L'industrie débute l'année sans véritable rupture de tendance. L'enquête de conjoncture auprès des industriels, de Bank Al-Maghrib, révèle un climat des affaires largement perçu comme «normal», mais cette apparente stabilité cache des tensions, à savoir des pressions sur les coûts, des investissements prudents et une trésorerie sous contrainte. Dans un environnement international encore incertain, l'industrie locale entame 2025 avec une prudence assumée. Les résultats de l'enquête de conjoncture menée par Bank Al-Maghrib pour le premier trimestre dressent le portrait d'un secteur en équilibre précaire, ni en repli marqué, ni franchement en redressement. À travers les perceptions de près de 400 chefs d'entreprise, ce baromètre révèle une conjoncture industrielle faite de normalité résiliente et de tensions persistantes. Un climat des affaires stabilisé, mais sous surveillance Au cœur de l'analyse, un chiffre ressort. 76% des industriels interrogés qualifient le climat des affaires de «normal». Si ce niveau traduit une certaine stabilité après les secousses des dernières années, il masque une hétérogénéité sectorielle. Dans les branches du textile et de l'agroalimentaire, la perception reste globalement positive, mais les secteurs de la chimie, de la métallurgie ou encore de la mécanique témoignent de conditions plus mitigées. La concurrence accrue et la faiblesse persistante de la demande intérieure constituent, selon les répondants, les principaux freins au développement de l'activité. L'étau des intrants Les conditions de production, bien qu'en majorité jugées normales (78%), se heurtent à des difficultés spécifiques. Dans la chimie et parachimie, un tiers des industriels signalent des problèmes d'approvisionnement, un taux qui reste significatif dans les autres filières industrielles. Cette pression se reflète également dans les coûts de production, en hausse pour 35% des entreprises, notamment dans la chimie (48%) et la métallurgie (46%). Les intrants importés, plus chers et moins disponibles, continuent de peser sur les marges. Trésorerie et financement, une normalité sous contrainte La situation financière des entreprises demeure un point d'attention. Si 76% des industriels considèrent leur trésorerie comme «normale», un cinquième d'entre eux la jugent «difficile». Là encore, les écarts sectoriels sont marqués. Dans la chimie et parachimie, 43% des entreprises évoquent des tensions de liquidité. En matière de financement bancaire, le climat reste relativement fluide, avec 84% des chefs d'entreprise qui rapportent un accès «normal» au crédit, avec un coût globalement stable. Toutefois, le secteur de la chimie apparaît là encore plus sous pression, tant en termes d'accès que de conditions. Prudence et autofinancement Les décisions d'investissement reflètent cet équilibre fragile entre volonté de croissance et prudence stratégique. Au premier trimestre, 64% des industriels déclarent une stagnation de leurs dépenses d'investissement, contre 22% une hausse. Une tendance que les prévisions à trois mois confirment, même si un tiers des répondants anticipent une reprise modérée. Ce redémarrage repose largement sur les fonds propres – à hauteur de 73%, signe d'une certaine défiance ou d'un accès au crédit plus sélectif. Seuls 27% des investissements ont été financés par emprunt. Vers un printemps industriel plus affirmé ? La photographie du premier trimestre 2025 suggère un secteur industriel en mode observation. Entre normalité statistique et fragilités sectorielles, les marges de manœuvre restent contraintes. Pourtant, quelques signaux laissent entrevoir un possible regain d'initiative dans les mois à venir. Encore faut-il que l'environnement économique global, notamment les prix des matières premières et la demande intérieure, confirme cette lueur de reprise. Sanae Raqui / Les Inspirations ECO
