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Le tourisme est une grande cause de l'humanité
Publié dans La Gazette du Maroc le 09 - 02 - 2004

Interview exclusive de Francisco Frangialli, Secrétaire général de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT)
A la veille de la quatrième édition des “Assises du tourisme national” qui doivent se tenir à Casablanca les 12 et 13
février, La Gazette du Maroc a contacté Francisco Frangialli qui livre ici une analyse exhaustive de l'évolution du tourisme mondial et au Maroc.
La Gazette du Maroc : M. le secrétaire général depuis les attentats du 11 septembre 2001, le tourisme va mal. Pouvez-vous nous faire une radioscopie du secteur et de ses perspectives ?
Francisco Frangialli : Effectivement depuis trois ans nous vivons une période exceptionnelle que nous n'avions pas connue auparavant Il n'y a pas simplement les attentats de septembre 2001 que vous citez. L'enchaînement de toute une série de facteurs qui se sont cumulés (ces tragiques attentats mais aussi le retournement de la conjoncture économique en 2001 spécialement parce qu'il a affecté les plus grands pays émetteurs que sont les Etats-Unis, le japon et l'Allemagne. Il y a eu la vague d'attentats et votre pays malheureusement n'en a pas été exempté. Il y a eu le conflit de l'Irak et surtout la période qui l'a précédé, une période d'attentisme où aucune décision économique ne pouvait se prendre. Et au moment où on pensait sortir de la phase la plus dure du conflit de l'Irak est arrivé en Asie de l'Est et au Pacifique l'épidémie du SRAS. C'est vraiment une période exceptionnelle à tous égards que nous avons connue.
Naturellement le tourisme a souffert. Quelle autre branche de l'économie n'aurait pas réagi négativement à une succession de chocs de cette nature sans s'effondrer comme d'aucuns l'avaient prédit. Les trois années ont été en dents de scie avec des hauts et des bas : - 0,5% pour les arrivées internationales en 2001, +2,7% en 2002 et 1,2% en 2003. Ce qui veut dire 694 millions d'arrivées de touristes internationaux. J'ajoute que dès qu'il y a eu une éclaircie, dès que la situation semblait s'améliorer, une demande potentielle de vacances, de loisirs, de départs se concrétisait et s'exprimait dès que les circonstances le permettaient. Cela nous est confirmé par le baromètre de conjoncture de l'OMT basé sur un large panel mondial de décideurs économiques du secteur que nous interrogeons régulièrement et qui ont une très bonne appréciation pour les mois à venir. Donc on peut espérer sauf naturellement un nouvel accident de parcours. Nous avons une phase d'expansion et de reprise devant nous.
D'ailleurs lors de votre conférence de presse tenue à Madrid le 27 janvier dernier, vous avez annoncé que la reprise prévue en 2004 par région, le Moyen – Orient et l'Afrique ont enregistré en 2003 les meilleurs résultats de toutes les régions avec une progression de respectivement 10 et 5 % .
Oui, c'est spécialement vrai pour le Moyen – Orient. L'Afrique subsaharienne naturellement compte peu. Quant à l'Afrique du Nord, la Tunisie a souffert gravement des conséquences de l'attentat de Djerba. C'est seulement maintenant qu'elle refait surface. Mais c'est surtout la situation du Moyen-Orient qui a été assez exceptionnelle avec 17% de croissance en 2002 et 10% en 2003. On pourrait s'attendre qu'avec la persistance du conflit entre la Palestine et Israël, avec les différents problèmes qui agitent un certain nombre d'Etats de la région et surtout avec le conflit de l'Irak,cette région serait durement touchée. Certes moins d'Américains et d'Européens sont arrivés au Moyen-Orient, mais plus d'Asiatiques, de Russes notamment sont arrivés à Dubaï et à Charm El Cheikh et surtout les résidents de la région du Golfe (Arabie Saoudite, Koweït, Emirats…) sont restés chez eux. Comme pour tout le monde, dans toutes les régions il est prévu ce même phénomène c'est-à-dire une croissance des flux intrarégionaux plutôt que des voyages sur de longues distances; liés à une certaine appréhension à voyager en avion. Il y a aussi la difficulté pour un certain nombre d'habitants de ces pays de franchir les frontières notamment vers l'Amérique du Nord, ce qui les a incités à rester dans leur propre région. C'est pour cette raison que des destinations comme l'Egypte, Dubaï, la Syrie et le Liban se sont très bien comportées.
Pour parler du Maroc, vous allez assister à la quatrième édition des “Assises du tourisme national ” …
J'ai déjà eu le plaisir d'assister à la première édition qu'avait ouverte Sa Majesté le Roi à Marrakech. Je renoue donc avec ces grandes assises du tourisme national marocain.
Justement, votre intervention sera axée sur quoi ?
Je vais d'abord rappeler les éléments dont nous venons de parler et l'évolution de ces dernières années pour permettre aux responsables du tourisme marocain du gouvernement comme du secteur privé de se situer dans le panorama global parce qu'il est intéressant de ne pas avoir simplement le regard sur le volant de la voiture mais de regarder un peu plus loin et autour de soi pour pouvoir se positionner par rapport aux autres. Je noterai aussi qu'il y a eu au moins une conséquence positive de cette période de difficultés que nous venons de vivre à savoir la prise de conscience qu'elle a favorisée dans un certain nombre de pays. Il y avait des pays comme le Maroc qui depuis longtemps avaient fait le choix stratégique du développement touristique et votre plan pour 2010 en témoigne. Mais d'autres ne prenaient pas ce secteur très au sérieux et même si dans certains cas, ils étaient conscients de son importance en termes de balance de paiements, d'activités et d'emplois, ils vivaient un peu comme si le tourisme était une industrie qui se développait toute seule, qu'il n'y a pas grand-chose à faire et qu'il fallait la laisser croître par ses propres moyens. C'était un cadeau du ciel qui ne nécessitait aucune préoccupation…
Naturellement la déconvenue a été sévère pour un certain nombre de pays qui ont été durement touchés. Par conséquent, des gouvernements ont réagi. Pour la première fois depuis très longtemps, les Etats-Unis ont consacré un budget pour la promotion de leur région. L'Australie vient d'annoncer un programme de l'ordre de 200 millions d'Euros pour relancer son industrie touristique et d'ailleurs dans le cadre de ce mouvement, elle a décidé d'adhérer à l'Organisation mondiale du tourisme. Mais le plus important a été la prise de conscience de la communauté internationale qui a décidé de transformer notre organisation en une institution spécialisée des Nations Unies. C'est important parce que cela veut dire que la collectivité internationale et les Nations Unies reconnaissent aujourd'hui que le tourisme se situe au premier rang des grandes activités de l'humanité à côté de l'agriculture, de l'industrie, des transports mais aussi de l'éducation, de la culture ou de la santé. C'est une grande cause de l'humanité. Cela constitue un développement non seulement important pour notre institution mais pour tous ceux qui sont convaincus que ce secteur est porteur. D'ailleurs, je remercierai le Royaume du Maroc parce qu'il a chaleureusement appuyé cette transformation notamment en sa qualité de président du groupes des 77 au sein des Nations – Unies.
Dans sa Vision 2010, le Maroc table sur dix millions de touristes. Le Royaume est connu pour être le pays le plus proche de l'Europe et pour cause 14 Km nous séparent de notre voisin du nord. Or l'Espagne a reçu en 2003, près de 52 millions de touristes, avec le développement du tourisme de croisière. Si le Maroc réussit à séduire 10% de ce chiffre, il aura 5,2 millions de touristes. Peut-on spéculer là-dessus et pensez-vous que c'est possible et dans quelles conditions ? Et s'il y a des problèmes où se situent-ils ?
D'abord le nombre d'arrivées est une donnée à prendre avec une certaine précaution. Voyez-vous par exemple la France reçoit plus de 75 millions
de visiteurs, l'Espagne 50 millions et pourtant les recettes touristiques espagnoles sont maintenant sensiblement supérieures à celles de la France parce que cette dernière géographiquement est un pays de passage que de nombreux touristes traversent en voitures soit pour se rendre dans la péninsule ibérique soit en Italie. Ce phénomène de transit existe aussi en Espagne. Il y a un transit important notamment de Marocains habitant en France, en Allemagne, en Hollande ou en Belgique qui traversent simplement l'Espagne pour se diriger vers leur pays. Donc les chiffres d'arrivées sont à prendre avec une certaine précaution et quand vous êtes en bout de chaîne comme le Maroc, naturellement vous êtes moins favorisés. L'objectif de 2010 de dix millions de touristes est un objectif ambitieux formulé à une époque antérieure à cette période de trois ans de soubresauts qui ont affecté tout le monde. Cela ne serait pas tellement impossible que cet objectif soit décalé un peu dans le temps non pas que le Maroc n'ait pas fait les efforts nécessaires mais parce que l'environnement où il se situe a posé et pose encore des difficultés à cette destination comme aux autres.
Le plus important c'est qu'il y a une vraie mobilisation et cela n'a jamais été vu à mon sens dans votre pays et c'est ce que je dirai.
Si vous avez des recommandations à faire aux responsables et aux professionnels marocains pour promouvoir et vendre la destination “Maroc” que leur diriez-vous en vous inspirant de cette maxime arabe : La personne la plus préférée est celle qui m'offre mes défauts ” ?
Ecoutez le tourisme marocain n'a encore exploité qu'une partie de son potentiel. La côte nord de la Méditerranée, le tourisme intérieur à l'exception des grandes villes culturelles sont encore pratiquement des terres vierges. Je crois donc qu'il y a un élargissement de l'offre qui est nécessaire.
Deuxièmement, dans les zones qui sont déjà fortement fréquentées, il y a naturellement des problèmes de comportements et d'éducation pour que la facilité de l'accueil et celle de la communication qui sont souvent l'une des qualités des Marocains ne se transforment en une pression, en harassement et en ennuis pour ceux qui le visitent.
Il y a un effort de formation incontestable à faire parce que si on veut 10 millions de touristes, ça ne sera pas simplement des visiteurs parlant anglais, allemand, italien, espagnol. Il y a toute une série de mesures d'accompagnement connues des responsables du gouvernement et je pense qu'ils feront le nécessaire.
Dans ce cadre, le gouvernement par l'intermédiaire du ministère du Tourisme et de l'OFPPT, a signé un contrat-proramme qui prévoit 72.000 emplois qualifiés. Ceci dit, le Maroc affiche la volonté d'ajouter aux 3S (Sea – Sun and Sand), 3 autres S (le Savoir, le Savoir-faire et le savoir-vivre) pour réussir le pari. Qu'ajouterez-vous ?
Il faut aussi le faire savoir.
La balle est donc dans le camp des responsables et des professionnels du secteur.
Tout à fait.
Pour revenir à la question des statistiques et leur manipulation. Selon la terminologie de l'OMT est considéré touriste, toute personne qui passe 24 heures en dehors de chez elle. Or en Tunisie ou ailleurs, on dope les statistiques pour dire “nous avons drainé x millions de touristes”, qu'en pensez-vous ?
Il y a un problème qui est commun à la Tunisie et au Maroc qui est la comptabilisation des Tunisiens ou des Marocains qui sont résidents en Europe et qui reviennent pour un certain temps en vacances renouer les relations familiales. Selon les statistiques de l'OMT, ils sont considérés comme des touristes parce qu'ils quittent leur environnement habituel pour plus d'une journée pour aller séjourner dans un autre pays que celui où ils vivent normalement et bien qu'ils aient la nationalité du pays où ils se rendent. Ceci dit, il est évident qu'un Marocain qui revient au Maroc ou un Tunisien qui revient en Tunisie n'a pas le même mode de consommation, ne fréquente pas les mêmes endroits, ne séjourne pas nécessairement à l'hôtel. Naturellement chez les parents ou chez des amis et donc cela n'a pas la même valeur économique mais sur le plan des statistiques, ce sont des arrivées internationales.
La Tunisie avait opté au départ pour le tourisme de masse. Le Maroc a privilégié le tourisme haut de gamme. Et en parlant de consommation, pensez-vous à titre d'exemple qu'un touriste de l'Europe de l'Est est meilleur consommateur qu'un Maghrébin qui rentre en vacances ?
Ecoutez. D'abord, il ne faut pas regarder nécessairement avec dédain le tourisme de masse. Il faut bien que ceux qui n'ont pas un pouvoir d'achat considérable aient les moyens de se déplacer à l'étranger, ils représentent quand même un marché significatif et même la dépense individuelle moyenne est plus faible. Les accueillir aussi n'est pas du tout quelque chose de mauvais. Ce qu'il faut c'est que cela n'écrase pas tout et je crois que le Maroc est un grand pays avec un potentiel extrêmement diversifié , qu'il a la capacité d'accueillir différentes clientèles de manière diversifiée dans des destinations ou types d'hébergement et de de produits très différents les uns des autres et qui répondent à la vocation des différentes clientèles. S'agissant de l'Europe centrale et orientale, vous avez une grande hétérogénéité. Vous avez effectivement des gens qui se déplacent à l'étranger pour la première fois et n'ont pas un grand pouvoir d'achat et qui notamment en Europe se déplacent en autocars, représentent une clientèle nouvelle mais pas une clientèle à haute contribution. Par contre vous avez une clientèle venant de Russie et d'autres pays de l'Europe de l'Est extrêmement riche et qui représente une consommation de luxe sur la côte d'Azur française, sur le littoral espagnol, à Londres ou à Paris. Cette nouvelle clientèle de l'Europe de l'Est représente un apport considérable.
Donc, il ne faut pas regarder cela de manière globale. Peut-être un autre créneau qui avait été considéré autrefois par le Maroc et dans lequel ni le Maroc ni la Tunisie n'avaient très bien réussi c'est celui de la clientèle du Moyen-Orient en raison des proximité, de langue, de religion et surtout du fait que les ressortissants de ces pays sont un peu tentés de rester dans leur propre région. Pour l'instant, ils le font au Moyen-Orient au sens strict c'est-à-dire en Egypte, aux Emirats et puis en Jordanie, Syrie, Liban.
Avec des produits de bonne qualité et un transport aérien adéquat il y a déjà une ligne directe Maroc/Arabie saoudite assurée par RAM, celle-ci pourra accueillir ses clients dans des conditions qui répondent à leurs attentes. C'est probablement un marché porteur comme l'ont montré les résultats d'autres destinations de la zone au cours des deux dernières années.
Vous venez d'évoquer la problématique de l'aérien dans la commercialisation de la destination Maroc. A votre avis, que doit fairele Royame pour résoudre cette équation ?
Je crois que le Maroc devra être plus audacieux dans l'ouverture de son ciel. Il y a un pays qui a un potentiel énorme et qui jusqu'à maintenant ne se souciait guère en raison d'une politique frileuse en matière de tourisme et de transport aérien qui est l'Inde. Depuis un an l'Inde a libéré son transport aérien, supprimé toute une série de taxes d'aéroport et ouvert complètement son ciel. Le résultat est qu'il y a un boom touristique extraordinaire vers l'Inde. Il faut savoir s'ouvrir même si c'est quelquefois un peu difficile.
Une autre question a trait au financement des projets. Dernièrement un groupe étranger a été évincé parce qu'il n'a pas honoré ses engagements.
Personnellement je crois que la destination Maroc est suffisamment attractive en tant que telle pour peu que les conditions de base soient mises en place par les pouvoirs publics c'est-à-dire l'accès, les infrastructures, les conditions environnementales et de sécurité satisfaisantes avec naturellement la formation dont nous avons parlé. Il n'est pas tellement nécessaires d'avoir des incitations financières particulières aux projets d'investissements privés. Les opérateurs aussi sont en train de chercher des destinations. Il y a des destinations proches du Maroc en Méditerranée ou dans les Baléares qui sont maintenant totalement saturées et qui ont créé des mécanismes de financement pour diminuer les capacités , détruire les chambres d'hôtels vétustes et monter en gamme. Les Canaries ont décidé d'interdire tout nouvel investissement et tout nouveau projet considérant que la destination est totalement investie. Je suis quasiment certain qu'une destination qui est un peu plus lointaine pour les Européens, celle du Cap Vert, va s'ouvrir à toute vitesse. Donc si le Maroc met en place les conditions d'accueil offrant un environnement dans tous les sens du terme physique, humain, naturel, de formation, législatif et de sécurité, le financement des investissements se fera d'une manière spontanée.
La vision 2010 coïncide avec la candidature du Maroc d'abriter la Coupe du monde. On dit qu'à chaque fois qu'un pays a organisé ce grand événement il y a eu plus ou moins une sorte de décollage économique. Qu'en pensez-vous ?
L'OMT a fait des travaux de recherche sur ce sujet et a organisé de grandes conférences sur la question du “Sport et tourisme”. Je crois que les grands événements comme la Coupe du monde de football, les Jeux olympiques ou autres doivent être appréciés d'une manière proportionnée et mesurée en ce sens qu'un grand événement sportif n'apporte pas une fréquentation touristique additionnelle très considérable. Ce ne sont pas les visiteurs supplémentaires qui viennent au moment de l'événement qui font vraiment la différence dans des pays qui sont déjà très touristiques comme le Maroc ou comme la France quand elle a organisé la Coupe du monde de football. Ce n'est pas un plus très important.
L'important, ce sont deux choses. D'abord les infrastructures que l'on réalise, les infrastructures aéroportuaires, de communication, de logement des sportifs et d'équipements de liens de communication à l'occasion d'un tel événement sportif.
Et puis la deuxième chose naturellement est l'image que l'on donne de son pays. La manière dont la Corée du Sud et le Japon ont organisé la Coupe du monde leur a beaucoup servi. La très bonne communication et la très bonne atmosphère qui avait précédé la Coupe du monde en France était très positive pour le tourisme français. Les Jeux olympiques de Sydney avec une bonne organisation ont été un plus remarquable pour le tourisme australien alors que les médiocres conditions des Jeux d'Atlanta n'ont pas aidé le tourisme des Etats-Unis. Je crois surtout que tout ce qui a accompagné et préparé l'événement en termes d'infrastructures, l'utilisation ensuite qui doit être bien pensée des infrastructures pour savoir ce qu'on en fera et comment elles contribueront au développement touristique une fois que l'événement aura eu lieu et, deuxièmement la communication, l'image qu'on est capable de projeter au moment de l'événement. L'événement en lui-même n'a pas un impact touristique très fort.
Vous avez dit précédemment que le touriste doit évoluer dans un environnement idoine en termes d'accueil, de sécurité etc… L'Afrique du Sud avec Johannesburg comme capitale mondiale du crime par exemple, est-elle bien placée pour abriter la Coupe du monde, surtout que si elle se déroule en été c'est l'hiver là-bas ?
D'abord l'Afrique du Sud est une destination qui fonctionne très bien et notamment les mesures de libéralisation que les responsables sud-africains ont prises pour l'accueil des visiteurs comme par exemple la délivrance des visas qui étaient autrefois un obstacle pour l'Afrique du Sud. Les mécanismes qu'ils ont mis en place pour la délivrance de visas à l'arrivée aux aéroports étaient très positifs. Deuxièmement, c'est vrai que l'Afrique du Sud est un pays compliqué. Il y a des tensions. Il y en a beaucoup qui ont suivi le changement de régime avec de graves problèmes de sécurité notamment dans les grandes cités comme Johannesburg. L'évolution de ces deux dernières années a été orientée très nettement vers une amélioration qui est patente des conditions de sécurité. Tous les problèmes sont loin d'être résolus mais sur le plan de la sécurité, c'est nettement mieux qu'il y a quelques années.
Selon votre institution, le Maroc est-il perçu comme un pays à risque ?
L'OMT ne classe pas les pays entre pays à risque et d'autres sans risque. Vous savez qu'au cours des difficultés que nous avons vécues ces dernières années et notamment dans les tragiques attentats qu'on a connus ici ou là, c'est souvent des destinations qui étaient considérées comme très sûres et très tranquilles. Il n'y a jamais eu de problèmes en Tunisie. Djerba a été une destination des plus calmes possibles et il y a eu cet horrible événement en Asie. Si l'Indonésie est un pays compliqué avec des tensions dans telle ou telle procince, Bali était considérée comme un paradis isolé et pas susceptible d'être touchée pourtant
ça a été le plus odieux et le plus
terrible attentat dans l'histoire du tourisme mondial. On ne sait donc malheureusement jamais. Ce que je voudrai dire c'est qu'à mon sens le Maroc ne présente pas plus de risques que d'autres pays et qu'en tout cas lorsqu'il y a eu les attentats de Casablanca, les touristes n'étaient pas visés. Il n'y a pas eu de victimes ce qui a fait que le retentissement a été très limité et deuxièmement la manière dont les autorités marocaines ont réagi vis-à-vis des grands tours opérateurs en tirant les leçons de ce qui a été fait dans d'autres cas dans d'autres pays, a été tout à fait remarquable et a limité l'impact de cet incident.
Donc face à une crise, à un imprévu, comment un pays à vocation touristique doit réagir pour relancer le secteur ?
Je ne crois pas que je puisse entrer dans toutes les explications. Par contre, ce que je peux dire c'est que l'OMT est très active dans ce domaine. Nous avons constitué un comité de crise après le 11 septembre 2001 pour aider nos membres à réagir ensemble et à coopérer pour affronter les différents chocs qui sont d'ailleurs le fait des guerres, des attentats, des désastres naturels et d'épidémies. Evidemment quelle que soit l'origine du choc, les modes de réaction et de réponses sont un peu finalement les mêmes. Ce comité de crise qui est d'ailleurs présidé par le ministre égyptien du tourisme, Baltaji a affronté ces crises et les a généralement très bien surmontées. Ce comité a bien fonctionné permettant d'échanger l'information pratiquement en temps réel et de prendre les bonnes décisions. Vous savez quand les choses vont mal, ceux qui en temps normal sont des concurrents, deviennent des partenaires et sont tout à fait prêts à coopérer, à aider l'autre à se remette en marche parce que les intérêts sont finalement plus forts que la concurrence entre les destinations.
Ce comité de crise rassemble des ministres des pays émetteurs comme des pays receveurs et aussi de grands opérateurs touristiques et aériens et le Maroc a participé pratiquement à toutes les réunions et a été actif à l'intérieur de ce comité. L'OMT a également préparé les instruments, c'est –à-dire les recommandations sur tout ce qu'il faut faire pour se préparer, se prémunir et ensuire réagir à court terme et à plus long terme si vous êtes victimes d'une crise. Nous avons animé des séminaires et des conférences un peu partout dans le monde pour aider les pays membres à être prêts. En un mot, je dirai que la recommandation la plus importante si on est touché par un incident c'est de jouer la carte de la transparence. Et non pas essayer de cacher la vérité qui finit toujours par éclater. Souvent cette vérité est circonscrite lorsque l'événement touche uniquement une ville ou une région et que le reste n'est pas atteint. Je dirai qu'il ne faut pas non plus exagérer et jouer la carte de la transparence en proposant aux tours opérateurs et aux journalistes de venir pour se rendre compte et de rapporter ce qu'ils ont vu. Cela est plus loisible que la propagande officielle qui est souvent la meilleure réponse quand on a le malheur d'avoir ce type d'incident.
M. Francisco Frangialli, en tant que touriste et non pas en votre qualité de secrétaire général de l'OMT, comment vous percevez le Maroc ?
Oh ! Le Maroc est un des pays que j'apprécie beaucoup et mon regret c'est de venir très souvent à titre professionnel et pas assez comme visiteur. Quand je n'assumerai plus ces responsabilités, je reviendrai au Maroc à titre privé.
Votre ville marocaine préférée et bien sûr votre plat ?
Non, non, je ferais trop de jaloux si je commençai à énumérer mes places préférées…
Le mot de la fin ?
J'attends avec beaucoup d'impatience de pouvoir assister aux IVèmes assises nationales du tourisme.
Le tourisme marocain n'a encore exploité qu'une partie de son potentiel. La côte nord de la Méditerranée, le tourisme intérieur à l'exception des grandes villes culturelles sont encore pratiquement des terres vierges. Je crois donc qu'il y a un élargissement de l'offre qui est nécessaire.
Le Maroc
est un des pays que j'apprécie beaucoup et mon regret c'est
de venir très souvent à titre professionnel et pas assez comme visiteur. Quand je n'assumerai plus ces responsabilités, je reviendrai
au Maroc à titre privé.


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