Deux femmes militantes ont été honorées le 15 mars courant, par la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc à Rabat, en commémoration de la journée internationale de la femme, au cours d'un débat-thème : « Défis et combats...Une histoire au féminin », animé par deux autres femmes Amina Achour et Asmaa Kadiri. Cet hommage a été rendu à deux femmes qui ont choisi un terrain glissant où se chevauchent mentalités, enseignements, préjugés, stéréotypes et tabous. La première, Mme Aicha Chenna, fait partie d'une génération dite de l'ancienne école, où la générosité du cœur primait encore sur toute autre considération, agissant, à la lumière d'un déclic ou événement fâcheux qui a forcé sa destinée, laissant son regard ou plutôt ses sens rivés vers un seul but, améliorer le destin des mères célibataires, à condition qu'elles gardent leurs enfants, qualifiés d'illégitimes par la société. L'autre, Mme Selma Bennani, est dame qui a été happée par l'action sociale à la fleur de l'âge, depuis l'adolescence, un âge où l'esprit rebelle se mêle à une certaine curiosité aiguisée par ses propres expériences, tests ou études. Selma Bennani a bravé tous les obstacles, qu'ils soient culturels ou autres, afin de faire du sport un outil thérapeutique et socio-psychologique, ainsi qu'une ouverture sur le marché de l'emploi pour arracher une jeunesse, encline à la dérive, des étaux de la « rue » et ses déboires, qui parfois pour ne pas dire souvent conduisent à l'irréparable. Bref, nous sommes là face à deux femmes, de deux générations juxtaposées mais animées du même ressentiment contre l'injustice et d'une même hargne pour la réhabilitation, la réinsertion, le regain de confiance et de dignité des femmes. Une citation d'Ibn Rochd, Averroès pour d'autres, datant de 1163, a été relevée lors de la soirée, stipulant que les femmes doivent travailler pour la société et l'Etat comme les hommes, effectuer les mêmes tâches que l'homme... Il s'avère que 900 ans plus tard, la cause n'a guère évolué. Aïcha Ech Chenna : Fondatrice et Présidente de l'association «Solidarité Féminine» Mme chenna a fait de la cause des mères célibataires son cheval de bataille, à travers l'association solidarité féminine. 51ans de combat, n'ont pas éteint cette lumière qui brille dans ses yeux, cette générosité de cœur qui brave tous les obstacles et cette énergie qui n'a d'égale que sa détermination. Sa cause à elle, c'est œuvrer pour la réinsertion sociale des mères célibataires, remettre la mère célibataire et son enfant sur les « rails » dans leur cadre naturel, lutter contre l'abandon de l'enfant par sa mère pour qu'il garde des repères. Car si chaque jour, 24 bébés sont abandonnés dans la rue, Mme Chenna lutte pour la prise en charge de la mère avec son enfant. Grâce à son acharnement par le biais de son association, 2000 familles ont été prises en charge depuis 1985, à travers un accompagnement quotidien. Elle reçu de nombreuses distinctions nationales et internationales, depuis 1996. En 2013, elle est nommée chevalier de la légion d'honneur de la république française. Son livre « Miséria », ouvrage touchant et sa dernière publication : « A haute voix » sont au fait des témoignages qui laissent sans voix. Selma Bennani : Fondatrice et Présidente de la Fédération Royale Marocaine des Sports Aérobics, Fitness et Hip Hop La lutte par le sport. Ou quad le sport devient vecteur et locomotive pour une réinsertion sociale. C'est le cheval de bataille enfourché par Mme Selma Bennani pour son combat contre les inégalités et les injustices sociales. Déjà toute petite, elle passait ses mercredis après-midi à l'AMSAT : Association Marocaine de Soutien et d'Aide aux Personnes Trisomiques. Poussée par sa fibre citoyenne, elle choisi depuis 1996 de faire du sport un outil de développement social et touristique, en tant que fondatrice et présidente de la Fédération Royale marocaine des sports aérobic et fitness, hip hop et disciplines assimilées. Tel qu'elle le définit, l'aérobic est un sport médical et thérapeutique par excellence, accompagné par la musique, il est très varié puisqu'il comporte une vingtaine de disciplines et n'est nullement discriminatoire. Un sport accessible aux pauvres autant qu'aux riches. Son objectif principal est avant tout humain et se résume à la réinsertion des personnes en situation précaire, briser les barrières de l'exclusion, de la marginalisation et de l'échec dans les franges sociales défavorisées. La population ciblée, ce sont les prostituées et les anciens détenus, auxquels elle ouvre grande la porte des salles des sports aérobics, à travers la formation, l'encadrement, les stages et les compétitions, à des fins sociales et sportives, pour qu'ils puissent y travailler et gagner leurs vies. Cette femme discrète multiplie les initiatives, elle a toujours soutenu la langue amazighe qu'elle parle couramment depuis 18 ans et favorise également le dialogue des cultures. Première femme juge internationale, elle est lauréate de plusieurs prix nationaux et internationaux, « Khmissa » en 2008, elle est récompensée par le Conseil régional des dialogues du peuple et des cultures en 2013.