durable au stress hydrique, en ligne avec les Hautes Orientations Royales. Des responsables et experts ont souligné que la pression sur les ressources en eau douce s'intensifie sous l'effet conjugué du développement urbain, de la demande agricole et industrielle, et du déficit pluviométrique persistant. La réutilisation des eaux usées traitées apparaît ainsi comme une solution « gagnant-gagnant » : elle permet de réduire la consommation d'eau potable tout en évitant la pollution des écosystèmes. Face à sept saisons consécutives de sécheresse et à un déficit pluviométrique durable, le Maroc a engagé une stratégie volontariste pour sécuriser ses ressources hydriques, a rappelé Jaouad Elkharraz, fondateur du réseau Water-Energy-Climate Experts Network. La surexploitation des nappes, l'intrusion saline et la raréfaction des eaux de surface imposent, selon lui, de recourir à des sources « non conventionnelles », parmi lesquelles figurent le dessalement et la réutilisation des eaux usées. Évoquant le potentiel du dessalement, il a rappelé qu'un programme national ambitieux vise à produire 1,7 milliard de m3 d'eau douce/an d'ici 2030, grâce à la technologie de l'osmose inverse et au recours croissant aux énergies renouvelables pour alimenter les grandes stations du pays. La réutilisation progresse également, a-t-il relevé, certaines stations d'épuration produisant du biogaz et fournissant une eau traitée pour l'irrigation et les espaces verts. « L'exemple d'Agadir, dont la station permet d'irriguer près de 15.000 hectares agricoles, illustre cette approche d'économie circulaire », a-t-il précisé. Fort de ces avancées, le Maroc se positionne, selon lui, parmi les pays africains les plus actifs dans la mobilisation de financements climatiques, notamment auprès du Fonds vert pour le climat, tout en explorant la valorisation des saumures issues du dessalement à des fins industrielles et biotechnologiques. El Hassan Zoubir Idrissi, responsable de l'environnement à la Direction des réseaux publics locaux de la DGCT, a détaillé la stratégie nationale de réutilisation des eaux usées traitées, intégrée au Programme National d'Assainissement Mutualisé et de Réutilisation des Eaux Usées (PNAM). Ce programme, a-t-il expliqué, vise à mobiliser 100 millions de m3 d'eaux traitées à partir de 2027 et 573 millions de m3 d'ici 2040, pour l'arrosage des golfs et espaces verts, l'irrigation agricole et certaines activités industrielles. Il a fait savoir qu'à ce jour, 30 golfs, 16 espaces verts et six usages industriels consomment environ 53 millions de m3 d'eau traitée par an, faisant état de projets phares à Marrakech (670 ha), Rabat-Salé-Témara (1 200 ha), Tanger, Tétouan et Agadir, qui démontrent l'efficacité et la diversité des usages urbains et agricoles. Idrissi a ajouté que le programme 2025-2034 prévoit l'extension à 90 communes et 14 nouveaux projets agricoles, notant que le secteur privé y contribue également, avec le Groupe OCP qui a valorisé plus de 20 millions de m3 pour le lavage du phosphate en 2024. Pour sa part, Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen-sur-Seine et vice-président de Plaine Commune (France), a salué le leadership du Maroc en Afrique en matière de développement durable et plaidé pour une coopération fondée sur le partage d'expertise et la formation des jeunes générations. Il a insisté sur la nécessité d'une nouvelle génération de responsables politiques conscients des enjeux écologiques, capable de porter l'adaptabilité et la préservation des ressources, en Europe comme en Afrique. Enfin, Rachid El Batah, président de la commune de Sidi Ifni, a présenté l'expérience locale de la municipalité, dotée d'une station de traitement et de réutilisation des eaux usées, couvrant près de 20 % des besoins hydriques de la ville, soulignant que cette initiative a permis d'atténuer les pénuries et de sécuriser l'approvisionnement en eau pour les habitants et les activités locales. Parallèlement, a-t-il indiqué, la commune valorise l'eau traitée pour l'irrigation des espaces verts et l'entretien des parcs, limitant le gaspillage et intégrant ces pratiques dans la planification urbaine. Selon lui, ces actions, conformément à la vision du Roi Mohammed VI, illustrent concrètement l'effort national pour promouvoir une gestion durable de l'eau, en mobilisant les ressources non conventionnelles et en développant des solutions locales adaptées au stress hydrique croissant.