Le dossier de la CNCA revient sur la scène Que de secrets ont été enfouis dans le dossier de la CNCA. Que de zones d'ombre ont continué à planer sur cette affaire qui a défrayé la chronique. Pourtant, tout indiquait qu'après le jugement et le verdict rendu, le dossier devait être classé. Que nenni, certains nouveaux éléments apparurent dernièrement. De quoi s'agit-il exactement ? Il y a une vingtaine de jours, Souâd Guessous veuve Allam Hanafi, ex-inspecteur général de la CNCA et qui a mené des opérations d'inspection aux niveaux central et régional, a découvert un certain nombre de documents compromettants qu'elle a soumis à la brigade nationale de la police judiciaire. Cette dernière a bien examiné ces documents et diligenté une enquête approfondie qui a abouti à l'ouverture d'une instruction judiciaire contre neuf personnes dont une se trouve, aujourd'hui, en état de fuite. Ces personnes sont accusées de malversations, d'escroquerie, d'abus de confiance et d'abus de pouvoir. Une fois le rapport de la BNPJ établi, le juge d'instruction de la Cour spéciale de justice a auditionné les accusés qui comparaissent en état de liberté. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle affaire ne fait que suivre le premier épisode qui a concerné la semaine dernière l'audition de deux prévenus en l'occurrence Mohamed El Barhoumi, directeur du centre de formation, de la recherche et du développement de la délégation de Tétouan du ministère de l'agriculture et de Saâd Taghmouti, directeur adjoint des agences de la CNCA à Kénitra et à Mohammédia. La troisième prévenue, Badiaâ Znaïdi ex-employée de l'agence Moulay Youssef de la CNCA à Casablanca est actuellement en état de fuite. Après délibération, la Cour a rendu son verdict en innocentant les premiers alors que Badiaâ Znaïdi a écopé de dix ans de prison ferme par contumace. Mais il est toutefois paradoxal de constater que ceux qui étaient poursuivis en état de détention ont bénéficié d'un non-lieu et que ceux qui l'étaient en état de liberté ont tous été condamnés. Ceci d'autant plus que le dossier d'El Barhoumi et Taghmouti est le même que celui qui a servi à condamner les ex-responsables de la CNCA en juillet dernier. Or, ces faits ne font que susciter les interrogations quant à la nature du procès en lui-même et quant aux contradictions qui l'ont entaché. Parmi ces contradictions, il y a lieu de relever celles ayant trait à la condamnation de Youssef Dahhassi à sept ans de réclusion pour corruption alors que le client supposé être le corrupteur a été tout simplement libéré. Plus paradoxale encore est la situation de l'ex-directeur général Rachid Haddaoui que la CNCA n'a jamais poursuivi et ne s'est jamais constituée partie civile contre lui ni revendiqué la restitution, par ses soins, de sommes prétendument détournées. D'ailleurs, le mémorandum adressé par la direction générale de la CNCA à la Cour considère que tous les prévenus poursuivis en état de liberté sont innocents des faits qui leur sont reprochés. Ce texte dit notamment : “ …Ces personnes n'ont commis aucun préjudice financier et leur activité n'a jamais été contraire à la mission qui leur a été dévolue ”. D'un autre côté, les observateurs ont unanimement relevé la faiblesse des arguments présentés par la Cour dont des documents incomplets constitués souvent de photocopies. De même que les rapports des inspecteurs généraux qui ont servi de base à l'inculpation sont considérés comme incomplets et non définitifs et qu'ils n'ont pas été soumis aux prévenus durant l'instruction. D'ailleurs, les inspecteurs ont refusé que leurs rapports soient considérés comme pièces justificatives à l'inculpation et dénoncé le rapport établi par le bureau d'audit KPMG dont la crédibilité est remise en question dans beaucoup de pays dont la France où ce bureau a eu des démêlées sérieuses avec la justice. Or, la justice marocaine n'a pas pris en considération l'attestation positive délivrée par la Banque mondiale à l'ex-direction de la CNCA. Ces constats sont étayés par les multiples témoignages de satisfaction émanant des hautres autorités du pays et des institutions financières internationales qui ont reconnu que la CNCA a connu une phase de développement sans précédent depuis 1987 pour atteindre un niveau qui l'habilitait à se comparer aux plus grandes institutions bancaires du pays. D'ailleurs feu Hassan II avait renouvelé sa confiance à Rachid Haddaoui en le reconduisant dans ses fonctions en 1993 tout en louant les efforts qu'il a déployés à la tête de cette institution. Cette confiance a été renforcée par le rapport de la Banque mondiale établi en 1995 et dans lequel il confirmait la CNCA dans le statut de premier partenaire tout en louant également, au passage, la gestion de Rachid Haddaoui qui a épargné à la Caisse des difficultés financières potentielles à cause des années de sécheresse qui ont sévi au Maroc. Paradoxalement, c'est en 1995 que Rachid Haddaoui a été limogé et toutes les félicitations qu'il a reçues se sont transformées en reproches, inculpation et condamnation à quatre années de prison ferme sans qu'il soit contraint de restituer quoi que ce soit à son institution. C'est pour cette raison d'ailleurs que la défense de Rachid Haddaoui s'est insurgée pour exprimer sa désapprobation des conditions dans lesquelles se sont déroulées les assises. En somme pour la défense “ c'est le procès de l'âge d'or de la CNCA et que si des milieux ont des comptes politiques ou personnels avec Haddaoui, qu'ils le fassent en dehors de la scène judiciaire ”. L'on rappelle également que Haddaoui avait dit en clôture de son procès : “ que Dieu soit clément envers ceux qui ont voulu salir la justice de notre pays par ce dossier ”.