Ils se sont retrouvés en masse à Skhirat, ont applaudi l'accord, puis chacun est reparti au front avec ses convictions et, surtout, ses accointances. Voilà l'ambiance qui règne dans ce complexe conflit en Libye où trois clans, non des moindres, plombent toute tentative de compromis. Vous avez d'un côté le gouvernement Fayez Serraj, reconnu par les Nations Unies, et face à lui le général retraité Khalifa Haftar, qui roule pour l'axe Riyad-Abou Dhabi. Le plus drôle dans cette histoire, c'est le jeu incompréhensible -et pour le moins schizophrène- des puissances mondiales. Ainsi, les Etats-Unis et la Russie, que tout oppose, décident ensemble, contre toute attente, de soutenir le mercenaire Haftar face au légitime pouvoir de Serraj. L'Europe, droite dans ses bottes, continue de soutenir la légitimité internationale du pouvoir en place à Tripoli, Londres et Berlin en premier lieu, au moment où Paris joue sur tous les tableaux. Elle ne cache pas son soutien au terroriste Haftar mais, en même temps, ne perd pas de vue ses homologues européens. La Libye devient ainsi un champ d'expériences pour les novices en géostratégie et les schizophrènes qui dénoncent à longueur de journée le terrorisme qui les guette, mais en revanche, ne font même pas semblant en en soutenant ouvertement des milices, comme les a qualifiées le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, sans sourciller. Dans notre zone arabe, il n'y a point de surprises. Cherchez dans les différents foyers de tension des pays arabes, vous trouverez un dénominateur commun: l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis. Pas étonnant, donc, que le mercenaire Haftar soit reçu par le roi d'Arabie trois jours avant de lancer son offensive sur Tripoli. Ici, Rabat a dès le début soutenu la légitimité et fait de Skhirat la capitale de la Libye, le temps des négociations, se démarquant encore une fois du clan des fauteurs de troubles.